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[CRITIQUE] : N.W.A. - Straight Outta Compton


Réalisateur : F. Gary Gray
Acteurs : O'Shea Jackson, Jason Mitchell, Corey Hawkins, Neil Brown Jr, Aldis Hodge, Paul Giamatti,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : 28 000 000 $
Genre :  Biopic, Drame Musical.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h27min.

Synopsis :
En 1987, cinq jeunes hommes exprimaient leur frustration et leur colère pour dénoncer les conditions de vie de l'endroit le plus dangereux de l’Amérique avec l'arme la plus puissante qu'ils possédaient : leur musique. Voici la véritable histoire de ces rebelles, armés uniquement de leur parole, de leur démarche assurée et de leur talent brut, qui ont résisté aux autorités qui les opprimaient. Ils ont ainsi formé le groupe de rappeur des N.W.A. en dénonçant la réalité de leur quartier. Leur voix a alors déclenché une révolution sociale qui résonne encore aujourd'hui.


Critique :



L'an dernier à la même époque, Universal balançait dans nos salles obscures le génial Get on Up, biopic énergique du roi de la soul James Brown signé Tate Taylor, et ressuscité à l'écran par l'exceptionnel Chadwick Boseman.

Cette année, et après avoir littéralement dominé un box-office mondial totalement voué à sa cause (Fast and Furious 7, Jurassic World et Les Minions ont dépassés le milliard de recettes), la major remet le couvert avec un biopic musical tout aussi ambitieux, celui du groupe culte de la scène rap US, N.W.A., fondé par les légendes Ice Cube, Easy E et Dr Dre.


Mis en scène par le solide F. Gary Gray et chaperonné par Cube, Dre et Tomica Woods-Wright (veuve d'Eazy E), Straight Outta Compton qui s'intéresse aux années fastes du groupe, débarque en France précédé d'un réputation des plus improbables tant le film a su autant séduire les critiques que le public en salles, incarnant l'un des plus gros succès du box office US cet été.

Si sur le papier, le métrage semblait être destiné à un auditoire de connaisseurs et de fans de rap, il s'inscrit finalement, plus encore que le pourtant très bon 8 Mile, comme un must-see implacable, un biopic fort et fédérateur comme rarement on en aura vu sur grand écran ses dernières années.
Bref, purement et simplement une claque qui mérite amplement le succès qu'elle rencontre depuis près d'un mois maintenant.

Pour les non-initiés, N.W.A. a été fondé par en 1987 par cinq jeunes hommes comme outil pour exprimer leur frustration, leur colère et ainsi dénoncer les conditions de vie de l’endroit le plus dangereux de l’Amérique, Compton, avec l’arme la plus puissante qu’ils possédaient : leur musique.
Le groupe se compose d'Eazy-E, leader et rappeur, un ancien dealer fondateur du label Ruthless Records (financé avec l'argent de la drogue), Dr Dre qui a les casquettes producteur et concepteur musical - épaulé par Dj Yella -, et également de MC Ren et Ice Cube, paroliers et rappeurs.


L'explosion, le groupe l'a connaitra avec la sortie en 88 du monument Straight Outta Compton, un album coup de poing qui balancera à la face de l'américaine puritaine et Reaganienne, par la force de tubes bouillants (Straight Outta Compton, Fuck Tha Police, Express Yourself) la cruelle réalité de la rue.

Une référence ultime qui défraya la chronique avant d'incarner le pilier fondateur et solide du rap outre-Atlantique (voir même mondial).
Avec son N.W.A. - Straight Outta Compton, F. Gary Gray s'inspire de ce parcours incroyable pour signé une fresque épique et puissante menée tambour battant et à l'énergie tout aussi crue et violente que les hits chantés par le groupe.

Brutal (et ce dès l'ouverture), enthousiasmant, musclé et poignant à la fois, le film se fixe sur le rise and fall passionnant des trois membres les plus influents du groupe, Dre, Cube et Eazy-E (MC Ren et Dj Yella sont clairement au second plan), et livre un témoignage vibrant et intelligent sur une bande de gosses à la détermination sans borne, une jeunesse issue des ghettos défavorisés et victime de la haine sociale et raciale qui va user de son talent inné pour gouter à une part d'un American Dream qui leur est refusé depuis leur naissance.


Furieux, douloureux, spectaculaire, d'une reconstitution réaliste et d'une densité incroyable, ce biopic résonne aussi bien comme une ode à l'amitié, qu'une critique acerbe du show business (et le milieu pourri du rap système, ou les coups bas sont légion) ou même un regard sans concession sur la violence qui gangrène l'Amérique (on cite le passage à tabac de Rodney King et des émeutes de Watts) et dont les stigmates de l'époque ne sont toujours pas cicatrisées aujourd'hui.

Alors évidemment, pression des producteurs stars oblige (il ne faut pas oublier qu'il est également une œuvre de studio), le film édulcore pas mal le destin de ses héros (bye-bye la drogue qui finance le groupe ou encore les relations houleuses des rappeurs avec la gente féminine), plonge maladroitement tête la première dans le politiquement correct - pour mieux ratisser un large public - et rend même un peu facile le processus créatif du groupe.

Il n'empêche que ses défauts remarqués n’entachent pourtant en rien la vision d'une péloche à la qualité indéniable, qui se met en tête de constamment voguer vers l'essentiel non sans une certaine réussite.


Transcendé par une mise en scène imposante (F. Gary Gray signe ici son meilleur long métrage avec Le Négociateur), un casting attachant totalement impliqué (le charismatique O’Shea Jackson, fils de Ice Cube à la ressemblance frappante et Jason " Eazy-E " Mitchell en tête) et une bande originale aux petits oignons - avec des ajouts inédits tirés du tout récent Compton de Dre -; Straight Outta Compton joue habilement avec les émotions pour incarner sur un petit peu moins de deux heures trente, un grand huit sensorielle captivant qui défie les frontières limitées du biopic musical pour incarner une passionnante fresque iconique et rageuse dont on ressort surpris et conquis.

Un gros cran au-dessus du 8 Mile de Curtis Hanson, ce futur film culte trouvera décemment sa place dans notre DVDthèque du bon gout aux côtés des incontournables Menace 2 Society des frangins Hughes, Boyz in The Hood (déjà avec Cube) de John Singleton ou encore New Jack City de Mario Van Peebles.


Jonathan Chevrier