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[CRITIQUE] : Ciudad sin sueño


Réalisateur : Guillermo Galoe
Acteurs : Fernández Gabarre, Bilal Sedraoui, Fernández SilvaLuis Bertolo,...
Distributeur : Pan Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Espagnol, Français.
Durée : 1h37min.

Synopsis :
Toni, un garçon Rom de 15 ans, vit dans le plus grand bidonville illégal d'Europe, en périphérie de Madrid. Fier d'appartenir à sa famille de ferrailleurs, il suit son grand-père partout. Mais à mesure que leur terrain devient la proie des démolisseurs, la famille se divise : lorsque certains choisissent de partir en ville, son grand-père, lui, refuse de quitter leurs terres. Au fil des nuits, Toni doit faire un choix : s’élancer vers un avenir incertain ou s'accrocher au monde de son enfance.





Il y a une urgence puissante, dévastatrice qui émane de tous les pores du premier long-métrage du wannabe cinéaste espagnol Guillermo Galoe, Ciudad sin sueño, énième preuve si besoin était, d'une production hibérique résolument en pleine forme.
Une urgence, une pression à l'image même de celle d'un faiseur de rêves tentant de capturer les derniers souffles d'un monde en ruines et voué à la disparition : celui de La Cañada Real, à la périphérie de la capitale Madrid, considéré comme le plus grand bidonville d'Europe et en voie de démantèlement; cité crépusculaire où vivent plusieurs milliers de personnes dans la précarité la plus totale, mais qui restent pourtant fermement accrochés à ce qu'ils ont toujours considérés comme chez eux.

Une " ciudad sin sueño ", comme l'annonce si bien le titre, pero sobre todo sin futuro.

Copyright BTEAM PRODS

Une urgence puissante puisque brutale, immédiate et tout aussi spontanée que l'émotion authentique qui la sous-tend, clouée que la caméra est aux basques de Toni, quinze ans au compteur mais un art de la débrouille déjà plus développé que la moyenne, fier rejeton d'une famille de ferrailleurs dont la division générationnelle est totalement liée à l'existence même, mourante, de leur habitat croulant sous les démolitions comme les contrôles de polices incessants : ses parents décident de partir vivre en ville en acceptant une offre des services sociaux (pour vivre dans un HLM, symbole glacial et impersonnel d'une précarité cette fois-ci urbaine), là où son grand-père, qu'il a toujours suivi comme son ombre, ne peut se résoudre à plier bagages pour une capitale où il perdra le peu de sentiment de liberté qui lui reste.

C'est son dilemme, littéralement à la croisée des chemins entre se lancer dans le grand bain d'un avenir/âge adulte incertain (mais qui a le mérite de pouvoir exister, plus que dans son présent), où rester encore un peu accroché, connecté à son enfance comme à un lieu auquel il est instinctivement relié, aussi baigné soit-il pourtant d'un quotidien furieusement hostile et anxiogène, dont la lente destruction ne fait qu'empiéter sur son propre désir de vivre malgré toute la dureté que le monde lui cheville au corps.
Corps sur lesquels Galoe fixe avec délicatesse sa caméra, pensant les mouvements et les gestes comme la communication la plus libre de ses personnages, plus que les mots, à l'image de son jeune protagoniste qui communique tout son malaise par son déballage d'énergie comme ses silences.

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Songe à la fois réaliste et irréaliste lorsqu'il s'attache fugacement à l'innocence de l'enfance, savamment dénué de tout misérabilisme - tout comme de tout élan sordide - putassier (il ne cherche pas à capturer, surligner les blessures d'un univers bouffé par la précarité et la misère - voire même la drogue -, mais bien le bouleversement profondément humain et empathique d'un gamin obligé de laisser derrière lui tout ce qu'il a connu, pour embrasser l'inconnu), Ciudad sin sueño est de ces petites découvertes envoûtantes que l'on ne voit pas forcément venir au coeur d'une distribution de plus en plus chargée, mais qui est instinctivement appelée à durablement marquer nos rétines.

Pas un petit premier effort donc, et le mot est faible.


Jonathan Chevrier