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[CRITIQUE] : Les Bonnes Manières


Réalisateurs : Juliana Rojas et Marco Dutra
Acteurs : Isabél Zuaa, Marjorie Estiano, Miguel Lobo, Cida Moreira, Andrea Marquee, Felipe Kenji, Nina Medeiros, Neusa Velasco,...
Budget : -
Distribution : Jour2fête
Genre : Fantastique, Drame
Nationalité : Brésilien, Français
Durée : 2h15

Synopsis :
Clara, une infirmière solitaire de la banlieue de São Paulo, est engagée par la riche et mystérieuse Ana comme la nounou de son enfant à naître. Alors que les deux femmes se rapprochent petit à petit, la future mère est prise de crises de somnambulisme...



Critique :


L'expression « à deux c'est mieux » prend tout son sens quand on parle de la réalisatrice Juliana Rojas et de Marco Dutra. Après leur première collaboration sur le film Trabalhar Cansa, présenté au Festival de Cannes 2011 à la section « un certain regard », ils reviennent pour un second film pour nous faire frisonner avec une revisite du mythe du loup-garou.
Ce qui frappe tout d'abord c'est la dualité du film, déchiré entre deux actes totalement différents mais complémentaire. 


 
Le premier acte raconte la rencontre entre Clara, une jeune femme issue de la classe populaire et contrainte d'accepter un travail au dessous de ses aptitudes (pour payer son loyer) et Ana, jeune femme enceinte, qui évolue dans un milieu aisé, mais vit seule. Un rapport employée/employeuse commence entre les deux protagonistes mais très vite une attraction réciproque va réunir les deux femmes. Un jeu de séduction très prenant pour le spectateur. Clara, avec son air froid et distant, Ana, volubile et ouverte. Elles viennent de deux milieux différents, n'ont pas le même caractère mais finissent dans les bras l'une de l'autre. Ana, qui tout d'abord porte sur elle sa richesse, grâce à des vêtements de qualité, par des bijoux en or, du maquillage et ses cheveux longs ondulés se délaissent de ces artifices à mesure qu'elle se rapproche de son employée. 



Une manière de diminuer le fossé social entre elles. Le fantastique et l'horreur va s'immiscer petit à petit dans leur quotidien, à cause des crises de somnambulisme de Ana, qui crée une tension. Cette tension est bien évidemment montrée par l'histoire, mais aussi par la lumière. Le jour et la clarté laisse place aux ombres et à la nuit, distillant un peu plus le fantastique dans l'histoire. À la fin du 1er acte, le spectateur n'est donc pas étonné de la tournure des événements, grâce à la lumière mais aussi aux éléments propre au conte donnés dans une séquence animée.
La seconde moitié prend place sept ans plus tard, avec une rupture de ton assez abrupt. Le film de monstre promis est enfin là, laissant place à la véritable histoire de loup-garou. Mais aussi à de magnifiques scènes émouvantes, surtout la dernière séquence qui donne une raison valable à cette deuxième partie. 



En interviews, les deux réalisateurs avaient donnés comme raison de faire cette scission de donner deux aspects différents de la maternité : celui la grossesse et le fait de devenir mère avant l'accouchement et celui d'éduquer un enfant. Sur le papier, l'idée était bonne, mais pendant le visionnage le film est long. Très long. Dommage car l'aspect prenant du début laisse place à un ennui poli pendant les vingts premières minutes de la seconde partie. Dommage car l'aspect conte perd de sa cohérence. Dommage car les dernières séquences du film sont si belles et émouvantes.
Car malgré ce (gros) défaut, le film reste beau. Une scène magnifique avec Clara qui chante son malheur, éclairée par du violet qui évoque l'horreur qui se passe pendant ce temps. Ou cette poignée de main, un des derniers plans (et également l'affiche du film), montrant l'amour inconditionnelle d'une mère pour son enfant.



Les Bonnes Manières est un mélange intéressant entre drame familial et film de monstre, entre différence sociale et croyance populaire. Et ce qui restera dans nos mémoires c'est l'atmosphère onirique, une scène, un geste. Une merveille pour ceux qui veulent y croire. 

Laura Enjolvy