[CRITIQUE] : Eden
Réalisateur : Ron Howard
Acteurs : Jude Law, Vanessa Kirby, Daniel Brühl, Sydney Sweeney, Ana de Armas,...
Distributeur : Amazon Prime Vidéo France
Budget : -
Genre : Policier, Thriller.
Nationalité : Américain, Canadien.
Durée : 2h09min.
Synopsis :
Un groupe d'individus tournent le dos à la société actuelle. Animés d'un profond désir de changement, ils laissent tout derrière eux et misent leur avenir sur le plus improbable des endroits : le rude paysage des Galápagos..
Que le dernier effort en date d'un Ron Howard plus réellement en odeur de sainteté dans la sphère cinéphile (la véritable question reste de savoir s'il l'a réellement été, au-delà d'un Rush qui ne pouvait mettre que tout le monde d'accord), débarque directement - et sans aucun bruit, on a l'habitude avec la plateforme - dans le catalogue limité de Prime Vidéo au milieu des dernières tataneries (pas toujours défendables) de Liam Neeson et Jason Statham, et ne soit pas invité à faire sa petite carrière dans les salles obscures, donnait une indication plus où moins précise de la qualité du dit bébé, qui s'était déjà gentiment planté sur ses propres terres.
Monumentale erreur (peut-être pas à ce point-là, mais laissez-nous jouer un poil la carte drama queen), tant son Eden vient sensiblement tromper les craintes de sa distribution timide comme de sa production difficile, en incarnant une sorte de survival dramatico-historico-satirique méchamment ludique et mordante, qui n'a jamais réellement peur de ses exagérations contrôlées comme de ses élans kitsch (très) affirmés - une denrée rare chez le papa de Willow.
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| Copyright LEONINE |
Inspiré d'une manière plus ou moins lointaine, de l'histoire vraie d'une poignée d'Européens s'étant installés dans les années 1930, sur l'île Floreana de l'archipel des Galápagos (dont la réalité des événements n'ont toujours pas été élucidés), la narration - qui peine un brin au démarrage, certes - suit la lente et progressive déliquescence d'un paradis supposé, vraie/fausse utopie qui reproduit amèrement tous les travers d'une civilisation de laquelle elle cherchait à se distancer (structures bourgeoises, fantasmes autoritaires,...), et dont l'écriture intelligente pointe sans détour mais avec subtilité l'incorrigibilité d'une nature humaine vouée à s'auto-détruire sous le joug de sa vanité, de ses pulsions et de ses absurdes jeux de pouvoir.
Alors certes, si sa mise en scène peine un brin à se mettre au diapason dans son cahos de décadence et de mort (même si une scène d'accouchement particulièrement tendue - pauvre Sydney Sweeney - vaut son pesant de pop-corn), quand bien même elle reste résolument efficace (à l'image du score ronronnant d'Hans Zimmer), c'est bien à travers sa direction d'acteurs/actrices que Ron Howard marque joliment le coup, offrant à Jude Law (brillant en visionnaire charismatique et égocentrique édenté, dont les délires de supériorité le mèneront totalement à sa perte), Sydney Sweeney (parfaite en épouse réservée et résiliente) et Ana de Armas (femme fatale à la théâtralité diabolique, dont l'interprétation tout en excentricités folles l'a rend toute aussi irritante que profondément magnétique), quelques-unes de leurs meilleures partitions de récentes mémoires.
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| Copyright LEONINE |
Itinéraire vicieux et grotesque (voire même un poil subversif) d'une lutte pour la survie d'un paradis empoisonné par ses propres artisans, Eden se fait une séance surprenante, tout autant kitsch et noire qu'elle est d'une amertume tenace (même si elle souffre, peut-être, d'une trop grande multiplicité de personnages tant certains ont très peu de grain à moudre), où un Ron Howard jusqu'ici perdu semble s'éclater comme un gamin.
On n'en attendait pas tant du bonhomme.
Jonathan Chevrier



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