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[CRITIQUE] : Marcel et Monsieur Pagnol


Réalisateur : Sylvain Chomet
Acteurs : avec les voix de Laurent Lafitte, Géraldine Pailhas, Thierry Garcia, Elsa Pérusin,...
Budget : -
Distributeur : Wild Bunch Distribution
Genre : Animation, Biopic.
Nationalité : Français, Belge, Luxembourgeois.
Durée : 1h30min

Synopsis :
A l’apogée de sa gloire, Marcel Pagnol reçoit la commande d’une rédactrice en chef d’un grand magazine féminin pour l’écriture d’un feuilleton littéraire, dans lequel il pourra raconter son enfance, sa Provence, ses premières amours... En rédigeant les premiers feuillets, l’enfant qu’il a été autrefois, le petit Marcel, lui apparaît soudain. Ainsi, ses souvenirs ressurgissent au fil des mots : l’arrivée du cinéma parlant, le premier grand studio de cinéma, son attachement aux acteurs, l'expérience de l’écriture. Le plus grand conteur de tous les temps devient alors le héros de sa propre histoire.





Quelques semaines après un été ciné où il était résolument l'une des stars (tout du moins, pour les cinéphiles considérant chaque salve de ressorties comme des rendez-vous immanquables), avec la seconde moitié de la - grosse - rétrospective de son cinéma concoctée par Carlotta Films, feu Marcel Pagnol se voit décerner les honneurs d'un film d'animation à sa propre gloire : Marcel et Monsieur Pagnol, échoué à un talentueux Sylvain Chomet qu'on avait laissé au détour d'une escapade hollywoodienne plus où moins heureuse (une séquence animée pour la grosse cagade Joker : Folie à Deux de Todd Phillips), lui qui n'avait plus dirigé de film d'animation depuis L’illusionniste en 2010.

Copyright Wild Bunch Distribution

Philologiquement à hauteur d'enfant tout autant qu'il s'inscrit, naturellement, dans l'ombre du magnifique Le Petit Nicolas - Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ? du tandem Amandine Fredon/Benjamin Massoubre (sensiblement moins schématique et au classicisme moins affirmé, certes), avec qui il est tout naturellement lié par la voix de Laurent Lafitte; le film se dresse moins comme un biopic stricto sensu que comme un tendre hommage à l'artiste Pagnol, lui qui incarne une ode magico-réaliste (et un brin édulcorée, évidemment) de son existence, dont la narration s'attache à tisser un lien nostalgique entre le passé et le présent (ici le milieu des années 50), au moment charnière où le bonhomme reçoit la commande d’une rédactrice en chef d’un grand magazine féminin pour l’écriture d’un feuilleton littéraire, dans lequel il pourra raconter son enfance.

L'occasion idéale pour Pagnol comme pour Chomet de se plonger dans les souvenirs de son protagoniste titre, guidé par la version enfantine du célèbre conteur qui nous sert tout du long de guide amusé et fougueux venant bousculer une version adulte de lui-même lassé par le monde, qu'elle replonge avec enthousiasme dans la douceur de sa jeunesse aux coeurs des terres montagneuses et ensoleillées de sa chère Provence, bien loin des cafés d'avant-guerre résolument plus gris et tout en solitude de la capitale, qui nourrissent son quotidien.
Une véritable invitation à s'immerger dans les méandres à la fois cotonneux et potentiellement douloureux des souvenirs, ainsi que du processus créatif qu'ils font naître, que Chomet structure comme une conversation passionnée et passionnante entre ce qui a été vécu et ce qui renaît sur une page blanche, tout en questionnant la manière dont chaque artiste façonne sa propre histoire à travers une mémoire qui leur sert autant de refuge que de terreau fertile pour l'invention/la réinvention du monde et de soi.

Copyright Wild Bunch Distribution

D'une douceur et d'une chaleur réconfortante (confortée par une animation énergique et aux traits subtils, sorte de bande dessinée franco-belge vintage aux personnages dont les traits nets et clairs, viennent épouser des cadres aux tons poétiques, presque brossés à l'aquarelle), didactique mais d'une manière qui ne découragera jamais réellement son jeune public, Marcel et Monsieur Pagnol est un vrai petit bout de cinéma enchanteur et fait avec le coeur, un hommage sincère et ludique qui vaut gentiment son coup d'œil curieux et enthousiaste.


Jonathan Chevrier