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[CRITIQUE] : MaXXXine


Réalisateur : Ti West
Acteurs : Mia Goth, Elizabeth Debicki, Kevin Bacon, Michelle Monaghan, Lily Collins, Giancarlo Esposito, Bobby Cannavale, Halsey, Moses Sumney,...
Distributeur : Condor Distribution
Budget : -
Genre : Epouvante-horreur.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h44min.

Synopsis :
Los Angeles, dans les années 80. Star de films pour adultes et aspirante actrice, Maxine Minx décroche enfin le rôle de ses rêves. Mais alors qu’un mystérieux tueur traque les starlettes d’Hollywood, des indices sanglants menacent de dévoiler le sombre passé de Maxine.




Critique :



Petit retour en arrière, puisque la dernière fois que nous avions laissé sur grand écran l'actrice de films pour adultes Maxine Minx, incarnée par Mia Goth, c'était dans le climax jouissif de X, où elle liquidait purement et simplement Pearl, la vieille tueuse dérangée de toute sa bande d'amis.
Un personnage également campée par Goth et vedette du prequel éponyme, second film de la trilogie qui fut lui, cantonné au petit écran, et qui nous avait fait passer une ferme du fin fond de la Nouvelle-Zélande, comme une caverne des horreurs texane.

Tu nous suis encore ? Tant mieux, mais continue quand-même de t'accrocher un peu...

Copyright Starmaker Studios LLC

Place à MaXXXine donc, où l'actrice se fait désormais trentenaire mais toujours autant vissée aux bas-fonds de l'industrie du X de la cité des Anges.
Mais sa carrière pourrait prendre un petit coup de pouce improbable par l'intermédiaire de son agent, Teddy Night, qui lui dégote un second rôle dans le wannabe film d'horreur folklorique à succès, The Puritan II, mise en boîte par Elizabeth Bender et produit par une Universal Pictures voulant gentiment surfer sur le gros boom de ce qui deviendra " l'ère de la VHS ".

Le hic, c'est qu'aucun néon criard de l'industrie Hollywoodienne ne peut totalement masquer le passé sombre de Maxine, qui n'a de cesse de la hanter au quotidien, et alors que ses secrets obscurs (le massacre de la ferme de Pearl) menacent d'être dévoilés au grand jour par une menace invisible (dont on ne voit que son laquet de privé, un connard magnifiquement campé par un Kevin Bacon à l'accent chantant) et qu'un tueur sadique (le Night Stalker, qui nourrit une obsession toute particulière pour Maxine et ses collègues) s'en prend à plusieurs jeunes femmes du sud de la Californie, elle va devoir vaincre ses démons (mais pas que) et écraser tout ce qui pourrait se mettre en travers de son chemin, pour réaliser ses rêves et devenir une véritable star aux yeux du grand public...

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Rejeton bordélique et tout en excitation perverse, entre un giallo des 70s et un pur bis ricain savoureusement ringard des 80s (jusqu'à un final qui épouse presque la poussière pailletée et burnée des prods made in Simpson/Bruckheimer), MaXXine est bel et bien l'ultime pièce séduisante d'un délirant triptyque au féminin sur le désir, les ambitions démesurées nourris par l'American Dream et même sur l'amour du tout puissant septième art, où les penchants et les excès savoureusement camp de West, trouvent un cadre particulièrement adéquat dans les recoins tout en vices du Sunset Strip, où la pornographie, l'hyper violence, l'extrémisme religieux et la toxicité de la machine à broyer les rêves hollywoodienne, se côtoient et s'épousent dans une même orgie crasseuse et vorace.

Années 80 oblige, tout y est permis (même de s'inspirer du vrai Night Stalker, ou encore de rappeler au douloureux et fascinant souvenir du Dahlia noir) car rien n'est interdit, et encore moins à un cinéaste qui, passé du grindhouse sauce porno-soft à l'ère du muet, embrasse désormais amoureusement l'âge d'or maladroit du sacro-saint slasher matiné de thriller énervé : tout y est, du gore à outrance à de la violence extrême, en passant par des dialogues intentionnellement (et délicieusement) kitsch et une musique synthétique assourdissante, véritables compagnons ensanglantées de l'ascension déglinguée de Maxine vers le sommet.

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D'un point de vue mise en scène, West passe d'ailleurs sensiblement la seconde, libéré des contraintes budgétaires de ses deux précédentes expériences indépendantes, il épouse le faste d'une reconstitution du Hollywood des 80s, où il ne canalise plus comme dit plus haut, l’esthétique provocatrice de l'époque mais en épouse tous les excès, où sa nostalgie presque Tarantinesque (beaucoup le compareront à Once Upon a Time… in Hollywood, ce qui n'est pas totalement déconnant sur de nombreux points), ne se résume pas tant à un temps/lieu désormais révolu qu'à celle d'un véritable pic de la production horrifique, jadis moins bâti sur la psychologie (cette mode du " elevated horror " dégueulée plus à tort qu'à raison, sur des films qui semblent - ou pas - un poil plus complexe et écrit que la moyenne), mais bien plus sur un ressenti primaire et une légèreté très (trop) assumée.

De l'horreur viscérale matinée de thriller savamment glauque, à l'absurdité sordide et grotesque, tout en trash et en décadence, dont le cinéaste reproduit toutes les nuances comme s'il s'improvisait comme un héritier d'un Brian De Palma (rien d'étonnant tant West cite Hitchcock sur de nombreux plans au cœur de cette trilogie) voire même d'un Abel Ferrara, quitte à trancher avec la simplicité et la clarté minérale de X et Pearl.

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Car si d'un point de vue mise en scène, MaXXXine se fait définitivement le plus vivant et divertissant (brouillant même la frontière entre l'hommage et le statut de film d'exploitation à part entière), à contrario, il est peut-être le plus confus des trois opus de la trilogie d'un point de vue écriture et thématiques - logique vu le prisme choisi -, même s'il est tout aussi bourré de références que les autres.
Mais qu'importe au fond, puisque West possède devant sa caméra une arme absolue, Mia Goth, déesse tourmentée et impitoyable qui parvient à faire de son anti-héroïne inflexible (à l'évolution cela dit assez maigre), un put*** d'emblème de l'émancipation féminine, certes accro à la cocaïne et prompt à liquider sans sourciller son prochain, mais d'une détermination sans pareille pour s'imposer dans un univers sursexué et brut (et à qui répond merveilleusement une Elizabeth Debicki qui vampirise tout autant l'écran).

Elle est le démon qui possède tout, la muse diabolique qui habite et hante la merveilleuse trilogie de Ti West.
In this business, until you’re known as a monster, you’re not a star.”, disait feu Bette Davis, et si oui, Maxine est un monstre, elle est clairement de ceux dont on tombe irrémédiablement amoureux.


Jonathan Chevrier


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