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[CRITIQUE] : Being Bo Widerberg


Réalisateurs : Jon Asp et Mattias Nohrborg
Acteurs : -
Distributeur : Malavida Films
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Suédois.
Durée : 1h45min.

Synopsis :
Being Bo Widerberg raconte l’histoire d’un réalisateur capital reconnu mais oublié qui, dans l’ombre d’Ingmar Bergman, est devenu le cinéaste suédois le plus influent du pays. Le film retrace la vie de Widerberg, depuis ses débuts dans les années 60, écrivain en herbe issu de la classe ouvrière de Malmö et sévère critique cinématographique du cinéma suédois contemporain, jusqu’à l’apogée de sa carrière de réalisateur, enraciné à Stockholm, primé à Cannes et à New York. Le film illustre également les conséquences de la carrière de Widerberg - ou plutôt de sa quête passionnée d’une vie intense - sur ses collaborateurs artistiques, sa famille et sur lui-même.




Le cinéma - béni - de Bo Widerberg, c'est le cinéma de l'engagement puissant et vibrant, fruit d'une caméra à l'élégance et à la grâce rares, sans nulle pareille, qui valse avec les âmes qui s'aventurent devant elle, pensée et forgée pour rompre avec la psychologie dramatico-introvertie d'un Ingmar Bergman beaucoup plus austère et dont il restera, implacablement et injustement, dans l'ombre (ses références allant bien plus, indiscutablement, du côté de la Nouvelle Vague française mais aussi et surtout du Free Cinéma de nos voisins britanniques), alors que son impact sur le septième art était peut-être encore plus significatif - et pas uniquement sur le septième art scandinave, malgré une distribution mondiale compliquée.

S'y plonger, instinctivement et sans réserve, c'est découvrir avec gourmandise ses œuvres, accumulation indécente de toiles réalistes et singulières en mouvement continu, qui explorent avec investissement et énergie le quotidien des suédois de la classe ouvrière - comme des déclassés -, sondent avec acuité la banalité comme la dureté de la vie, auscultent sans artifice les relations humaines, imposent la lutte comme un trésor à préserver comme à perpétuer.

Ultime pièce d'un travail sans relâche pour faire reconnaître le travail de cet immense cinéaste disparu depuis près de trois décennies maintenant, et qui fait suite à une rétrospective aux petits oignons dégainée il y a une quinzaine de jours dans nos salles obscures, Malavida persiste et signe avec le documentaire Being Bo Widerberg de Jon Asp et Mattias Nohrborg - adoubé par la dernière Croisette cannoise -, se revendique tout autant comme un hommage sincère et éclairant à ce cinéaste haut en couleurs (à l'intimité, pas aidé par le diagnostic d'un trouble bipolaire, aussi chaotique que sa carrière professionnelle) qu'un portrait linéaire et chronologique - même si un poil superficiel au fond, voire trop rushé -, pas chiche en images d'archives de choix et en interviews (de ses proches à d'anciens collaborateurs, en passant même par d'autres cinéastes comme Ruben Östlund).

Pas aussi académique qu'il en a l'air - malgré une forme furieusement classique -, le film aborde l'homme comme le cinéaste avec sensibilité et respect, incarnant moins une auscultation précise de toute son œuvre, qu'une entrée pour ceux n'ayant pas encore eu la chance de s'y perdre.
Il n'est jamais trop tard...


Jonathan Chevrier