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[CRITIQUE] : Mon Chien Stupide


Réalisateur : Yvan Attal
Acteurs : Yvan Attal, Charlotte Gainsbourg, Pascale Arbillot, Eric Ruf, Sébastien Thiery,...
Distributeur : StudioCanal
Budget : -
Genre : Comédie
Nationalité : Français
Durée : 1h45min

Synopsis :
Henri est en pleine crise de la cinquantaine. Les responsables de ses échecs, de son manque de libido et de son mal de dos ? Sa femme et ses quatre enfants, évidemment ! A l’heure où il fait le bilan critique de sa vie, de toutes les femmes qu’il n’aura plus, des voitures qu’il ne conduira pas, un énorme chien mal élevé et obsédé, décide de s’installer dans la maison, pour son plus grand bonheur mais au grand dam du reste de la famille et surtout de Cécile, sa femme dont l’amour indéfectible commence à se fissurer.



Critique :


Il y a un certain côté voyeur, un côté petit plaisir coupable de voir un film d’Yvan Attal quand il filme sa famille. Charlotte Gainsbourg, sa compagne dans la vie et Ben Attal, son fils. Bien que Mon chien Stupide est une fiction, une adaptation d’un livre du même nom écrit par John Fante, il est difficile de séparer cette histoire de la réalité. Car, que nous raconte le film sinon une critique cynique du couple hétérosexuel dans toute sa splendeur, c’est-à-dire, quand tout tourne autour d’une seule et même personne : le mari. Le personnage de Yvan Attal est en pleine crise de la cinquantaine, en pleine crise existentielle, en pleine crise littéraire, comprenez-le, tout va très mal. Est-ce qu’une seule personne peut éclater une famille, causer des dommages, peut-être irréparables, juste par égoïsme ? Le mot “stupide” du titre fait-il vraiment référence au nom du chien (un bon gros molosse adorable), ou au personnage principal, Henri ? Répondons à ces questions en dessous. 


Il est rare dans un film d’avoir une palette de personnage, tous aussi détestables les uns que les autres. Mon chien Stupide y arrive parfaitement, l’empathie allant directement au chien, qui tombe dans une famille dysfonctionnelle, disons-le, parfaitement désagréable. Mais c’est parfois une façon de sonder les sentiments humains, qui ne sont pas toujours roses et paillettes. Le pire étant qu’ils sont tellement humains, tellement connectés à une réalité, à nos ressentis, que cela devient dérangeant. La famille Mohen est un reflet, biaisé évidemment, car cela reste du cinéma, mais assez fidèle pour qu’on soit parfois gêné de voir nos tares, nos faiblesses à l’écran.
Yvan Attal est Henri, écrivain… raté comme il le dit lui-même en voix-off. Il n’a écrit qu’un seul best-seller, record de vente, prix littéraires, tout le tralala qui annonçaient une belle carrière. Puis, il s’est marié, a eu quatre enfants, s’est installé dans une belle maison près de Biarritz et n’a plus rien écrit de viable. Charlotte Gainsbourg est Cécile, sa femme, qui doit supporter l’humeur maussade de son mari, ainsi que ses quatre enfants, qui leur en font voir de toutes les couleurs. L’un fait faire ses devoirs par sa mère et lui crie dessus quand il a des mauvaises notes à cause d’elle, l’autre est dans un groupuscule terroriste écologique, un autre est un fumeur de shit de haute volée et sort avec une stripteaseuse, et la dernière sort avec un militaire (un homme impossible à apprécier) et n’arrête pas de demander de l’argent. Henri est arrivé à un moment de sa vie où rien de va. Ses enfants lui tapent sur les nerfs, sa femme aussi, il est en panne d’écriture et fait encore le deuil de son chien, tué par le doberman des voisins. Son rêve, vivre seul dans sa grande maison. Comme dit le dicton, il faut parfois se méfier des souhaits, car ils peuvent se réaliser...



Par un soir de tempête, un chien s’installe dans la maison des Mohen, comme une Mary Poppins, et va réaliser le rêve de Henri. Un à un, ses enfants s’en vont. Sa femme aussi, qui prend son envol. Henri se retrouve donc seul. Il arrive enfin à écrire, il est vrai, un livre qu’il nous lit en voix-off. Est-il heureux pour autant ? La réponse est moins ferme. Même si Henri reste le personnage principal, que ce soit uniquement sa voix que l’on entend, montrant ainsi son égocentrisme, Yvan Attal laisse de la place à Charlotte Gainsbourg, où elle montre encore une fois l’étendu de son talent (si on en doutait). Cécile, tout comme son mari, est une intellectuelle, une littéraire, qui a tout sacrifié pour Henri. Son envie de vivre à Paris (car monsieur n’aimait pas la ville). Sa carrière (elle a dû élever leur quatre enfants seule, car monsieur était trop occupé avec son chien et ses railleries). Sa féminité, elle passe son temps à porter des robes difformes. Son rôle de mère, de pilier de famille lui laissent des cicatrices internes. Elle boit, elle prend des antidépresseurs. A l’instar d’un film sorti également ce mois-ci, Chambre 212 de Christophe Honoré, Mon chien Stupide creuse du côté du couple qui dure, du désir qui diminue. Contrairement à lui, il ne le fait pas de manière fantaisiste, mais de manière frontale. Le décompte, qui vient quand un membre de la famille s’en va, tombe comme un couperet. Cependant, le soulagement de la solitude, qui devrait être ressenti, est remplacé par le vide. Un vide angoissant. Ce qui l’aide à écrire un livre, comme s'il lui avait fallu ressentir une vraie souffrance (et non pas une pseudo souffrance de privilégié). 


Yvan Attal signe un film cynique, mordant. Il décortique le couple, critique la famille, surtout le rôle des parents. Il n’est jamais trop tard pour se remettre en question cependant, nous dit-il, et l’amour quelque part, reste.


Laura Enjolvy


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