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[CRITIQUE] : Un Jour de Pluie à New York


Réalisateur : Woody Allen
Acteurs : Elle Fanning, Timothée Chalamet, Selena Gomez, Jude Law, Diego Luna, Liev Schreiber,...
Distributeur : Mars Films
Budget : -
Genre : Drame, Comédie.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h32min

Synopsis :
Deux étudiants, Gatsby et Ashleigh, envisagent de passer un week-end en amoureux à New York. Mais leur projet tourne court, aussi vite que la pluie succède au beau temps… Bientôt séparés, chacun des deux tourtereaux enchaîne les rencontres fortuites et les situations insolites.



Critique :



On en aura passé du temps à se demander si Un Jour de Pluie à New York finirait finalement par arriver sur nos écrans de cinéma, si bien que 2018 fut la première année depuis 1991 à ne pas voir Woody Allen sortir un film (sortie U.S.). Un exemple de régularité à toute épreuve, désormais entaché par une immonde tâche de gras indélébile.
Mais le voici de retour, et plutôt en forme avec une petite douceur New-yorkaise dont lui seul a le secret.



Woody Allen aime New York. Il l’aime et surtout il possède ce don rare de nous la faire aimer comme il l’aime sans que l’on n’y ait jamais mis les pieds. La grosse pomme est un peu le personnage principal de son œuvre, celui qu’il a toujours traité avec une dévotion sans faille, l’extension à l’échelle d’une grande ville de ses névroses et celles de ses personnages : les gens y sont désagréables, stressés et trop pressés… Et pourtant elle dégage cette magie unique captivante qui fait qu’à l’instar de son personnage principal, il y reviendra toujours. Il peut bien aller visiter le temps d’un film Paris, Rome, Barcelone, Hollywood ou encore Coney Island, le pouvoir d’attraction de New York le ramènera toujours à la maison. Et c’est encore là qu’il raconte ses plus belles histoires.
Le film se concentre sur un couple d’étudiants à la fac passant un week-end à la ville, dont les deux protagonistes sont respectivement incarnés par Timothée Chalamet, moins à l’aise dans sa transfiguration de Woody Allen qu’avait pu l’être Jesse Eisenberg dans Café Society mais plutôt pas mauvais, et Elle Fanning, tout simplement merveilleuse et dont la maladresse a plus de charme que tout Hollywood réuni. Des personnages dans le plus pur style d’écriture du réalisateur et dont le charme opère dès la toute première scène. Mais New-York, d’une certaine façon pensée comme l’antagoniste du film, n’entend pas laisser tranquilles nos deux tourtereaux et ces deux-là vont très vite se retrouver séparés, vivant chacun de leur côté leurs aventures citadines.
D’une part le film est une douce errance mélancolique lorsque l’on suit le personnage de Gatsby. Il tue le temps dans les rues de son enfance, croise des visages familiers, vogue au gré de ces rencontres pour finalement atterrir là où il doit être pour achever son voyage et avoir sa prise de conscience. Il est chez lui, bien qu’il ne s’en rende pas immédiatement compte il arpente ces rues comme si elles étaient les siennes, avec le flegme de celui qui les connait par cœur.


D’une autre part c’est une errance beaucoup plus vigoureuse lorsque l’on suit le personnage de Ashleigh qui elle n’a jamais mis les pieds à New-York et vit ce week-end comme une enivrante aventure durant laquelle elle va rencontrer trois de ses idoles de cinéma et être embarquée par elles dans ce milieu qui la fascine tant.
C’est cette opposition de points de vue sur la ville qui lui confère cette dualité enjôleuse : C’est à la fois un lieu de fantasme et un lieu de souvenir. Mais si le fantasme semble au premier abord plus excitant, il est fragile et éphémère là où les souvenirs qui sont d’apparence plus âpres sont la véritable source d’un amour inconditionnel et d’une relation de dépendance presque fusionnelle avec elle, que seul un New-yorkais peut réellement comprendre.


Kevin



Un jour de pluie à New York semble capter en lui un moment précis, une odeur précise devrais-je dire, vous savez quand les premières goûtes d’une averse vienne caresser le bitume encore brûlant ? Eh bien voilà la sensation que m’a donné le nouveau film de Woody Allen. Je sais, ceci est assez imagé, voir même vague pour certains, alors pour être plus simple, disons que ce dernier long-métrage fait partie des bons crus du réalisateur.
Pourtant aux premiers abords Un jour de pluie à New York s’apparente à une nouvelle variante d’un même thème. Péripéties romantiques pour personnages bardés de références culturelles sur fond de jazz le tout dans les rues pluvieuses de New York. Mais, dans cette mécanique bien huilée, le réalisateur capte quelque chose de nouveau, une énergie qu’on ne lui avait pas connue depuis des lustres — à l’exception de son Café Society.


L’octogénaire semble comme revigoré par la prime jeunesse du trio Chalamet/Fanning/Gomez, lui donnant une envie de radical optimisme. Une sensation que l’on retrouve dans le personnage de Gatsby, Chalamet en parfait ersatz d’Allen, qui trouve que du bon dans ce temps pluvieux. Tel un prolongement, les personnages plus agés sont tous désabusés, trompeurs ou malheureux créant un décalage souvent comique, un brin mélancolique, mais surtout, et avant tout imbibé d’un certain espoir en l’avenir. Woody Allen en scrutant ces jeunes garçons romantiques et ces jeunes filles séduisantes, s’était soudain aperçu que cette génération était dans un désir intense de vivre l’instant, même si celui-ci est pluvieux, et qu’après tout rien n’est grave, que rien n’est éternel et même pas l’art quand un couple en devenir roucoule dans le MET.
Tout cela se déroulant dans un New York réalistement féerique. Là encore un léger pas de côté pour le cinéaste, qui filme la ville qui ne dort jamais comme il avait filmé la plus belle ville au monde — Paris, avec une fantaisie, un écrin fantasmé où le hasard d’une rue mène sur un plateau de tournage. À partir de cet instant, Allen ne met plus en scène le New York de son quotidien, mais celui du cinéma, celui qui fait rêver qui se trouve sublimer par la photographie chimérique de Vittorio Storaro.



Ainsi, Un jour de pluie à New York est un long-métrage à la fois follement imbibé par le ton de son auteur, mais aussi, et c’est plus rare, par le casting qui l’incarne donnant un drôle d’hybride, quelque chose d’assurément moderne et de pourtant indéniablement traditionnel. Un « en même temps » magnifique, mélancolique, éphémère.


Thibaut Ciaverella



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