[CRITIQUE] : Miroirs No.3
Acteurs : Paula Beer, Barbara Auer, Matthias Brandt, Enno Trebs,...
Distributeur : Les Films du Losange
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Allemand.
Durée : 1h26min.
Synopsis :
Ce film est présenté à la Quinzaine des Cinéastes au Festival de Cannes 2025.
Lors d'un week-end à la campagne, Laura, étudiante à Berlin, survit miraculeusement à un accident de voiture. Physiquement épargnée mais profondément secouée, elle est recueillie chez Betty, qui a été témoin de l'accident et s’occupe d’elle avec affection. Peu à peu, le mari et le fils de Betty surmontent leur réticence, et une quiétude quasi familiale s’installe. Mais bientôt, ils ne peuvent plus ignorer leur passé, et Laura doit affronter sa propre vie.
Si l'on connaît la capacité, presque une signature à part entière, de l'orfèvre allemand Christian Petzold à faire beaucoup avec très peu, le minimalisme dépouillé de son cinéma à la fois lyrique et formidablement humaniste, prend cette fois des contours particulièrement exceptionnel avec son dernier effort en date (une maison de campagne comme décor principal, quelques comédiens/comédiennes et la maestria de sa plume), Miroirs No.3, toujours embaumé par la présence lumineuse et magnétique d'une Paula Beer qui n'a jamais paru aussi imposante que devant sa caméra (et qui s'inscrit dans la parfaite continuité de sa prestation dans Le Ciel Rouge).
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Elle est le phare à la fois malheureux et vacillant, de ce nouveau drame un brin étrange (quelques accents Lynchiens qui vont au-delà de la simple anecdote) et pétri de délicatesse (pas exempt d'ailleurs de quelques échos à ses précédents efforts, Yella en tête), attaché sur une petite galerie de figures brisées par la vie, des naufragés durement frappés par les vagues de la destinée, mais dont la tragédie et l'inéluctabilité ne viennent jamais supplanter la possibilité comme l'espoir de pouvoir aller de l'avant.
La narration suit les aternoiements de la jeune Laura, étudiante à Berlin impliquée dans un accident de voiture avec son petit ami sur une route de campagne : si lui meurt sur le coup, et elle n'en garde qu'une égratignure et décide de rester auprès de celle qui l'a trouvée et recueillie, Betty, comme pour vaincre la confusion qui l'habite et se retrouver.
Une situation qui est loin de déplaire à la mère endeuillé, au point que les deux femmes tissent naturellement une relation forte : si Laura a besoin de se reconstruire, Betty elle, a besoin de retrouver sa fille, et la jeune femme est un miroir idéal pour refléter son image perdue...
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Tout en ellipses et en légèreté, structuré autour d'une mise en scène synthétique qui révèle avec justesse non seulement les défauts comme le malaise de ses personnages, tout autant qu'elle sublime les partitions émotionnelles poignantes de leurs interprètes; Petzold, en terres conquises question thématiques (le deuil que l'on tente inlassablement de combler, la relation intime entre vie et art,...) mais peut-être encore plus romantique qu'à l'accoutumée, dresse un regard suggestif, trouble mais avant tout particulièrement affûté sur la notion de famille de substitution, à la fois comme d'un refuge face à une vie difficile et terrifiante, et comme un terreau propice à structurer sa propre liberté.
Un magnifique et tendre drame, rien de moins.
Jonathan Chevrier