[CRITIQUE] : Asako I&II
Réalisateur : Ryusuke Hamaguchi
Acteurs : Masahiro Higashide, Erika Karata, Koji Seto, ...
Distributeur : Art House
Budget : -
Genre : Romance, Drame.
Nationalité : Français, Japonais.
Durée : 1h59min
Synopsis :
Lorsque son premier grand amour disparaît du jour au lendemain, Asako est abasourdie et quitte Osaka pour changer de vie. Deux ans plus tard à Tokyo, elle tombe de nouveau amoureuse et s’apprête à se marier... à un homme qui ressemble trait pour trait à son premier amant évanoui.
Critique :
Axé sur la figure du 1er amour,#Asako décrit avec une minutie & une justesse quasi poétiques l'obsession sentimentale,Hamaguchi s'illustrant comme un esthète du temps amoureux dont il prend soin de dépeindre toutes les variations & la complexité des rapports humains (@Nanoushkah) pic.twitter.com/epKqHC0jfi— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 4 janvier 2019
Après Une Affaire de Famille d'Hirokazu Kore-Eda et en attendant le prochain Kurosawa (To the Ends of the Earth), le cinéma nippon n'a pas fini de nous gâter et revient en grande forme avec Asako I&II, une chronique rohmérienne où Ryusuke Hamaguchi approfondit le thème de son second long-métrage (Passion) : l'incertitude amoureuse.
Centré sur la figure du premier amour, Asako I&II décrit avec une minutie et une justesse quasi poétiques l'obsession sentimentale et les mécanismes à l’œuvre dans cet aveuglement. Ryusuke Hamaguchi s'illustre ici comme un esthète du temps amoureux dont il prend soin de dépeindre toutes les variations et – comme précédemment dans Senses – la complexité des rapports humains. L'intérêt réside majoritairement dans cette capacité à sublimer le quotidien – même le chat semble caractérisé – et à y faire surgir, sporadiquement, un onirisme latent. Le questionnement est permanent, notamment du fait de la duplicité de l'acteur principal Masahiro Higashide : Baku et Ryohei sont-ils le fruit d'un songe ? D'un fantasme ? A moins que ce ne soit le réel qui surgisse dans un rêve – à ce titre, la scène du théâtre est totalement déconcertante. L'ombre de Fukushima plane sans arrêt sur cette œuvre ; le premier amour lui-même s'incarne comme un spectre qui hante l'héroïne et n'est pas sans rappeler le cinéma de Kiyoshi Kurosawa dont il a été l'élève.
Le recours aux ellipses, finement agencées par le montage, renforce également ce sentiment de flottement chimérique. Cette adaptation d'un roman de Tomoka Shibasaki ne fait qui plus est qu'effleurer ses personnages comme Burning avant elle – qui déconstruisait d'ailleurs aussi le réel avec brio. Hamaguchi n'est jamais dans la peinture exhaustive de caractères mais dans l'ébauche évasive et pourtant universelle de tempéraments. Asako I&II est donc aussi et surtout – comme son nom l'indique – un portrait de femme en deux actes. Celui d'une femme foudroyée par la passion amoureuse dont elle conservera l'empreinte immature et alimentera la fantasmagorie jusqu'à plus soif. Puis celui d'une femme, rongée par la douleur, qui apprendra au terme d'un subtil récit initiatique à distinguer les faux-semblants d'un amour véritable. Une déconstruction hyperréaliste de la fascination amoureuse, elle-même souvent fruit d'une idéalisation et avec laquelle Ryusuke Hamaguchi confirme son statut de réalisateur à suivre de très (très) près dans les prochaines années.
Anaïs