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[CRITIQUE] : Prisoners


Réalisateur : Denis Villeneuve
Acteurs : Hugh Jackman, Jake Gyllenhaal, Maria Bello, Terrence Howard, Viola Davis, Paul Dano,...
Distributeur : SND
Budget : 46 000 000 $
Genre :  Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h33min.

Synopsis :
Dans la banlieue de Boston, deux fillettes de 6 ans, Anna et Joy, ont disparu. Le détective Loki privilégie la thèse du kidnapping suite au témoignage de Keller, le père d’Anna. Le suspect numéro 1 est rapidement arrêté mais est relâché quelques jours plus tard faute de preuve, entrainant la fureur de Keller. Aveuglé par sa douleur, le père dévasté se lance alors dans une course contre la montre pour retrouver les enfants disparus. De son côté, Loki essaie de trouver des indices pour arrêter le coupable avant que Keller ne commette l’irréparable… Les jours passent et les chances de retrouver les fillettes s’amenuisent…
 

Critique :

Les films d'enlèvements sont monnaie courante à Hollywood, du coup, il nous était assez difficile de comprendre pourquoi le script de ce Prisoners signé Aaron Guzikowski, trustait tout en haut de la blacklist Hollywoodienne de l'année 2009, mais surtout pourquoi pléthore de talents ont cherchés à y être associés.

Un temps promis au duo Leo Di Caprio/Bryan Singer, puis au cinéaste Antoine Fuqua avec en vedette Mark Wahlberg et Christian Bale, le projet atterrira finalement dans les mains de l'excellent réalisateur québecois Denis Villeneuve, avec Hugh Jackman et Jack Gyllenhaal dans les rôles-titres.

On ne perd pas au change donc, surtout que le Villeneuve, loin d'être manchot question thriller, trouve ici matière parfaite pour développer sa fascination pour la violence et les héros confrontés à leur culpabilité, déjà bien présent dans son sublime Incendies.

Sous influences, louchant judicieusement sur le Zodiac de Fincher - pour sa lenteur clinique et sa noirceur de ton éprouvante -, ainsi que sur le Mystic River de Clint Eastwood (qui narre également l'itinéraire puissant d'une justice individuelle face à un enlèvement), Prisoners est un excellent polar dramatique, un thriller à tiroirs maitrisé, alignant les intrigues et les fausses pistes comme on aligne les perles d'un pendentif certes peu original, mais joliment efficace.


D'une tension extrême constante, le film dissèque avec une précision redoutable la douleur profonde qui dévore de l'intérieur ses familles frappées par le lourd poids de la tragédie.
Chacun passera de la colère au déni, de l'acceptation à la dépression, voir même à la culpabilité pour Keller Dover, mari pas si parfait et impuissant, qui décidera de se faire justice lui-même.

Intense même si il refuse tout effet spectaculaire, à la fois intime et réaliste mais surtout très critique envers une certaine vision de l'Amérique profonde et faussement puritaine, Prisoners pouvait frôler la perfection si son étirement un peu à l'extrême ne venait pas légèrement plomber son appréciation finale.

En effet, flirtant lourdement avec les deux heures trente, la péloche est un poil trop longue et aurait bien mérité qu'on lui taille une petite demie heure de gras superflu.
Dommage donc, car même dans l'état, le film reste assez fluide et ce, grâce à une mise en scène dépouillée et travaillée, jouant autant des hors-champs que de la photographie exceptionnelle de Roger Deakins.

Mais plus qu'une histoire fouillée et un traitement des personnages profond et remarquable, si la péloche imprime autant la rétine de ses spectateurs, c'est avant tout grâce aux performances habitées d'un casting de stars confirmés, en tout point exceptionnel.


D'un Paul Dano fabuleux en suspect fou et fragile, à une Maria Bello bouleversante (mais un peu trop lacrymale), sans oublier le couple Terrence Howard/Viola Davis d'une sobriété remarquable, tous gravitent avec justesse autour du duo magistrale Hugh Jackman/Jack Gyllenhaal.

Le premier est ébouriffant en père désabusé et adepte de la loi du Talion, tandis que le second, tout en intériorité, est brillant en flic aussi compétant qu'impulsif.

Haletant et d'une noirceur assez rare dans le paysage du septième art actuel, Prisoners est un thriller douloureux et épuisant (dans le bon sens du terme) au thème résonnant cruellement avec l'actualité.

Destructeur mais nécessaire, ce premier film en terre américaine de Denis Villeneuve (son Enemy, tout aussi alléchant et toujours avec Gyllenhaal en vedette, se fait toujours attendre) est d'une réussite indéniable.


Jackman y joue certainement l'un de ses - si ce n'est LE - plus beaux rôles de sa carrière.

Sean Penn avait eu l'oscar du meilleur acteur pour un rôle sensiblement similaire dans Mystic River.

Que cela donne de bonnes idées à l'académie pour les nominations de cette année...


Jonathan Chevrier

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