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[CRITIQUE] : The Appointment



Réalisateur : Lindsey C. Vickers
Avec : Edward Woodward, Jane Merrow, Samantha Weysom,…
Distributeur : Les Films du Camélia
Budget : -
Genre : Épouvante-horreur.
Nationalité : Britannique.
Durée : 1h29min

Synopsis :
Une entité maléfique et énigmatique plonge une famille dans la tourmente… Dans l’incapacité d'assister au récital de violon de sa fille, Ian, son père, est hanté par une série de cauchemars prophétiques qui semblent annoncer une tragédie imminente. Les forces obscures se rassemblent-elles pour se déchaîner contre lui ?



Critique :


À l'instar d'un Charles Laughton (La Nuit du Chasseur), d'un Herk Harvey (Le Carnaval des âmes) ou même d'un Dalton Trumbo (Johnny s'en va t'en guerre), Lindsey C. Vickers est l'homme d'un seul et unique film, The Appointment, une petite bombe qui n'a d'égale que la difficulté indéniable - jusqu'ici - à pouvoir le mirer (une obscure édition VHS outre-Manche, pour ceux n'ayant pas eu la chance de le découvrir durant ces quelques diffusions télévisées).

Bonne nouvelle, Les Films du Camélia corrige cette injustice avec une sortie toute pimpante, une aubaine pour cet incontournable de l'épouvante britannique, concocté par un pur produit de la Hammer (il était assistant-réalisateur sur plusieurs productions au crépuscule de la firme, aux débuts des 70s), qui arrive à rendre un pitch tout droit sortie d'un épisode de The Twilight Zone (Dans l’incapacité d'assister au récital de violon de sa fille, Ian, son père, est hanté par une série de cauchemars prophétiques qui semblent annoncer une tragédie imminente), en une expérience merveilleusement complexe et troublante.

Copyright Les Films du Camélia

Un temps pensé comme le pilote d'une anthologie surnaturelle télévisée, scindée en 12 chapitres (avant que le projet ne capote en cours de route), ce qui explique en partie sa facture un brin étrange (l'impression que son récit est un poil étiré, quand bien même il ne dépasse même pas les 90 minutes de bobine), le film détonne dans sa volonté de ne jamais coller aux standards de son époque, distillant sournoisement son propre effroi et ce dès une ouverture incroyablement choquante, à l'usage brutale et implacable du surnaturelle.

Un prologue qui ne fait que confirmer que rien où presque ne prépare à la vision The Appointment, en grande partie grâce à la volonté de Vickers de jouer avec l'épure la plus totale, privilégiant continuellement son ambiance à toute divagation scénaristique alambiquée - voire même à toute caractérisation un poil poussée de ses personnages -, maintenant ainsi tout du long en haleine un auditoire conscient que quelque chose d’horrible et irréversible va arriver (un peu à l'image de Spielberg avec Duel, mais surtout de Nicholas Roeg avec Ne vous retournez pas).

Ainsi, le film peut tout du long se voir comme un cauchemar lancinant où son personnage principal (un Edward Woodward des grands jours), par le poids de sa culpabilité où par la force malveillantes et invisibles tourments surnaturelles (dans un ballet de suggestions, de superpositions, de fantasmes, de flashforwards prémonitoires, de photos qui prennent soudainement vie,...), glisse tranquillement dans les tréfonds de l'enfer.

Copyright Les Films du Camélia

Punition divine ou implication d'un purgatoire le punissant d'avoir voulu faire passer les siens - et sa fille - au second plan ou, pire, d'avoir des désirs impurs pour la chair de sa chair (comme cette scène troublante où il s'arrête devant la porte de la chambre de sa fille, alors qu'elle se mord les lèvres et fixe intensément la poignée, comme si elle attendait que celui-ci rentre, avant qu'il ne se refuse finalement de le faire); Vickers laisse libre court aux interprétations tout en ayant de cesse de déstabiliser son monde (de sa mise en scène perturbante, alternant volontairement et frénétiquement les plans, au score onirique de Trevor Jones), jusqu'à un épilogue furieusement intense et claustrophobe, où son sujet n'est plus métaphoriquement au-dessus d'un abîme, mais littéralement.

Une sacrée découverte à la poésie macabre et radicale,  qui marque même encore longtemps après la séance.


Jonathan Chevrier