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[CRITIQUE] : Tel Père, Tel Fils


Réalisateur : Hirokazu Kore-Eda
Acteurs : Masaharu Fukuyama, Machiko Ono, Lily Franky,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Japonais.
Durée : 2h01min.

Synopsis :
Ryoata, un architecte obsédé par la réussite professionnelle, forme avec sa jeune épouse et leur fils de 6 ans une famille idéale. Tous ses repères volent en éclats quand la maternité de l'hôpital où est né leur enfant leur apprend que deux nourrissons ont été échangés à la naissance : le garçon qu’il a élevé n’est pas le sien et leur fils biologique a grandi dans un milieu plus modeste…


 Critique :

Si depuis le sublime Nobody Knows, le metteur en scène nippon Hirokazu Kore-Eda faisait parti des cinéastes asiatiques que je suivais avec un intérêt certain, c'est véritablement avec son avant dernier long en date, le prodigieux I Wish, que celui-ci a réellement su conquérir pour de bon, mon cœur dur - mais fragile également - de cinéphile endurcis.

Narrant la bouleversante histoire de deux frères séparés par le divorce de leurs parents, et qui faisaient tout pour se retrouver, le film s'imposait comme l'une des grosses claques de l'année ciné 2011, mais surtout comme l'un des plus beaux films sur l'enfance depuis très, très longtemps.

S'affirmant, logiquement, comme l'un des seuls metteurs en scènes capable aujourd'hui, de filmer avec grâce, l'insouciance - souvent bafouée et violée par la dureté de la vie - de l'enfance, le voilà qu'il nous revient donc en cette fin d'année riche en belles péloches, avec ce qui est tout simplement son meilleur film, Tel Père, Tel fils, ou l'un des gros films du dernier Festival de Cannes, qui a même tellement séduit le président du Jury, Steven Spielberg himself, qu'il chercherait depuis quelques temps déjà, à en pondre un remake ricain...

Like Father, Like Son, c'est avant tout et surtout, un pitch d'une puissance et d'une authenticité percutante.



Ou l'histoire donc, de la famille Nonomiya, qui a de faux airs de la family idéale, jusqu'à ce que Ryota, le mari, et son épouse Midori, découvre que Keita, leur rejeton de six ans, a été échangé à la naissance avec leur véritable enfant qui lui, a grandi au sein d'un foyer plus modeste.
Dès lors, ils vont réaliser que cette erreur de l'hôpital va aussi bien les bouleverser eux, que l'autre famille...

Sous ses atours de La Vie est Un Long Fleuve Tranquille made in Japan, sans humour féroce ni satire social acéré, mais avec une sincérité et une sensibilité dévastatrice, Tel Père, Tel Fils est un drame épuré et mélancolique sur la pluralité et la complexité du sentiment paternel, comme rarement nous avons eu la chance d'en mirer en salles, avec autant de justesse.

En prenant comme point de départ, le dilemme aussi bien morale qu'affectif qui frappe les deux couples on ne peut plus banale, Kore-Eda installe ses personnages autant que ses spectateurs, dans une position psychologique dérangeante et implacable.

" Qu'est-ce qui est le plus important, les liens du sang ou le temps passé ensemble ? "
" Doit-on échanger de nouveau notre progéniture ou élever un enfant qui n'est pas le sien, pour réellement vivre heureux et non dans la culpabilité ? "
" Qu'est-ce qui fait un bon père, l’éducation ou les " attaches " génétiques ? "




En confrontant les deux pères, diamétralement opposé, sur leur faculté à accepter la dure - mais rassurante pour Ryota au départ - réalité d'avoir en son foyer un enfant qui n'est pas le sien (d'un point de vue biologique), le cinéaste, avec la subtilité et la délicatesse qu'on lui connait, évite soigneusement la théorisation et le pathos de supermarché, pour accoucher d'un drame bourré de vie, sur l'imperfection des sentiments qui peuvent lier un père et son fils.

Car si l'évolution, la naissance de Ryota en père aimant insoupçonné, se fait dans une émotion poignante, la péloche se paye parfois, de jolies envolées gracieuses, notamment quand la caméra du réalisateur - d'une précision chirurgicale - capte au plus près les enfants jouant et s'émerveillant devant des parents pétris d'amour, mais tiraillés par un choix d'une cruauté sans nom.

Jamais juge ni bourreau, et ne prétendant jamais détenir les clés d'une éducation parfaite à donner à ses rejetons, Kore-Eda offre via un script en béton armé, une étude de personnage poignante d'une densité affolante, d'une retenue et d'un tact salvateur, porté par un casting au naturel indécent.

Intime, pudique, beau à en crever et d'une simplicité percutante, Tel Père, Tel Fils fait passer son spectateur durant deux (trop) courtes heures, par tous les sentiments possible, avec une justesse remarquable, prouvant que peu importe les aléas qui sont lot d'une vie, seul l'amour inconditionnel pour sa famille compte réellement.




Une claque bouleversante, magique et pure, mais point étonnante dans le fond, pour qui s'est déjà laissé bercer par la beauté du cinéma du cinéaste nippon.

Difficile de ne pas dire que l'on aimerait bien pouvoir être transpercé avec autant de pureté et d'humanité, chaque semaines dans les salles obscures...


Jonathan Chevrier


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