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[CRITIQUE] : Girls will be girls


Réalisatrice : Shuchi Talati
Avec : Preeti PanigrahiKani KusrutiKesav Binoy KironJitin Gulati,...
Distributeur : Nour Films
Budget : -
Genre : Comédie, Drame.
Nationalité : Français, Indien, Norvégien, Américain.
Durée : 1h59min 

Synopsis :
Mira, 16 ans, mène une vie d'élève modèle dans un pensionnat d'élite au nord de l'Inde. Alors que les examens approchent, sa mère Anila revient s'installer dans la région pour la soutenir et veiller sur elle. Mais la rencontre de Mira avec un nouvel élève, Sri, va semer le trouble dans la relation entre les deux femmes, chacune se retrouvant confrontée à ses propres désirs.



Critique :



La magie des coming-of-age movie tient souvent à peu de choses, un où une héroïne furieusement empathique (et les chouettes seconds couteaux qui gravitent autour, dans le meilleur des cas), un cadre qui titille savamment notre nostalgie où même une ambiance gentiment réconfortante (avec une bande originale savamment complice).
À la différence de beaucoup de genres, c'est par sa familiarité, plus ou moins assumé, qu'il peut pleinement faire mouche.

En ce sens, le premier long-métrage de la wannabe cinéaste Shuchi Talati, Girls Will be girls, fait partie de ces projets que l'on ne peut qu'instinctivement aimer, lui qui se place, littéralement, au carrefour des émotions à la fois denses et contradictoires qui assaillent sa jeune héroïne, figure à la fois fascinante et complexe, emprunt d'une naïveté affirmée au moins que d'une détermination sans borne pour embrasser tous les rouages de la vie d'adulte.

Copyright Nour films

Avec l'Himalaya comme cadre majestueux, l'histoire suit tout du long Mira, seize ans au compteur et élève modèle dans un pensionnat huppé qui éduque l'élite de demain, à une heure véritablement charnière : le temps des examens.
Une période difficile qui voit sa mère, Anila, revenir s'installer dans la région pour la soutenir et veiller sur elle, alors même qu'elle goûte aux joies exaltantes mais compliquées d'un premier amour; une romance qui ne va qu'ajouter plus de troubles dans la relation entre les deux femmes...

Porté par un prisme captivant, un regard à la fois inflexible et pertinent sur la manière dont les jeunes femmes doivent se construire au cœur d'un système patriarcal furieusement répressif, Shuchi Talati scrute avec empathie l'apprentissage de Mira par la rébellion et la découverte de soi à travers la sexualité, par la revendication de ses désirs, de la propriété de son propre corps et de sa sexualité.
Une gamine impuissante et sous pression dont on attend trop (elle doit la jeune femme parfaite que tout le monde attend d'elle, être un modèle pour les autres jeunes filles, là où ses petits camarades sont libres d'assumer leurs comportements primaires et leur jalousie/harcèlement décomplexé), qui a trop bien conscience que le peu d'autorité qui lui est alloué de par sa position au sein de son microcosme scolaire, ne peut rien face à un sexisme brutal méchamment ancré.

Un portrait passionnant auquel elle juxtapose autant une auscultation sans artifices d'une société indienne au patriarcat violent, qu'une relation mère-fille tout en non-dits, dont la tension est douloureusement enracinée dans l'éducation stricte et la jeunesse refoulée de l'aînée des deux femmes, qui semble vivre par procuration (quitte à être attirée par le même jeune homme que sa fille) la jeunesse de la chair de sa chair, qu'on lui a refusé à son âge - même si elle s'enferme dans le même temps, dans un élan sur-protecteur pour qu'elle ne dépende pas, comme elle, des hommes.

Copyright Nour films

Coming-of-age à la fois humain et vulnérable, subtil et délicat, sur une âme tentant de concilier ce qu'elle veut et veut être, à ce que la société lui impose, capturé au plus près des corps et des cœurs (une mise en scène intime et aux cadres réfléchis, jamais voyeuristes), Girls will be girls se fait un premier effort aussi intense et pertinent qu'engagé, deux heures fluides et passionnantes qui explore la féminité au sein d'une société indienne opprimante.

La preuve éclatante après Santosh de Sandhya Suri et All we imagine as light de Payal Kapadia, que le cinéma indien est dans une forme olympique lorsqu'il se conjugue au féminin.


Jonathan Chevrier




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