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[CRITIQUE] : Lucky Day


Réalisateur : Roger Ivory
Acteurs : Luke Bracey, Nina Dobrev, Crispin Glover, Tomer Sisley, Mark Dacascos, Nadia Farès, Clifton Collins Jr,...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Thriller, Action, Policier.
Nationalité : Français, Canadien.
Durée : 1h35min

Synopsis :
C’est le grand jour, Red sort de prison, après avoir purgé deux ans pour un braquage de banque qui s'est soldé par la mort de son complice. Il retrouve sa femme Chloé qui l’a attendu tout en élevant seule leur fille Beatrice. Le même jour, Luc, le frère de son ancien complice, tueur à gages et psychopathe notoire, débarque assoiffé de vengeance et avec la ferme intention de l'éliminer…



Critique :


Qu'on se le dise une bonne fois pour toutes : le talentueux Roger Avary n'a sans doute pas eu la carrière qu'il méritait, même s'il ne s'en est, peut-être, pas forcément donné les moyens non plus de l'avoir, aussi bien au coeur du business Hollywoodien (un manque de vice qui n'a pas manquer à son ex-partner in crime Quentin Tarantino) qu'en dehors des plateaux de cinéma (on ne reviendra pas sur son passage par la case prison).
Passé ce constat logique ainsi que la rareté du bonhomme devant les radars cinephiles, il est donc évident que pour les amoureux de Killing Zoé et Les Lois de l'Attraction, tout film estampillé Avary serait attendu avec une impatience non feinte, surtout quand le dit film est plus ou moins (surtout plus que moins) une refonte d'une suite avorté de son premier et brillant essai.



Car oui, Lucky Day était bel et bien au départ, une séquelle de Killing Zoé, tuée dans l'oeuf au fil du temps avant d'être réactivée de manière totalement improbable il y a quelques années maintenant.
Une renaissance dont l'écriture (où plutôt la réecriture) du cinéaste, laisse volontairement transparaître quelques touches appuyées du jet d'origine... autant qu'une incapacité latente a pleinement pouvoir s'en démarquer ni même à en retrouver ne serait-ce qu'une once de sa maestria, tel une oeuvre perdue au beau milieu d'un temps qui n'est plus le sien (pas un problème en soi parfois) et dont il n'arrive jamais vraiment à en convoquer la nostalgie.
Laissant bien trop parler son amour pour les récits alambiqués mais surtout parallèles et entremêlés entre eux, Lucky Day se perd tout du long dans la revendication malade de la co-paternité d'un style " Tarantinesque " qu'il a aidé à mettre au monde, mais dont il a totalement été rejeté par la suite, au lieu de subtilement s'en démarquer pour voguer en solo au coeur de la série B de luxe à la violence déjantée et white trash, d'où se dégage une francophilie sévèrement prononcée.



Faussement irrévérencieux et plombé par un humour racoleur tombant sensiblement à plat, dont l'intrigue mi-psychanalytique (le bonhomme laisse exploser ses tripes via des coups de projecteurs remarqués sur son propre parcours) mi-alambiquée à mort fait constamment l'éloge de son manque de consistance (jusque dans la platitude de ses personnages, incarnés par une improbable brochette de comédiens peu impliqués) et d'originalité dans sa prise en grippe satirique du monde moderne (entre décadence et culte à l'argent roi, où les valeurs fondent comme neige au soleil), le tout sous couvert d'un hommage certain à la mise en scène stylisé et testostéronée de feu Tony Scott; Lucky Day bouffe sensiblement à tous les rateliers sans ne jamais vraiment remplir la panse d'un auditoire qui ne demandait pourtant pas la lune pour être séduit.
Entre la volonté sincère de toucher du bout de la pellicule une recette kitsch/grindhouse à laquelle il a été exclu bien trop vite, et le désir louable d'imposer sa pierre à l'édifice du divertissement bis à forte tendance Z, l'Avary nouveau, vrai film vintage, personnel et francophile mais faux trip burné tout en autodérision malade, est un effort poussif dont on ne ressort que trop peu de satisfactions (la prestation déglinguée d'un Crispin Glover volontairement over the top, une Nina Dobrev ultra sensuelle en clone d'Uma Thurman dans Pulp Fiction, la scène jouissive du carnage au vernissage) pour vraiment prendre son pied.



À trop vouloir se faire aimer, Lucky Day provoque le rejet par sa lourdeur, son écriture limitée mais surtout son envie de régler des comptes avec un peu tout le monde (Tarantino, l'industrie Hollywoodienne et la justice ricaine en tête), là où il n'aurait dû n'être qu'une bande jouissive et décomplexée, dont on ferait constamment fît des défauts tant qu'on se laisse enivrer par l'ivresse d'une générosité sincère et débordante.


Jonathan Chevrier