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[CRITIQUE] : L'ombre du commandant

Réalisatrice : Daniela Völker
Acteurs : -
Distributeur : Warner Bros. France
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h47min.  

Synopsis :
Deux vies. Deux histoires. Un mur qui les séparait. Assistez au moment historique, plus de 70 ans après l'Holocauste, où le fils du commandant d'Auschwitz rencontre une incroyable survivante.




Critique :



À peine huit mois après sa vision (plus pour ceux ayant eu la chance de le découvrir sur la Croisette cuvée 2023), La Zone d'intérêt du trop rare Jonathan Glazer, hante toujours un brin l'esprit des cinéphiles, une séance implacable qui allait bien au-delà de la simple étude hors-champ de la noirceur de l'âme humaine, en abordant frontalement et avec crudité, un débat aussi séculaire que stagnant : la représentation de la banalisation perverse d'une horreur abjecte et bien réelle.

Ou comment offrir une plongée à la fois intérieure et périphérique, d'une horreur connue et inconnue de tous, pour mieux démontrer que le mal ne nous a jamais vraiment quitté, et qu'il a simplement changé de forme (là où, au présent, les chambres à gaz sont devenus une attraction touristique).
Moins d'un an après donc, voilà que débarque en salles une séance joliment complémentaire : L'ombre du commandant de la cinéaste allemande Daniela Völker, où elle confronte directement les héritiers du commandant d’Auschwitz, Rudolf Höss, " protagoniste " du film de Glazer, avec un survivante de cet enfer.

Copyright 2024 Warner Bros. Entertainment Inc.

Soit la confrontation entre le symbole d'une existence grotesquement placide et innocente, qui vivait sans se douter (selon eux, puisque l'on est bien plus face à un déni consenti, une idéalisation de la vérité et de la figure paternelle, ainsi qu'un strict refus/rejet de la vérité) de la réalité de ce qui se passait juste de l’autre côté du mur (le fils Höss, Hans Jürgen Höss, et son petit fils, Kai Höss), et le témoignage vivant, vibrant et indiscutable, d'une horreur réelle, pire que toutes les reconstitutions faites par le petit comme le grand écran - la survivante Anita Lasker-Wallfisch.

D'une manière délicate mais pas moins percutante, Volker sonde autant l'aveuglement d'une bonne frange de l'Allemagne pour minimiser sa culpabilité post-Seconde Guerre mondiale, que la notion de transmission des traumatismes de génération en génération (avec un rapprochement finalement assez étonnant entre Anita Lasker-Wallfisch et sa fille, Maya), au cœur d'un documentaire qui, au-delà de certains effets appuyés pas forcément de bon goût, à le bon ton de ne jamais avoir peur d'aborder les zones d'ombres.
Ce qui en fait une séance réellement nécessaire, et encore plus aujourd'hui.


Jonathan Chevrier