[CRITIQUE] : Mandibules

Réalisateur : Quentin Dupieux
Avec : David Marsais, Grégoire Ludig, Adèle Exarchopoulos, India Hair,...
Distributeur : Memento Films Distribution
Budget : -
Genre : Comédie, Fantastique
Nationalité : Français
Durée : 1h17min

Synopsis :
Jean-Gab et Manu, deux amis simples d’esprit, trouvent une mouche géante coincée dans le coffre d’une voiture et se mettent en tête de la dresser pour gagner de l’argent avec.

Critique :

Avec #Mandibules, Quentin Dupieux creuse un peu plus la place singulière qu’il s’est créée dans le cinéma français, avec un nouveau délire au ton fantaisiste et barré comme personne ne peut le faire, incarné à la perfection par ses interprètes. (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/TbnFkXFRhm
— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) February 6, 2021

Après avoir mis en scène le duo comique Eric et Ramzy dans Steak en 2007, Quentin Dupieux s’intéresse à un nouveau duo français, Grégoire Ludig et David Marsais, qui forment le Palmashow. Mandibules, passé par la Mostra de Venise en septembre dernier, est présenté dans la section Limelight du Festival de Rotterdam édition 2021. Après Le Daim, c’est à la mouche qu’il s’attaque. Une mouche ridiculement énorme, prête à être apprivoisée pour devenir un drone braqueur de banque.

Tout le charme du cinéma de Dupieux se loge dans le ton singulier qu’il donne à des histoires pourtant sérieuses. Les rapports humains, parfois toxiques, l’angoisse de l’existence, la peur de l’autre prennent la forme d’une douce comédie, des films savoureusement absurdes, qui nous régalent à chaque fois. Mandibules ne fait pas exception. Il s’intéresse ici à deux losers, Manu et Jean-Gab, bien décidés à gagner un maximum de pognon grâce à une mouche géante trouvée par hasard dans le coffre d’une voiture volée. Comme deux gamins, ils font des plans sur la comète : pourquoi se fatiguer à travailler, quand Dominique (doux surnom de la mouche) peut leur rapporter de l’argent ? Il suffit juste de la dresser comme un chien volant, qui irait chercher une balle/argent sur demande. Un plan alambiqué, mais tellement simple de leur point de vue. Habitué à la parodie, le duo s’amuse sous les traits de leur personnage, en gardant toujours un ton décalé. Mais le réalisateur insuffle derrière les punchlines et le comique de situation un potentiel beaucoup plus émouvant. L’aspect cartoonesque cache des âmes enfantines, peu préparées au défi de la vie d’adulte.

La force de Mandibules repose sur l’écriture des dialogues, qui sont toujours de grande qualité chez Dupieux. Il joue habilement avec la diction de ses différent‧e‧s acteur‧trice‧s, rendant presque impossible la compréhension des subtilités des blagues à un audimat non-francophone. Les sous-titres ne peuvent malheureusement pas rendre justice à l’entièreté de la saveur comique des dialogues. Parmi la galerie de personnages improbables, Adèle Exarchopoulos tire son épingle du jeu. Avec un rôle à contre-emploi, elle sort de sa zone de confort pour nous livrer une interprétation tout en finesse, alors qu’elle gueule continuellement (ironie, quand tu nous tiens). La comédie lui va bien.

On s'habitue presque à voir une nouveauté de Dupieux chaque année. Mandibules creuse un peu plus la place singulière qu’il s’est créée dans le cinéma français, avec un ton fantaisiste et barré comme personne ne peut le faire.

Laura Enjolvy