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[SƎANCES FANTASTIQUES] : #84. John Carpenter's Vampires

© 1998 - Columbia Pictures, Inc.

Parce que les (géniales) sections #TouchePasAMes80s et #TouchePasNonPlusAMes90s, sont un peu trop restreintes pour laisser exploser notre amour du cinéma de genre, la Fucking Team se lance dans une nouvelle aventure : #SectionsFantastiques, ou l'on pourra autant traiter des chefs-d'œuvres de la Hammer que des pépites du cinéma bis transalpin, en passant par les slashers des 70's/80's (et même les plus récents); mais surtout montrer un brin la richesse des cinémas fantastique et horrifique aussi abondant qu'ils sont passionnant à décortiquer. Bref, veillez à ce que les lumières soient éteintes, qu'un monstre soit bien caché sous vos fauteuils/lits et laissez-vous embarquer par la lecture nos billets !


#84. Vampires de John Carpenter (1998)

Assez fou de se dire que le dernier long-métrage de John Carpenter à avoir eu droit à une exploitation en salles, Ghosts of Mars, est sorti il y a 22 ans tout rond (The Ward a été condamné à une sortie DTV quasiment dans l'anonymat en 2011), deux décennies où tout un monde pour un spectateur moyen qui a autant une tendance à crier au chef-d'oeuvre au moindre film vu (tendance qui trouve sa vérité quasiment tous les mercredis de sorties), qu'à oublier la majorité de ses séances à peine quelques heures après les avoir vu.
Reste alors depuis aux amoureux du cinéma du bonhomme, de plus en plus nombreux (tout du moins, on l'espère), à ses remémorer ses efforts passés à coup de revisionnages intensifs, fruit d'une carrière foisonnante, comportant une pluie de péloches cultes à en faire pâlir d'envie tout wannabe cinéaste - voire même les plus chevronnés.

Pas forcément l'un de ses hauts faits - mais clairement l'un de ses plus jouissifs -, Vampires et un James Woods des grands jours, cabotineur as hell (avec un feu Yves Renier au doublage, dont la voix lui va comme un gant en VF), badass juste ce qu'il faut (total look cuir noir, avec les Ray-Ban et l'arbalète qui vont avec) et avec un doigt de misogynie assumé, tient encore sévèrement bien la route malgré son quart de siècle au compteur.

© 1998 - Columbia Pictures, Inc.

Adaptation d'un bouquin éponyme de John Steakley, passé notamment entre les mains de Russell " Highlander " Mulcahy et Dolph Lundgren au milieu des 90s, qui permet au Big John de citer le pape John Ford (l'autre figure totem de son cinéma, avec sa figure tutélaire Howard Hawks, à qui il rend à nouveau hommage dans le final Rio Bravo-esque), le film, même plombé par une production à l'arrachée (avec un budget de 60M$ divisé par 3 en cours de route), se fait un pur western aussi gore et barbare que profondément viril, du cinéma de papa à l'ancienne à la lisière du cartoon horrifique, où la traque des suceurs de sang se fait dans le sang et la testostérone bien brûlante.

On y suit les aléas de Jack Crow (même son blaze pue la badassitude), chasseur de vampires/mâle alpha élevé par l'église catholique, après avoir vu ses parents succomber aux dents acérées d'un vampire.
Désormais leader d'une équipe de mercenaires, dont le quotidien est dédié à une traque impitoyable de tout ce qui se fait vampire sur le territoire américain (encore une fois, au nom de l'église catholique et du cardinal Alba, emissaire du Vatican), le bonhomme croise la route au Nouveau-Mexique, après avoir nettoyé un nid de ghouls, du maître ultime : Valek, pur produit (spoilers) de l'église elle-même, qui décime toute son équipe ou presque, à l'exception de son fidèle ami, Tony Montoya (Daniel Baldwin, en remplacement de son frangin Alec), et d'une jeune prostituée, Katrina, mordue par Valek...

Mise en images épurée du matériau d'origine (avec, notamment, une place bien moins importante du Vatican en pôle number one, du contrôle de la chasse aux vampires), la bande jongle continuellement entre un second degré furieux et un sérieux à la limite du ridicule, que ce soit dans la partition des comédiens (le tandem Woods/Griffith joue frontalement leurs personnages, moins le reste du casting), son écriture parfois cheezy à souhait (" t'as eu le gourdin, padre ? "), quand elle n'est pas irritante (le personnage de Katrina, au traitement indigne et à la misogynie totalement décomplexée - Laura Palmer ne méritait pas ça), où même dans ses effets (la brutalité de la chasse, avec ses vampires attachés à une Jeep Cherokee pour être brûlé par le soleil, face à une horreur grand guignolesque et ses corps démembrés/déchiquetés comme un poulet braisé en plein barbec).

© 1998 - Columbia Pictures, Inc.

Et c'est sans doute cet entre-deux, qui fait sa plus force, ses sous-textes subtiles (notamment sur le virus vampirique, symbole d'un mal éternel qui cherche à dominer/annihiler, que l'on peut comparé au SIDA dans la transmission qu'en fait Valek à Katrina), sa violence hardcore, ses quelques séquences ironiques (les vampires enterrés qui jaillissent à la tombée de la nuit) qui tranchent avec quelques artifices de montages douteux (ses fondus au noir en plein action), un jeu pas toujours au poil et une dynamique trop énervée (on a souvent l'impression que Carpenter passe d'une scène à l'autre comme dans une bande dessinée, quitte à nous laisser un brin sur le carreau la page suivante).

Après une pluie d'œuvres complexes et thématiquement grandioses, John Carpenter décidait de se faire plaisir au moins autant qu'il faisait plaisir à son auditoire.
Et le voir s'attaquer au mythe vampirique et le badigeonner avec amour, de sauce western crépusculaire, pour mieux croquer un B movie mordant et badass où il fait de James Woods le chasseur ultime pour cravater du suceur de sang, ça vaut vraiment, mais alors vraiment son pesant de pop-corn, et encore plus aujourd'hui.


Jonathan Chevrier