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[CRITIQUE] : Mamà


Réalisateur : Andres Muschietti
Acteurs : Jessica Chastain, Nikolaj Coster-Waldau, Megan Charpentier, Isabelle Nelisse, Daniel Kash,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : 15 000 000 €
Genre : Epouvante-Horreur .
Nationalité : Espagnol et Canadien.
Durée : 1h40min.

Synopsis : Il y a cinq ans, deux sœurs, Victoria et Lily, ont mystérieusement disparu, le jour où leurs parents ont été tués. Depuis, leur oncle Lucas et sa petite amie Annabel les recherchent désespérément. Tandis que les petites filles sont retrouvées dans une cabane délabrée et partent habiter chez Lucas, Annabel tente de leur réapprendre à mener une vie normale. Mais elle est de plus en plus convaincue que les deux sœurs sont suivies par une présence maléfique…


 Critique :

On peut affirmer sans sourciller que si l'horreur hispanique est devenu la référence number one dans le cinéma de genre depuis le milieu des années 2000, c'est en grande partie grâce à la patte génial de l'immense Guillermo Del Toro, que ce soit en tant que cinéaste talentueux ou producteur avisé.

Toujours dans l'idée de déniché les nouvelles perles de l'industrie de demain, le voilà qu'il nous présente aujourd'hui l'argentin Andres Muschietti et son Mamà donc, premier long du bonhomme adapté d'un de ses propres courts métrages.
Précédé d'un joli buzz grâce aux pluies de récompenses qu'il a su glaner au fil des derniers mois (dont trois au Festival de Gerardmer), du patronage du Del Toro ainsi que d'un casting vedette composé de deux des vedettes les plus en vues du moment, Jessica Chastain sur grand écran, et Nikolaj " Game of Thrones " Coster-Waldau (récemment vu également dans le thriller SF Oblivion) sur le petit, Mamà avait donc tout pour attirer les cinéphiles en masse dans les salles, entre deux séances de la grosse sortie de la semaine, Gatsby le Magnifique.

Après vision, force est d'admettre que le Muschietti, entre une ambition de ratisser large public et une atmosphère froide et inquiétante, réussi le pari osé et culotté de monter en long un court ne dépassant même pas les trois minutes, en captivant l'audience via un conte poétique aussi gothique qu'émouvant, qui cerise sur le gâteau, fout habillement la trouille sans user du moindre effet gore ni même du moindre jump scare foireux.


S'appuyant sur une trame simpliste, soit l’histoire d’une famille qui bascule dans l’horreur par le biais de jeunes enfants (deux filles en l'occurrence), tout en s'évertuant à ne pas loucher sur le schéma du cadre familiale classique, Muschietti puise toute la puissance de son œuvre dans la dualité protectrice entre une jeune femme qui n'est pas prête et qui ne désire pas (de prime abord) être mère mais qui voit éclore peu à peu sa fibre maternelle, et une entité fantomatique qui a prit les jeunes filles sous son aile après le massacre perpétré par leur père, qui périra d'ailleurs sous le joug de la justicière.

Une figure pas très conventionnelle et inexpérimentée qui fera face tout du long à un spectre à l'instinct maternelle sur-développée, deux êtres qui débordent de passion et d'attention pour des enfants qui ne sont pourtant pas les leurs.

Plus qu'un simple film de fantômes, de tragédie familiale ou de mioches perturbées que l'on tente de ré-insérer dans un cadre de vie " normale ", Mamà c'est avant tout la mise en image aussi réaliste que sensible du sentiment maternelle sous toutes ses formes, l'histoire de mères de substitutions capable de tout par amour, même du sacrifice le plus douloureux qui soit, comme imposé par le climax d'une beauté et d'un macabre littéralement bouleversant.


Tout aussi proche de l'épouvante fantastico-gothique hispanique que de la froideur des films de fantômes asiatiques, la bande contourne les genres qu'elles épousent harmonieusement pour en revenir au vrai fondement de la peur qui sommeille en chacun de nous (la solitude, le sentiment d'abandon), la pimentant via une mise en scène d'une intelligente sobriété, articulé sur une frayeur aussi visible qu'invisible.

Visible, via diverses apparitions fantomatiques pour la plupart inattendues et réussites (le spectre de Mamà est tout simplement sublime) mais également une atmosphère baroque envoutante, magnifiée notamment dans les scènes de flashbacks.
Invisible, grâce à un travail exceptionnel sur le son qui accompagne magistralement le métrage, et à toutes ses petites choses que le metteur en scène nous fait ressentir sans rien ou presque, nous montrer.


Si parfois son film souffre de quelques faiblesses (le rythme n'est pas toujours soutenu, le ton est parfois un peu trop explicatif, certains rebondissements sont faciles voir téléphonés, comme le retour de nulle part de l'oncle dans le dernier acte...), Muschietti redressera souvent la barre et enfoncera véritablement le clou, outre via son bagage technique virtuose, dans sa caractérisation originale et redoutable de ses personnages, campés par des acteurs d'une justesse effarante.

Alors certes les deux petites Mélissa Nélisse et Megan Charpentier sont d'un naturel impressionnant pour leur jeune âge, et Nikolaj Coster-Waldau fait admirablement bien le job en oncle aimant, mais comment ne pas tomber follement amoureux du jeu frisant la perfection d'une Jessica Chastain décidément capable de tout jouer, et ce même sans sa jolie crinière rousse (qui il faut l'avouer, manque pas mal à son séduisant minois).

Portant le métrage sur ses larges épaules comme elle en avait déjà fait de même il y a quelques mois avec un Zero Dark Thirty complétement voué à sa cause, la belle est aussi crédible que touchante dans la peau d'une mère qui ne voulait pas le devenir, mais qui ne pourrait plus vivre sans l'être.


Remplies d'idées aussi ingénieuses que solides (difficile, notamment, de ne pas mentionner l'efficacité superbe du prologue), citant tout autant les sublimes L'Echine du Diable et Le Labyrinthe de Pan (de papa Del Toro) que le Dark Water de Nakata (l'original, pitié par le remake américain...), sans pour autant atteindre leur aura de perfection et leur impact incroyable sur la rétine de tout cinéphile même difficilement influençable, Mamà reste purement et simplement un putain de divertissement d'épouvante, l'une des claques fantastiques les plus imposantes de ces dernières années avec Morse, ou les deux vrais derniers grands vainqueurs mérités de Gerardmer.

Lyrique, poignant, angoissant, mature, novateur, les qualificatifs ne manquent pas pour qualifier la qualité étonnante et éblouissante qui émane de ce premier long d'Andres Muschietti, qui comme Juan Antonio Bayona il y a quelques temps avec son Orphelinat (également produit par Del Toro, again), est promis à un joli avenir dans l'industrie Hollywoodienne.

Parce que se poser là comme ça avec une œuvre référence dans un genre plus qu'exigeant dès son premier film, il n'y en a vraiment pas beaucoup qui peuvent se targuer d'être dans son cas aujourd'hui...


Jonathan Chevrier


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