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[CRITIQUE] : Marx peut attendre


Réalisateur : Marco Bellocchio
Avec : Marco Bellocchio.
Distributeur : Ad Vitam
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Italien.
Durée : 1h36min

Synopsis :
Camillo est décédé en 1968. Près de cinquante ans plus tard, Marco Bellocchio rassemble toute sa famille pour un déjeuner. Avec sa famille il s'interroge sur Camillo, son jumeau disparu à l'âge de 29 ans. Les frères. Les petits-enfants. La sœur de la petite amie de l'époque. Un psychiatre. Un prêtre. En parlant avec chacun d'eux, en se remémorant ces années et ces faits, Marco reconstitue les morceaux du passé, donnant enfin corps à un fantôme qu'il a côtoyé toute sa vie. À travers sa famille, il fait revivre l'histoire de son frère, sans filtres ni pudeur, presque comme une enquête, qui reconstitue une époque et tisse le fil rouge de son cinéma.



Critique :


À une heure où son magnifique L'Enlèvement vient d'atteindre nos salles obscures (ou il questionne à nouveau avec fureur le pouvoir du dogme catholique, dans une édifiante radiographie de la barbarie fondamentaliste de l'Église catholique, à laquelle il noue une réflexion captivante sur la notion d'identité), Marco Bellocchio squatte donc par deux fois nos écrans avec une œuvre infiniment plus personnelle, Marx peut attendre, documentaire autobiographique façon ciné-thérapie où il interroge frontalement les siens autour de la tragédie intime qui a autant marqué son existence, que son œuvre - le suicide de son frère jumeau Camillo Bellocchio en 1968, à l'âge de 29 ans.

Un mystère insondable qu'il a tenté si ce n'est de percer, d'au moins le (re)mettre au cœur de la discussion familiale à l'été 2016, en réunissant les différentes générations de la famille Bellocchio autour d'un déjeuner convivial, qui deviendra le prélude de la libération d'une parole longtemps muselée.

Copyright Ad Vitam

Car plus qu'une quête de sens, c'est bien un électrochoc émotionnel, une mise en exergue des souvenirs du passé, des vieilles rancunes et regrets jamais apaisés, des maux qui ne sont pas toujours criés/exprimés - tout comme la culpabilité -, qu'opère le cinéaste, tout en nouant les interviews de ses proches et les images d'archives familiales, avec des extraits de ses propres films, comme pour mieux affirmer que le cinéma est une expression de la (sa) vie.

Tel une fable familiale faite d'extraits et d'interventions, où il égraine ses thèmes de prédilection (famille, politique, religion et psychanalyse), le documentaire prend in fine aussi bien les contours d'une charge envers les contradictions idéologiques de sa nation, que de l'expression tragique et cathartique d'un réalisateur impuissant, qui n'a eu de cesse de ressasser son traumatisme au film d'une filmographie où le Marco Bellocchio cinéaste a déjà fait, à la fois consciemment et inconsciemment, l'exégèse de Marco Bellocchio.
Sévère et humain, juste et lucide, caustique et réflexif, Marx peut attendre interroge mais ne donne pas de réponse définitive, expose la vérité mais n'offre point la rédemption à un homme, une famille qui n'a pas su entendre les cris de douleurs de l'un des siens.


Jonathan Chevrier


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