[TOUCHE PAS NON PLUS À MES 90ϟs] : #38. Demolition Man
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Nous sommes tous un peu nostalgique de ce que l'on considère, parfois à raison, comme l'une des plus plaisantes époques de l'industrie cinématographique : le cinéma béni des 90's, avec ses petits bijoux, ses séries B burnées et ses savoureux (si...) nanars.
Une époque de tous les possibles où les héros étaient des humains qui ne se balladaient pas tous en collants, qui ne réalisaient pas leurs prouesses à coups d'effets spéciaux et de fonds verts, une époque où les petits studios venaient jouer dans la même cour que les grosses majors légendaires, où les enfants et l'imaginaire avaient leurs mots à dire,...
Bref, les 90's c'était bien, tout comme les 90's, voilà pourquoi on se fait le petit plaisir de créer une section où l'on ne parle QUE de ça et ce, sans la moindre modération.
Alors attachez bien vos ceintures, prenez votre ticket magique, votre spray anti-Dinos et la pillule rouge de Morpheus : on se replonge illico dans les années 90 !
#38. Demolition Man de Marco Brambilla (1993)
À la belle, très belle heure ou la guerre saine - mais pas moins féroce - entre Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger faisait merveilleusement rage dans les salles obscures, il était presque totalement impossible de départager les éternels Rocky et Conan sur le terrain miné de l'actionner bourrin et jouissif.
En revanche, sur celui plus sinueux et moins gratifiant pour les action men, de la comédie, c'est définitivement le chêne autrichien qui l'emporte par K.O. sur l'étalon italien la faute, en grande partie à cause de l'empressement presque absurde qu'il aura eu de vouloir connaître le même succès de son meilleur rival, le faisant se rattacher à des projets souvent à la limite du défendable - pour être poli.
Pourtant, entre Sly et la comédie, c'est un peu une put*** de rendez-vous manqué quant on voit le potentiel comique certain du bonhomme, non pas dans L'Embrouille est dans le sac et Arrête ou ma mère va tirer (absolument pas...), mais bel et bien dans le génial buddy movie Tango & Cash et, surtout, le trip SF Demolition Man de l'inconnu à l'époque - et il l'est resté par la suite également - Marco Brambilla; sorte de cousin germain totalement improbable du chef-d'oeuvre Last Action Hero de John McTiernan, avec qui il partage beaucoup de points communs.
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Deux chantres du cinéma d'action des 80's/90's, ou ses comédiens vedettes - les papes du genre, et c'est plus grands représentants - versaient joyeusement dans l'autodérision et le discours méta fascinant et incisif : John Spartan et Jack Slater y sont montrés comme des héros fatigués, qui commencent à réfléchir sur leur véritable rôle dans la société contemporaine (comme Sly et Schwarzenegger, deux action heros tentant de tirer la sonnette d'alarme et de se renouveller, sentant que trop bien le vent du cinéma d'action tourner à leur désavantage), leur ironie systématique et leur facilité à jouer de leur image, répondant constamment au cynisme des instances dirigeantes (les grosses firmes de la jungle Hollywoodienne).
Deux oeuvres ou les héros sont montrés comme des extraterrestres, ou l'héroïsme a une représentation désabusée et dont la distanciation narrative volontaire - mais plus frontale du côté de chez McT - se pare même d'une dénonciation inhabituelle du politiquement correct et d'une folie visionnaire sur les dérives et les excès de nos modes de civilisation (à travers deux mondes aux antipodes, qui ne conviennent jamais vraiment à l'humanité dans sa généralité).
Not bad pour un actionner bourrin, pas vrai ?
Surtout que dans son entreprise de démolition respectueuse du cinéma d'action, saisissant plus d'un mal de son époque, Demolition Man est avant tout un bon et gros divertissement musclé et cool au possible, qui ne souffre absolument pas des multiples visions au fil du temps.
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Démarrant comme un Rambo urbain ou Sly se la joue superflic - John Spartan - en cherchant à coincer un Wesley Snipes - Simon Phoenix - mi-psychopathe, mi-fashion victime (et jouant du Simon Sayz deux ans avant Jeremy Irons dans Die Hard III), attendant gentiment dans son QG qu'il débarque pour mieux le piéger (il a tué des otages et fait porter le chapeau de leurs morts à Spartan), Demolition Man glisse pourtant peu à peu vers la SF plutôt couillu, faisant des prisons de haute sécurité des cryopénitenciers ou l'on congèle les détenus pendant des décennies, avant de les foutre dehors dans un monde TOTALEMENT différent et foutrement aseptisé, purgé de tous ses excès et littéralement sans âme.
Alors évidemment, quand ils ont la fausse bonne idée de faire ressortir Phoenix plus tôt, tout en lui offrant quelques habilités (connaissance urbaine, physique et technologique,...) gonflant sensiblement les possibilités de sa liberté conditionnelle, c'est le chaos : un diable dans un monde sans violence et ou le crime n'existe plus, " protégé " par des policiers dépassés et incapable de répondre à toute opposition un minimum violente.
Mais face à un déferlement de violence et de folie venues du passé, seul des méthodes policières d'un temps révolu peut s'avérer être efficace, et Spartan sera vite décongelé pour rétablir un ordre qui ne lui correspond même plus, et refroidir pour de bon son " meilleur " ennemi.
" Le flic le plus redoutable du XXIème siècle. Le criminel le plus dangereux du XXIème siècle. Dans le futur, il n'y a pas de place pour les deux. "
Blockbuster pétaradant, satire d'anticipation autant de la société contemporaine que du cinéma d'action, bourré jusqu'à la gueule de punchlines savoureuses et de séquences ayant savamment nourrit depuis la pop culture (le crac-crac boum-boum cérébral, le rat-burger, les trois coquillages,...), furieusement méta et bon enfant, Demolition Man, qui aurait pu être totalement différent (le projet était un temps voulu pour le duo Steven Seagal/JCVD, et Jackie Chan aurait pu être choisi pour être opposé à Stallone), a presque tout du petit miracle sur pellicule méritant bien plus que son statut divertissement friqué et régressif, dans lequel on se replonge avec une nostalgie intacte à l'occasion des nombreuses rediffusions télévisées annuelles.
Un vrai feel good movie burné et fandard, ou un Stallone plus affûté que jamais, y trouvera l'un de ses plus beaux rôles de la décennie, derrière les plus dramatiques Kit Latura - Daylight - et, surtout, Freddy Heflin - Copland.
Jonathan Chevrier