[CRITIQUE] : Suzanna Andler
Réalisateur : Benoît Jacquot
Acteurs : Charlotte Gainsbourg, Niels Schneider, Nathan Willcocks, Julia Roy,...
Distributeur : Les Films du Losange
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h31min.
Synopsis :
Années 60.
Une villa de vacances, au bord de la mer, hors saison.
Une femme, Suzanna Andler, 40 ans, mariée, mère.
Son jeune amant, le premier, Michel.
La solitude, les doutes, l’envie de liberté, les choix de la vie.
Et l’amour.
Critique :
Après la grosse désillusion (pour être poli) #DernierAmour, Benoît Jacquot corrige un brin le tir avec #SuzannaAndler, portrait théâtral et désenchanté d'une femme esseulée filmé avec pudeur mais sans entrain ni spontanéité. Un drame aussi volubile qu'il est douloureusement figé. pic.twitter.com/6pIPRhG9AC
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) June 2, 2021
On avait laissé Benoit Jacquot sur une grosse désillusion - pour être poli -, Dernier Amour ou la mise en images amorphe (mais à la reconstruction historique élegante) des mémoires de Giacomo Casanova, à la structure aussi plombée par ses allers-retours/flashbacks redondants que par son jeu d'acteurs totalement à côté de la plaque.
Une petite déroute (cela arrive, même aux plus grands) que l'on espérait vite corriger avec son ambitieux Suzanna Adler, adaptation de la pièce de théâtre éponyme d'une Marguerite Duras qu'il a connu personnellement, et qu'il aborde donc avec un supplément d'âme et d'intimité qui ne fait que bonifier une oeuvre méconnue mais essentielle de la célèbre romancière.
Épousant chaque ligne du texte comme s'il était sien à défaut de le rendre pleinement vivant, Jacquot laisse les mots se substituer à sa mise en scène - figée jusqu'au bout de la pellicule - dans ce qui incarne un drame aussi volubile qu'il est douloureusement statique et rigide.
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Errance lancinante, théorique et redondante balayant avec aisance les moindres recoins - ou presque - d'une somptueuse villa (vrai personnage à part entière du métrage) flanquée face à la méditerranée, tout en épurant ses effets au strict jeu de ses comédiens et comédiennes, le récit suit les atermoiements de Suzanna Andler (Charlotte Gainsbourg, captivante), épouse esseulée et constamment sur le fil, dont le quotidien n'est que mensonge et trahison : son mari multiplie les conquêtes, elle travesti sa propre réalité et se refuse à tout divorce, pour ne pas perdre le confort que lui procure ce mariage à sens unique.
Presque sans âge au sein d'une bulle hors du temps, Jacquot capte sa lente acceptation d'un amour dévasté avec pudeur mais sans entrain ni spontanéité (ses longs plans séquences interminables...), persuadé que la force des dialogues de Duras (mais aussi si maestria pour créer des personnages joliment nuancés) autant que l'investissement intense de ses comédiens (surtout de Gainsbourg), se suffisent à eux-mêmes pour happer son auditoire, sans le moindre effet cinématographique.
Mais une vérité de théâtre n'est pas toujours une vérité de cinéma, et ce qui aurait pu être un bel éloge (sans pour autant flirter avec une quelconque réappropriation) autant qu'un beau spleen empathique, s'avère in fine un effort vain sans âme et triste - dans tous les sens du terme.
Jonathan Chevrier