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[CRITIQUE] : A Dark, Dark Man


Réalisateur : Adilkhan Yerzhanov
Avec : Daniar Alshinov, Dinara Baktybaeva, Teoman Khos,...
Distributeur : Arizona Distribution
Budget : -
Genre : Policier.
Nationalité : Kazakh, Français.
Durée : 1h50min

Synopsis :
Bekzat est un jeune policier qui connait déjà toutes les ficelles de la corruption des steppes kazakhes. Chargé d’étouffer une nouvelle affaire d’agressions mortelles sur des petits garçons, il est gêné par l’intervention d’une journaliste pugnace et déterminée. Les certitudes du cow-boy des steppes vacillent.



Critique :


A une heure ou il va devenir de plus en plus complexe de se faire une toile pour une bonne partie de la population française, il y a quelque chose d'intimement frustrant à se dire que la proposition actuelle dans les salles obscures, a rarement paru aussi diversifiée et graisante.
Sans doute loin d'être capable d'attirer les spectateurs, si les salles étaient composées d'une pluie de grosses artilleries made in Hollywood, A Dark-Dark Man du réalisateur Adilkhan Yerzhanov, passé par l'Etrange Festival en septembre dernier, nous rappelle joliment au bon souvenir d'un cinéaste engagé, dont on avait découvert la magie rafraîchissante et absurde de son cinéma, au tout début de la dernière décennie (Constructors, The Owners); des expériences à l'approche résolument moderniste, définie par la conscience de soi et l'ironie, qui rompait joliment avec les normes naturalistes du cinéma européen moyen (et qui rappelait instinctivement, la Nouvelle Vague Tchécoslovaque mais aussi la Grecque Weird Wave).
Tel une oeuvre somme ou, tout du moins, plus mature, le film suit les alternoiements psychologiques et existentielles d'un flic corrompu qui, au contact d'une journaliste décidée à déceler la vérité autour d'un meurtre qu'il avait honteusement classé (en trouvant un faux coupable, ce qui semble être la routine locale), change de fusil d'épaule et se confronte à la nature même de ses actions, le conduisant vers une frustration morale qui lui servira de déclic pour faire convenablement son travail.

Copyright Arizona Distribution

Offrant un regard sans concession de son pays, ou la corruption policière (qui pactise sans vergogne avec la mafia) reflète douloureusement le modus operandi de toute une société répressive, dans laquelle la corruption et la passivité semblent soutenir la paix sociale (et grossir la désespérance d'un peuple acculé), A Dark, Dark Man, citant gentiment les brillants Once Upon a Time in Anatolia de Nuri Bilge Ceylan et Memories of Murder de Bong Joon-ho, conserve la touche moderniste de son cinéaste, tout en épousant les contours plus traditionnels du genre, avec une mise en scène méticuleuse et appliquée (rythme lancinant, pas ou peu d'action, plans larges semi-théâtraux, paysages reflétant la beauté et la rugosité des steppes kazakh).
Un mélange des styles glaciale et loin d'être désagréable, même si un peu déroutant - entre réalisme et absurde, avec une touche de romance -, qui font du métrage un solide polar hybride, un western social noir mais profondément nuancé à la fois (et surtout pas dénué d'humour malgré tout), une oeuvre courageuse signée par un cinéaste qui, même avec sept longs-métrages au compteur, semble toujours s'amuser à redéfinir les contours de son propre cinéma.


Jonathan Chevrier


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