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[FUCKING SERIES] : The Handmaid’s Tale saison 3 : Révolte Timide




(Critique - avec spoilers - de la saison 3)


The Handmaid’s Tale se déroule un futur proche, une dystopie dans laquelle les USA sont devenus, suite à un coup d’état, République de Gilead. Cette dictature fonctionne sur un système très strict dans lequel chacun à une place. Il y a les mieux placés, les Commandants, qui dirigent le pays, pendant que les Epouses mènent une vie remplie d’interdits mais oisive. Il y a ensuite les Marthas, qui se chargent de la cuisine et du ménage ainsi que les Servantes, dont le rôle est d’être mères porteuses contre leur grès. Violées chaque mois par le Commandant du foyer dans lequel elles sont assignées, les Servantes sont des poules pondeuses auxquelles on arrache ensuite le bébé pour satisfaire le couple formé par le Commandant et l’Epouse.

Copyright Sophie Giraud/Hulu


June ne portait, dans la saison 2, néanmoins pas l’enfant de son Commandant, Fred Waterford, mais celui de Nick, l’homme à tout faire de la maison. La seule à être au courant du secret était Serena Waterford qui avait compris que l’infertilité de son mari ne comblerait jamais ses instincts maternels. June avait tenté de fuir pour sauver son bébé, avait accouché dans une maison abandonnée, mais avait été rattrapée par le régime et son enfant avait été confiée aux Waterford. Serena ne coulait néanmoins pas de beaux jours avec la petite fille qu’elle avait nommé Nichole : les Commandants jugeaient que l’épouse avait outrepassé les règles du régime. Ils avaient pris la décision de lui couper un doigt. Elle avait alors confié Nichole à June, donnant son accord pour que l’enfant sorte du pays.
La saison 2 se terminait sur Emily, une autre servante rebelle, s’enfuyant avec Nichole, tandis que June, plus déterminée que jamais, choisissait de rester à Gilead pour, on le devinait, récupérer sa fille aînée et s’associer à une forme de résistance. Si la saison 2 avait été jugée décevante par certains, elle restait un bel éventail des thématiques, donnant des réponses aux questions qui faisaient naître le début de la série. Ainsi, la complexité de l’univers prenait le pas sur les péripéties.

Copyright Barbara Nitke/Hulu
 

Dans la saison 3, June est désormais au service du Commandant Lawrence et de son épouse, Eleanor. Cette dernière, souffre d’une grosse dépression et semble reprocher à son mari le rôle qu’il a joué dans la construction de Gilead. Du côté des Waterford, Serena fait face au manque et décide de récupérer Nichole. Le couple traverse une crise. Enfin, Emily tente de se reconstruire au Canada, avec l’aide de Luke et Moira.
Ce bref résumé suffit malheureusement à faire le tour de la troisième saison de The Handmaid’s Tale qui souffre de plusieurs défauts, le premier étant l’écriture de ses personnages. Le Commandant Lawrence, aussi bien interprété soit-il, semble interchangeable, en fonction des besoins du récit. On ne comprend plus vraiment ce qui motive cet homme, ses positions, ses faiblesses ou ses qualités puisque tout évolue selon la situation dans laquelle June se trouve. Le besoin scénaristique est mené à son paroxysme où, pour faire avancer ne serait-ce que d’un chouïa l’histoire, ses protagonistes aussi dit son intérêt, sont sacrifiés. June devient une parodie d’elle-même, faisant sans cesse trembler sa lèvre inférieure sur des gros plans en contre-jour. Emily est vite oubliée, tout comme Nick dont l’apparition éclair permet davantage de se questionner sur son utilité dans le récit que sur les révélations qui y sont faites. 


Copyright Hulu
 

Pour contre-balancer, on note le bon traitement des Waterford, toujours fidèles à eux-mêmes et dont la psychologie reste source de fascination. Fred est toujours faible dans sa volonté de pouvoir et Serena, toujours aussi glaçante, utilise son intelligence pour servir ses désirs, choisissant sans cesse l’égoïsme. La série a réussi, au fil de ses épisodes, à faire de ce couple énigmatique, deux humains aussi intéressants que méprisables. Fred Waterford a perdu toute sa splendeur, en multipliant les erreurs, Serena est devenue prévisible. Ce n’est guère là un défaut, les Waterford apparaissent comme des personnages menés par des volontés fortes mais écrits avec finesses, au trajet toujours passionnant, dont on se délecte. Le segment dédié à Tante Lydia vaut également le détour puisqu'en plus de répondre à des questions présentes depuis le début de The Handmaid's Tale, il utilise à merveille l’ambiguïté qu’entretenait la série dans ses plus beaux moments, rappelant qu’expliquer n’était pas justifier.

Copyright Hulu

La saison 3 de The Handmaid’s Tale ne semble jamais vraiment décoller, sauf le temps d’un ou deux épisodes particulièrement bien réalisés (Denize Gämze Erguven rappelle ainsi qu’elle peut être une réalisatrice particulièrement bonne et juste). Disposant de péripéties très restreintes, la série ne compense pas par un traitement admirable de ses thématiques mais remplit ses épisodes à grands coups de redondances. La fin de cette troisième saison laisse la désagréable sensation d’avoir vu un remake de la saison 2, sauf que le travail sur le temps qui se déroule à Gilead, privant chacun de ses prisonniers d’années de vie, n’est plus aussi fin. Ces affres du temps ne sont pas illustrés par la langueur des personnages mais par des faits plus concrets tels que l’âge des enfants, qui est pourtant vite oublié. La série s’était illustrée, dans le passé, par ses dynamiques sociales si bien écrites qu’un seul dialogue des plus simples entre deux personnages suffisait pour capter l’attention. Dans cette saison, l'étude des rapports sociaux devient bâclée et presque transparente.

Copyright Sophie Giraud/Hulu
 

On peut espérer deux choses face à la question d’une quatrième saison. La première serait tout simplement que le show retrouve la finesse d’écriture qu’il a su avoir dans le passé parce qu’il y a encore beaucoup à raconter sur le triomphe de la liberté. La seconde serait de délaisser, une bonne fois pour toute, June, dont le personnage semble être la cause des faiblesses de la troisième saison. La jeune femme a trouvé, dans la rébellion, une forme de résilience. Son état est stable, son parcours aussi. S’obstiner à lui faire revivre certaines situations ne fonctionne plus. En revanche, The Handmaid’s Tale propose à côté un panel de personnages secondaires fascinants, que ce soit pour leur parcours ou leur simple psychologie. Peut-être que la série devrait également quitter un peu Gilead, c’est du moins ce qui lui a permis quelques très beaux moments lors de la saison 3. Elle gagnerait à se concentrer sérieusement sur l’après, la reconstruction et les divers troubles psychologiques. Pas joyeux certes, mais nécessaire. Comme on aimerait que The Handmaid’s Tale le redevienne un jour. 


Manon Franken 


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