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[CRITIQUE] : The Order


Réalisateur : Justin Kurzel
Acteurs : Jude Law, Nicholas Hoult, Tye Sheridan, Jurnee Smollett, Alison Oliver, Marc Maron,...
Distributeur : Amazon Prime Vidéo France
Genre : Policier, Drame, Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h56min

Synopsis :
Une série de braquages de banques et de vols de voitures a effrayé les communautés du nord-ouest du Pacifique. Un agent isolé du FBI pense que ces crimes ne sont pas l'œuvre de criminels motivés par la finance.



Critique :



Il y a des échecs monumentaux qui brisent des carrières et d'autres qui sont, paradoxalement, des bénédictions.

Pour le talentueux cinéaste australien Justin Kurzel, la cagade monumentale qu'a incarné son adaptation de la (très) populaire franchise vidéoludique Assassin's Creed, rejeté autant par la critique que le public à sa sortie, lui a offert à la fois un ticket de non-retour pour une machine Hollywoodienne qui l'avait broyé avant même de le célébrer, et une opportunité de repartir à zéro sur le meilleur des bons pieds : un cinéma âpre, rugueux et questionnant frontalement - non sans quelques afféteries dispensable certes - les racines mêmes de la violence, à travers des événements bien réels.

Courtesy Of VERTICAL

Un vrai retour aux sources à ses débuts de faiseur de rêves, Les Crimes de Snowtown, opéré successivement avec les excellents Le Gang Kelly et Nitram, et qui trouve son apogée avec The Order, polar captivant et finement structuré à la balle de 9mm près (il prend pour base le roman The Silent Brotherhood de Kevin Flynn et Gary Gerhardt), une péloche pure et dure à l'ancienne vissée sur l'enquête et la traque du suprémaciste blanc/rejeton direct du Klu Klux Klan Robert Matthews et de sa secte - The Order, d'où le titre -, qui au cœur des années 80 ont fait pleuvoir un déluge de violence dans le Nord-Ouest des États-Unis, dans le but de déstabiliser et d'anéantir l'etablishment comme le gouvernement en place.

Un terreau de premier choix pour un Kurzel qui sait où flairer ses références (Martin Scorsese, jusque dans une introduction qui cite explicitement Les Affranchis, mais aussi William Friedkin et surtout Michael Cimino, dont la révérence à Voyage au bout de l'enfer est peut-être un peu trop explicite pour son bien) mais aussi où creuser pour déterrer les racines pourries de la violence endémique du pays de l'oncle Sam, dont l'exhumation brutale d'un extrêmisme insensé résonne un peu trop justement avec notre société contemporaine.

Dans ce bain putride à la fois hostile et renfermé sur lui-même, dans cette réalité rurale aussi désespérée qu'elle est boursouflée par sa haine, le cinéaste s'amuse comme un petit fou, donne du corps et de l'âme à des personnages à la noirceur chantante et affirmée (c'est au fond d'eux-mêmes que l'horreur est la plus étouffante et réelle), et rend in fine ses généreuses confrontations psychologiques presque aussi excitantes - si ce n'est plus même - que ses séquences d'action tendues et percutantes.

Courtesy OF VERTICAL

Et à ce petit jeu burné où les figures féminines sont malheureusement traitées avec un mépris plus où moins assumé (le plus gros écueil du film est là), que ce soit Jude Law en vieux briscard cynique/chasseur de vrais monstres meurtris au plus profond de sa chair, où Nicholas Hoult en wannabe messie du mal à gueule d'ange d'une révolution radicale, chacun trouve son meilleur rôle de récente mémoire (depuis quelques années, Law est d'ailleurs sur un run de performances titanesques assez impressionnant).

Concis et puissant tout autant qu'il n'est jamais plombé par sa prévisibilité évidente, c'est simple, on avait pas vu un polar autant puissant et à la violence aussi viscérale depuis le magnifique Les Brasiers de la colère de Scott Cooper, qui plongeait également dans les entrailles brisées et pétri de détresse de l'Amérique profonde, et dont la révérence envers Cimino était encore plus explicite.
Il n'y a pas de hasard...


Jonathan Chevrier