[FUCKING SÉRIES] : Jour Polaire : Meurtres sous le soleil de minuit
(Critique de la première saison)
Alors que Section Zéro n'a pas forcément marqué les rétines
et que Braquo vient de vider, dans la douleur, son ultime chargeur,
Canal + persiste et signe dans le giron du polar musclé avec sa dernière
production originale en date : Jour Polaire.
Surfant autant sur la vague toujours fringante du " scandi noir " que sur la formule rodée du cop show en terre reculée (deux enquêteurs aux nationalités différentes, forcés à collaborer sur un meurtre impliquant leurs polices), le show cite directement le pitch d'une autre production de la chaîne cryptée : Tunnel.
Surfant autant sur la vague toujours fringante du " scandi noir " que sur la formule rodée du cop show en terre reculée (deux enquêteurs aux nationalités différentes, forcés à collaborer sur un meurtre impliquant leurs polices), le show cite directement le pitch d'une autre production de la chaîne cryptée : Tunnel.
Bonne nouvelle, le clairon bruyant du plagiat ne résonnera
finalement pas plus que cela puisque la série incarne ni plus ni moins
que la nouvelle création du duo nordique Måns Mårling/Bjorn Steirn, les
papas de... Bron/Broen, le hit dano-suédois dont Tunnel est justement, le
remake franco-britannique.
On reste donc en famille, pour ce nouveau voyage au pays
des Vikings, aussi exotique que furieusement sombre et mélancolique,
rythmée par le soleil capricieux et perpétuel du jour polaire.
Ambitieux et assumant totalement la parenté entre ce dernier-né et son glorieux aîné, Mårlind et Stein font de cette coproduction franco-suédoise, un sommet de fiction policière doublé d'un vrai regard acéré sur les sociétés scandinaves; un sublime et fascinant polar noir ou l'obscurité est pourtant constamment écrasé par la lumière.
Ambitieux et assumant totalement la parenté entre ce dernier-né et son glorieux aîné, Mårlind et Stein font de cette coproduction franco-suédoise, un sommet de fiction policière doublé d'un vrai regard acéré sur les sociétés scandinaves; un sublime et fascinant polar noir ou l'obscurité est pourtant constamment écrasé par la lumière.
En prenant ses racines dans la petite ville minière de
Kiruna - véritable personnage à part entière de l'intrigue -, Jour
Polaire suit durant les huit épisodes qui composent sa (première et unique ?)
saison, les mésaventures de la belle - mais burnée - Kahina Zadi, jeune
policière parisienne a l'OCPRV, catapultée en territoire Sami pour
assister un procureur local, Anders Harnesk, dans l'enquête sur le
meurtre peu commun d'un ressortissant français.
Cadre majestueux aussi éblouissant visuellement
qu'étouffant par sa puissance, ou les repères sont littéralement
brouillés et tronqués par un soleil, une lumière aveuglante et
omniprésente; les terres des semi-nomades Sami (d'une richesse
culturelle étonnante) sont sans l'ombre d'un doute ce qui fait le sel -
tout autant que la singularité - de la série.
Presque emprisonnée, piégée entre les griffes d'une nature
sauvage et immense, et un horizon perturbant et indomptable, cette
contrée retirée du cercle polaire se joue des apparences pour mieux
confondre les certitudes d'une héroïne fracturée, dont la vulnérabilité
sera constamment mise à rude épreuve.
Face à une nature trop impressionnante pour l'être humain,
et un monde qu'elle ne comprend pas et dans lequel elle ne se retrouve
pas, la très masculine Kahina, en pure héroïne du " scandi noir " (qui
inverse subtilement les stéréotypes des rôles masculins/féminins), va
devoir se faire violence tout autant que de subir cette même violence
sourde, pour mener à bien son enquête.
Véritable parcours initiatique d'une figure féminine
tourmentée, au passé douloureux et furieusement obsédée par son but,
pointant clairement du doigt les travers d'une société ouverte et
faussement utopique (et le traitement des minorités qui peut s'appliquer à toute l'Europe aujourd'hui); Jour Polaire joue habilement avec les codes du
polar noir pour mieux incarner un brillant thriller tordu et fascinant,
entre la merveilleuse série The Killing et les macabres récits du
talentueux Jean-Christophe Grangé (on pense évidemment aux Rivières
Pourpres).
Tableau d'exception peint avec maîtrise par un duo aussi
habile à la plume que derrière la caméra (Mårlind et Stein ont réalisés
tous les épisodes), magnifié par la composition tout en nuances d'une
Leïla Bekhti littéralement habitée par son rôle (son meilleur à ce
jour); la nouvelle création originale made in Canal est une petite
pépite jouissivement glaciale et addictive, comme on aimerait en
découvrir plus souvent sur la quatrième chaîne.
Un outil parfait pour organiser une session binge-watching
de qualité en ses dernières heures hivernales, de la riche année télé
2016.
Jonathan Chevrier