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[FUCKING SERIES] : Big Little Lies saison 2 : L’écume de la violence




(Critique - avec spoilers - de la saison 2)


Développé sous la forme d’une minisérie, Big Little Lies est tout compte fait revenu sur le petit écran américain. Surprenant ? Pas vraiment quand on scrute la liste sans fin des récompenses et les louanges de la presse entourant la — finalement — saison 1 ; on comprend aisément qu’HBO n’a pas hésité longueuement avant d’accorder une suite à sa série qui se paie en plus le luxe de voir Meryl Streep débouler au milieu d’une distribution déjà prestigieux.
Alors forcément cette saison 2 s’est enrobée dans une sorte de disjonction, une curiosité — comment pourrait-il en être autrement avec une Meryl Streep au casting ? Mais surtout une inquiétude. Et si cela fanée la force de la saison 1, peut-on justifier cette nouvelle saison par autre chose que l’étalement des récompenses et une critique dithyrambique ?

 Copyright HBO

On retrouve nos héroïnes quelques mois après le drame de l’épisode final, alors que la rentrée scolaire approche. Celles que tout le monde surnomme désormais les Monterey Five tentent d’avancer avec le poids de cette nuit, une fuite en avant qui va bien vite les rattraper.
Si saison 1 se déployer comme l’étouffement de la violence, le final l’avait exposée dans toute sa laideur, la réduisant a néant ; la saison 2 en scrute les résidus, comme lorsque les vagues se fracassent contre les rochers laissant derrière une écume. Voilà ce qu’il reste de Perry — le mari abusif de Céleste — une écume.
La structure même de la série effectue une délicate, mais significative bascule. Là ou la saison 1 alterner entre présent et futur, la saison 2 oscille entre présent et passé soulignant le paradoxe du passé. Il a beau être révolu il plane, obsède, agrippe. Un état d’esprit dans lequel est plongé le personnage de Céleste — toujours composée par une Nicole Kidman bluffante, qui lutte contre les vagues du souvenir, tiraillement d’un mariage entremêlant en son sein la caresse et les coups de poing. La saison 2 met ainsi en lumière la contamination des êtres. Comment celle-ci infuse en chacun des personnages ayant eu pour orbite Perry, comment celle-ci se propage chez ses enfants.
Une césure se fait au sein du récit entre les jumeaux de Celeste — Max et Josh — et le fils de Jane — Ziggy. Ziggy est le produit pur de la violence, mais éloigné de l’emprise du père il a était protéger de lui. Au contraire, Max/Josh ont étaient contaminer par celle-ci, et elle parvient par instant a prendre le dessus. Dès lors, la menace se fait rampante, Celeste observe cette emprise encore vive de Perry sur ses garçons, elle en mesure le danger tout en étant désemparée face à cela.


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L’effet miroir déformant que l’on retrouve chez les enfants s’entrevoit également entre Celeste et Jane. La mort de ce dernier a « libéré » Jane d’un poids, elle avance avec tout ce que cela comporte de difficulté. Si ses souvenirs ne sont pas tiraillés, elle est abîmée par Perry dans son intimité. Elle doit réapprendre à faire confiance aux hommes tout en ayant des craintes, elle se protège et s’angoisse de laisser quelqu’un d’autre la toucher signe d’une empreinte profonde qu’elle soigne.
Ces résidus de violence se retrouvent également chez Bonnie. Ce meurtre a agi sur elle comme un choc réveillant les traumatismes du passé. Littéralement bouffé de l’intérieur par son mensonge, il a remonté à la surface ces monstrueuses douleurs qu’on ignore, celles qu’on préfère enterrer, enfermer, verrouiller et qui viennent assaillir le présent de Bonnie. Son personnage gagne en ampleur avec cette exploration de son passé qui va peu à peu se dévoiler au spectateur et donner un nouvel éclairage aux événements de la saison précédente.
Pour ce qui est de Renata et Madeline, la violence est beaucoup plus diluée. On l’observe incarnée par le mari de Renata, Gordon. Ce dernier ayant perdu tous leurs argents ils retrouvent fauchés, belle mise en image d’une société patriarcale punissant en permanence les femmes ayant réussie. Dans cette spirale infernale, Renata, somptueusement composée par Laura Dern, incarne une rage sans fard, donnant corps à une femme en colère du regard des autres sur elle et ne s’excusant pas pour cela. 


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Madeline ne subit pas de réelle violence aussi bien physique que morale, mais le personnage de Reese Whiterpshon gagne en profondeur avec la révélation de son adultère a son époux. Cela donne lieu a une autopsie du mariage, poussant Madeline dans ses retranchements, la forçant a s’ouvrir et comprendre qu’elle ne peut pas tout maîtriser. Mais, la partie de son intrigue la plus intéressante se situe dans son amitié avec Celeste. La série offre quelques très belles scènes entre les deux femmes notamment quand Madeline se sent coupable de ne pas avoir vu que son amie était battue par son époux.
Une question reste en suspens, que vaut Meryl Streep ? C’était peut-être la plus grande attente, comment pourrait-il en être autrement avec celle qui accumule les prix les plus prestigieux, enchaînant encore et toujours les plus beaux rôles. Pour son retour à la télévision, après la minisérie Angels In America, Meryl Streep trouve un rôle puissant, troublant, tranchant derrière les lunettes de Mary-Louise. La mère de Perry est l’incarnation vivace de l’esprit de Perry, sous son apparence de femme tendre elle fait preuve d’une violence perfide, puisque c’est son langage qui entaille. Subtilement dosé par une Streep héritant d’un de ses rôles les plus déconcertants, son personnage est pétri de contradiction qui s’éveille lors d’un face à face avec Nicole Kidman raisonnant comme une véritable master class entre deux actrices au sommet.

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Ainsi, en saison 2, Big Little Lies est un cri, puissant, troublant, déstabilisant. La douleur étouffée de la saison 1 est devenue telle une chair écorchée, incisée, nue, qui, exposée nous tort le ventre, broyeur émotionnel ou vient s’immiscer quelques éclats de lumière. Tout cela me permet d’affirmer, et j’en suis le premier surpris, qu’au final une saison 2 de Big Little Lies était une bonne idée.



Thibaut Ciavarella 


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