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[CRITIQUE] : First Love, Le dernier Yakuza


Réalisateur : Takashi Miike
Acteurs : Masataka Kubota, Nao Ohmori, Shôta Sometani,…
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Action, Policier, Drame.
Nationalité : Japonais, Britannique.
Durée : 1h48min.

Synopsis :
Tokyo, la nuit. Leo est un jeune boxeur, il tombe sous le charme de Monica, une call-girl toxicomane mais vierge. La jeune fille est impliquée dans un trafic de drogue. Les tourtereaux vont être poursuivis par un policier corrompu, un yakuza et une femme-assassin envoyée par des groupes chinois.




Critique :


N'ayons pas peur des mots, le vénéré Takashi Miike est sans l'ombre d'une ombre d'un doute, le cinéaste le plus fou, prolifique (la barre des cent films est déjà atteinte...) et extravagant qui est venu bousculé le septième art de ses trente dernières années, tous cinémas et continents confondus.
Un touche-à-tout iconoclaste, qui a tellement aligné les péloches avec une frénésie proprement indécente - Woody Allen peut aller se rhabiller dix fois -, qu'il a sensiblement dû aborder tous les fronts et formats possibles, tant il est aussi à l'aise avec les petites productions bricolées qu'avec les grosses montures produits par les majors.
Un grand bonhomme qui ne semble vivre que pour tourner, et qui on l'espère, ne s'arrêtera pas tout de suite, surtout qu'il n'a pas perdu un iota de son mojo avec son nouveau long en date, First Love qui comme toutes ses meilleures cuvées, baigne dans une ambiance fantastico-onirique sensiblement unique, où tout - et le mot est faible - devient et est possible.



Démarrant comme un polar noir et craspec dans les rues glauques d'un Tokyo des déclassés loin d'être paradisiaque (un cadre habituel du cinéaste), avant de gentiment bifurquer vers la romance cartoonesque et la comédie d'action à l'humour macabre (et au timing parfait), le film est un pur cocktail de tons et de dynamitage des genres, au climax aussi gore qu'il est dantesque.
Articulé autour d'une simple et unique nuit en enfer, suivant la rencontre improbable entre un boxeur prometteur, Leo, qui vient de recevoir un gros K.O par la vie (on lui a diagnostiqué une tumeur au cerveau) et Monica, une callgirl toxicomane, qui vont peu à peu nouer des liens sentimentaux alors qu'une pléthore de personnes franchement dangereuses veulent leur faire la peau (au choix : du flic ripoux, une tueuse des Triades, des yakuzas,...), First Love se veut comme une course-poursuite haletante absolument déjantée, un bon gros bordel foutraque et hallucinant, d'une énergie incroyable.
Comme il n'est jamais aussi brillant que lorsqu'il se lâche totalement (ce qui ne l'empêche pas pour autant d'opérer un véritable exercice de style), Miike laisse à nouveau joyeusement parlé son penchant totalement assumé pour une violence extrême et absurde au coeur d'une intrigue solidement charpenté, ou chaque personnage est une pièce ambivalente et évolutive (les deux héros arrivent tout du long, à vaincre leurs démons, là où les vilains usent constamment du double jeu) d'un tout fuyant en apparence tout sérieux, alors qu'il est d'une rigueur incroyable.



Mieux, Miike laisse même exploser en toile de fond avec une jouissance kamikaze, sa critique pleine de verve et fondamentalement parodique d'un Japon désespéré et désespérant, entre patriotisme exacerbé, xénophobie assumée, modernité castratrice et esprit tradition perdue, non sans offrir une image ridicule d'un crime organisé qu'il n'a jamais vraiment porté dans son coeur.
First Love, c'est une pure nuit de folie sauce Takashi Miike, violente, romantique et punk, mais surtout définitivement mémorable.


Jonathan Chevrier