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[CRITIQUE] : Les Damnés ne pleurent pas


Réalisateur : Fyzal Boulifa
Avec : Aïcha Tebbae, Abdellah El Hajjouji, Antoine Reinartz,...
Distributeur : New Story
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français, Belge, Marocain.
Durée : 1h51min

Synopsis :
Fatima-Zahra traîne son fils de 17 ans, Selim, de ville en ville, fuyant les scandales qui éclatent sur sa route. Quand Selim découvre la vérité sur leur passé, Fatima-Zahra lui promet un nouveau départ. Ils arrivent alors à Tanger, où de nouvelles rencontres leur donnent l’espoir d’atteindre la légitimité qu’ils recherchent tant. Mais ces aspirations menacent la relation fusionnelle qui les lie depuis toujours.



Critique :


On avait été de ceux à avoir gentiment été séduit par le premier long-métrage du cinéaste maroco-britannique Fyzal Boulifa, Lynn + Lucy (sortie en catimini en VOD durant les fêtes 2020, dans une distribution alors sous le joug destructeur de la pandémie du Covid-19), fusion délicate entre le drame " Douglas Sirkien " et le réalisme brut britannique typiquement Loachien, nouée autour de l'histoire d'une amitié fusionnelle mise à mal par la natalité d'une des deux amies.

Tout aussi emprunt de cette touche britannique dépouillée si familière, mais avec une nette touche de mélodrame à l'italienne, son second effort, Les Damnés ne pleurent pas, se fait un cocktail encore plus hybride et audacieux, lui qui est logé entre la comédie dramatique socialo-familial (citant plus où moins directement le magnifique Mamma Roma de Pasolini) et le road movie désenchanté, le tout embaumé dans une puissance et une authenticité rare.

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Vissé autant sur les atermoiements que l'odyssée mouvementée à travers le Maroc, d'une veuve aussi séduisante que naïve, et son fils adolescent Salim, un tandem atypique et destructeur, pliant sous le joug autant d'une surprotection asphyxiante et d'une co-dépendance de plus en plus difficile, d'autant que la première a quelques squelettes douloureux dans son placard (elle est ostracisée par le microcosme local après avoir été violée plus jeune, dont Selim est le fruit de cette tragédie, la forçant par la suite à se prostituer pour subvenir à ses besoins et ceux de son fils), qui rend d'autant plus difficile leur périple dans une campagne marocaine aussi hostile que le cadre urbain de Tanger.

Dénué de tout jugement putassier, embrassant autant la beauté que les imperfections de personnages furieusement humains (incarnés à la perfection par Aïcha Tebbae et Abdellah El Hajjouji), s'enfoncant de plus en plus profondément dans les sables mouvants de la privation sociale et de sa moralité déviante, Les Damnés ne pleurent pas, pas si éloigné des récents Amel et les fauves et Les Meutes, se fait une expérience à part, un double portrait fascinant et digne, à la simplicité étonnante, de deux écorchés fusionnels.

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Tantôt politique dans sa manière de dénoncer les hypocrisies de la société patriarcale marocaine (où la rédemption et la respectabilité semblent à jamais irrécupérable, où toute ascension sociale est conditionnée), tantôt une auscultation puissante de la cruauté quotidienne de toute une population à la marginalité forcée (l'homosexualité réprimée, les humiliations et les violences subies par les femmes, la réalité de la prostitution,...), le second effort de Fyzal Boulifa, beau kaléidoscope humain, marque la rétine autant qu'il fait chavirer les cœurs.


Jonathan Chevrier


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