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[CRITIQUE/RESSORTIE] : Les Sept Samouraïs


Réalisateur : Akira Kurosawa
Avec : Toshirô MifuneTakashi ShimuraKeiko Tsushima,…
Distributeur : The Jokers / Les Bookmakers
Budget : -
Genre : Action, Aventure.
Nationalité : Japonais.
Durée : 3h21min

Date de sortie : 2 décembre 1955
Date de ressortie : 3 juillet 2024

Synopsis :
La tranquillité d’un petit village japonais est troublée par les attaques répétées d’une bande de pillards. Sept samouraïs sans maître acceptent de défendre les paysans impuissants.



Critique :



Il est difficile d'écrire sur un film dont on a quasiment tout dit, sur une œuvre qui a marqué au fer rouge l'histoire du septième art mais également, sur une œuvre dont les mots eux-mêmes ne suffisent presque pas à décrire la beauté autant que la puissance et l'intensité émotionnelle qu'incarnent ses images.

Alors c'est bateau oui, mais Les Sept Samouraïs, le jidai-geki épique et fleuve d'Akira Kurosawa, est un chef-d'œuvre, un vrai, dans la plus pure définition d'un terme qui ne veut plus forcément rien dire aujourd'hui, tant il est dégainé à toutes les sauces par des spectateurs/cinéphiles à l'avis facile (comprendre : souvent inconsistant).

Écrire à son sujet est donc un poil tortueux, pour quiconque ne voulant pas tomber dans les banalités, quand bien même il est une évidence de flirter avec celles-ci pour analyser cette pièce fondamentale de l'histoire du cinéma, équilibre parfait et rare entre vraies ambitions d'auteur et contours solides de divertissement populaire, sans jamais renier la moindre once de sa densité ni de sa complexité.

©Toho Co, .Ltd

À l'image au fond, de la performance magistrale de Toshiro Mifune, dans la peau du « faux » rōnin Kikuchiyo, personnage clé dont l'importance grandit au fil du récit, figure tout en dualité comme le film en lui-même : drôle et sensible, souvent ivre mais extrêmement lucide, fermier et, en quelque sorte, samouraï (crédible, même s'il rompt complètement avec l'idée profondément romantique et solennelle que l'on pouvait s'en faire), fanfaron tout en étant d'une incroyable noblesse d'âme.

Il est le poumon vivant et vibrant d'un jidai-geki aux affrontements brutaux (mais d'où émerge quelques instants de pures poésies absolument désarmants), qui se fait tout autant un drame humain et politique (dans sa manière de pointer l'absurdité de la guerre autant que de lier deux mondes inconciliables : celui des samouraïs et du monde rural, dont il retranscrit à merveille la dureté et la pénibilité), une romance bouleversante,  une vraie célébration de l'amitié virile voire même une méditation lyrique sur la destinée; un cocktail détonnant frappé par une écriture minutieuse et ciselée, qui donnent du corps et du cœur aux différents personnages (capables du bien comme du mal) et à leurs dynamiques - même conflictuelles -, figures presque fantomatiques grâce au noir et blanc crépusculaire d'Asakazu Nakai.

Un chef-d'œuvre qu'on vous dit, d'une modernité époustouflante, dont sa dernière version en date, restaurée et allongée, mérite amplement ses trois heures et demie de visionnage intense et indispensable.


Jonathan Chevrier