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[CRITIQUE] : Sous le tapis


Réalisatrice : Camille Japy
Avec : Ariane Ascaride, Bérénice Bejo, Thomas Scimeca, …
Distributeur : Paname Distribution
Budget : -
Genre : Comédie
Nationalité : Français
Durée : 1h37min

Synopsis :
Odile se prépare à fêter son anniversaire. Alors que ses enfants et petits enfants sont en route pour la soirée, Jean, son mari, décède brutalement. Incapable de faire face à cette réalité, elle le cache sous son lit...


Critique :


Une belle et grande maison. Deux beaux enfants. Un mari aimant. Odile (Ariane Ascaride) a de la chance. La mort, hélas, s’invite souvent à l’improviste et transforme cette belle demeure en théâtre mi-absurde, mi-tragique. Trouvant son mari gisant sur le sol de leur chambre (foudroyante crise-cardiaque), Odile décide de faire comme si de rien n’était et cache le corps sous le lit, avant l’arrivée de ses enfants et petits-enfants. Avec Sous le tapis, son premier long métrage, Camille Japy approfondit son travail sur le déni du deuil au travers des prismes familiaux qu’elle avait débuté avec son court métrage Petites filles (2017).

Copyright Paname Distribution


C’est l’histoire d’une famille où chacun a sa place, du moins en apparence. Jean et Odile, patriarche et matriarche, forment un couple soudé, les années n’ont pas réussi à affaiblir leur amour. Une vie à deux paisible dans un cadre bucolique, avec une grande maison familiale, un jardin, des rosiers, en somme tout ce qu’on peut imaginer pour un couple bourgeois à la retraite. Leurs enfants sont, par contre, aux antipodes. Sylvie aime que tout soit fait dans les règles. De son côté, Lucas semble être un éternel adolescent, il voit tout avec un regard d’enfant et se laisse porter. Chacun amène son partenaire de vie : Mathieu, le fou de vélo et Clara, au diapason de Lucas, spirituelle et sensuelle. Tout ce beau monde arrive quelques secondes après qu’Odile mette son mari sous le lit. Son corps ne vit plus, mais pour quelques heures de plus, son esprit vit au travers de ses enfants et de ses petits-enfants, qui ne savent rien du drame. Son absence est presque banale tant les membres de la famille ont leur problème. Odile prétexte une dispute et ses enfants n’y voient que du feu. Sylvie est obnubilée à ce que son nouveau compagnon rencontre ses parents et que ceux-ci approuvent son choix. Lucas, campé dans son rôle de l’irresponsable, ne s’occupe de rien et part butiner avec sa belle. Seuls les petit-enfants, notamment Clément, observent que l’atmosphère n’est pas comme d’habitude et que leur grand-mère semble ailleurs.

Sous le tapis déroule un récit basé sur le deuil, certes, mais surtout sur les secrets familiaux que cette mort soudaine vient déterrer. Et comment ces secrets façonnent les comportements, d’une manière plus ou moins indirecte. On ne vous en dit pas plus concernant cette partie de l’histoire. Drame français dans ce qu’il a de plus basique, le film de Camille Japy possède cependant un petit goût d’originalité, notamment dans sa façon de dépeindre une famille en deuil. Le postulat de départ (le déni d’Odile) propose un deuil éloigné de l’austérité qui accompagne généralement la mort. La morgue, les habits noirs, les cérémonies cadrées. Ici rien de tout ça. Parce qu’Odile refuse de dire au revoir à son mari, du moins d’une manière traditionnelle, elle oblige sa famille à penser le deuil différemment. À rendre la mort plus spirituelle, plus belle même. Une scène émouvante montre les petits-enfants faire une composition florale avec les fleurs du jardin et les disposer eux-même autour du corps de leur grand-père. Ces images, loin des conventions sociales, montrent tout le tabou autour du deuil. Elles montrent aussi la rigidité de ces conventions, au vu des réactions que cela engendre dans la famille. Camille Japy s’échine à lever un tabou grâce à une libération de parole autour d’un secret familial qui les a rongé, tant et si bien que leur relation s’en est retrouvée à jamais altérée.

Copyright Paname Distribution


Premier long-métrage plein de promesses, Sous le tapis vient balayer des années de poussière accumulée sous la forme d’un secret familial et repousse les normes du deuil, afin de proposer un regard plus joyeux et poétique autour de la mort.


Laura Enjolvy


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