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[CRITIQUE] : Manta Ray

 

Réalisateur : Phuttiphong Aroonpheng
Acteurs : Wanlop Rungkumjad, Aphisit Hama, Rasmee Wayrana,...
Distributeur : Jour2Fête
Budget : -
Genre : Drame, Romance.
Nationalité : Thaïlandais, Français, Chinois.
Durée : 1h45min.

Synopsis :
Près d’une côte où des réfugiés Rohingyas ont été retrouvés noyés, un jeune pêcheur thaïlandais trouve en pleine forêt un homme blessé et inconscient. Il lui porte secours et le soigne. L’étranger se révèle être muet. Il le nomme Thongchai et lui offre son amitié. Un jour, le pêcheur disparaît mystérieusement. Thongchai va peu à peu prendre sa place...



Critique :



Le sacre d'Apichatpong Weerasethakul il y a 9 ans à Cannes n'a pas seulement rendu ses lettres de noblesse au cinéma thaïlandais mais ouvert la voie à un cinéma expérimental dont Manta Ray est la plus nette expression.


La séquence d'ouverture dépeint ce que sera notre cheminement en tant que spectateur : un homme armé s’enfonce dans la jungle la nuit venue avec pour seule source de lumière une guirlande lumineuse multicolore. D'emblée, l'atmosphère dénote et pas seulement du fait de la narration cryptique de Phuttiphong Aroonpheng : on distingue dans l'apparente quiétude des paysages une souffrance souterraine et dans les bhramari pranayama – vrombissement utilisé dans le yoga pour lutter contre le stress – une tension latente. Il faut accepter de lâcher prise pour progresser dans ce labyrinthe et se laisser hypnotiser par un cinéma résolument sensoriel qui convoque comme Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures avant lui les figures spectrales – et presque même le thème de la réincarnation en un sens – et la puissance de la nature. Moins onirique toutefois et plus engagé, Manta Ray se meut progressivement en une incantation politique dédiée aux Rohingyas incarnés ici par un personnage symboliquement muet et à qui le réalisateur semble vouloir redonner une voix.


Manta Ray se distingue également par sa qualité formelle, déjà plus qu'entraperçue sur The Island Funeral où Phuttiphong Aroonpheng officiait comme directeur de photographie : les séquences réalistes s'entremêlent avec d'autres, fantasmagoriques voire artys qui rappellent à leur manière le travail de Dolan dans Les Amours Imaginaires. Si le charme opère, en particulier grâce au montage prodigieux de Lee Chatametikool (Tropical Malady, Cemetery of Splendour) qui achève de transformer le spectateur en somnambule, la narration elle, opaque et ténue, peine à trouver sa place au milieu des explorations visuelles de Phuttiphong Aroonpheng. La seconde partie, assez convenue, reste qui plus est en surface de la dramaturgie renouvelée entre les personnages. Reste un premier long-métrage sur l'identité et l'altérité formellement très prometteur.


Anaïs

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