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[CRITIQUE] : Pulse


Réalisatrice : Aino Suni
Avec : Elsi Sloan, Carmen Kassovitz, Lucille Guillaume, Camille, Adel Bencherif, …
Distributeur : Wayna Pitch
Budget : -
Genre : Thriller, Drame
Nationalité : France, Allemagne, Finlande
Durée : 1h43min

Synopsis :
Elina, une jeune rappeuse en herbe de 17 ans, est contrainte de quitter son pays natal, la Finlande, lorsque sa mère décide de rejoindre son petit ami sur la Côte d’Azur. Elina est tout de suite fascinée par sa nouvelle sœur par alliance de 18 ans, Sofia, une ballerine très charismatique qui mène une double vie faite de soirées, de garçons et de drogues. Mais cette amitié apparente se transforme vite en jeu de pouvoir aux conséquences toxiques…


Critique :


Premier long métrage de la réalisatrice finlandaise Aino Suni, Pulse palpite entre la Finlande et le sud de la France et joue avec les codes du thriller pour raconter une histoire d’emprise entre deux jeunes adolescentes. Les paroles d’Avril Lavigne, dans sa chanson Sk8er Boi, se rappellent à notre bon souvenir dès les premiers instants du film. “He was a punk, she did ballet” chantait-elle dans notre adolescence. Ici, Elina la finlandaise, rappeuse amatrice aux cheveux verts rencontre Sofia, danseuse (future) étoile, riche et privilégiée. Deux mondes très différents qui se télescopent le jour où la mère d’Élina décide d’emménager avec le père de Sofia.

Copyright Port au Prince Pictures / Kerttu Hakkaraine

La réalisatrice ouvre son film avec un plan séquence léché, où l’on suit Élina dans son élément. Les couleurs néons sont saturées et éclairent l’image de rouge, de vert et de rose. Élina semble étrangement seule face à la foule. Elle refuse de chanter devant ses ami⋅es et se réfugie sur le balcon où un couple s’embrasse, accentuant d’autant plus sa solitude. C’est dans le secret de la nuit, alors qu’elle rentre chez elle, que le personnage sort de sa carapace et chante à tue-tête des paroles rappées. En quelques plans, Aino Suni caractérise avec talent son personnage principal. Élina est une adolescente passionnée mais qui manque de confiance en elle. On comprend donc que le déménagement soit une source de colère et de stress pour Élina. Elle troque le confort de son minuscule appartement pour une immense villa dans la région PACA. Son style vestimentaire détonne dans cet environnement doré, ses ami⋅es finlandais la lâche et la jeunesse privilégiée du sud la boude. Vulnérable et encore plus seule, Élina est dans un moment charnière où tout peut basculer. La vulnérabilité peut être un moteur d’un comportement agressif, comme moyen de se protéger. Mais elle choisit l’obsession pour contrer son mal être. Son objet d’obsession : la belle Sofia, éclatante, talentueuse, qui a toutes les armes pour réussir dans la vie.

La tension, alors diffuse, monte en flèche tandis que Sofia devient le centre d’intérêt (et de son monde) d’Élina. Le ton pop laisse place au suspense et les actions d’Élina deviennent de plus en plus abstraites. Le personnage tombe dans l’obsession et Sofia tombe dans son emprise, bien loin de se douter que le comportement de sa nouvelle “sœur” n’a rien à voir avec le fait qu’elle soit une étrangère. C’est dans sa deuxième partie, véritable thriller noir et malsain, que Pulse perd son équilibre et dérive vers un récit peu engageant. Si nous comprenons les intentions de la réalisatrice (montrer les rouages de l’emprise et ses conséquences), il semblerait qu’Aino Suni n’ait pas su montrer le véritable danger des actions malsaines de ses personnages. La mise en scène se borne à installer une ambiance poisseuse, à styliser son image sans jamais s'intéresser à l’histoire en elle-même. Les actions d’Élina deviennent prétextes et ne sont pas remises en question. On a même l’impression que le film lui donne raison : celle-ci, après avoir gâché la vie de Sofia, voit son rêve se réaliser. Sofia l’attend alors sagement, malgré sa compréhension de tout ce qu’elle lui a fait subir. On pourrait évidemment faire le parallèle avec la réalité : les bourreaux s’en sortent toujours (quand ils sont blancs, hétéros, riches et célèbres). On voit mal une Élina queer s’en sortir face à une Sofia protégée par un père ultra riche. Pire encore, on peut comprendre la fin comme une excuse : malgré la douleur, Élina a sorti Sofia de sa prison dorée, de sa bulle bourgeoise, de son rêve étoilé. Après tout, une Sofia privilégiée pourra toujours s’en sortir. Elle peut très bien subir la toxicité et l’emprise d’une jeune femme qui n’a fait que tomber amoureuse dans un moment vulnérable de sa vie, non ?

Copyright Port au Prince Pictures / Kerttu Hakkaraine

Avec sa mise en scène basée sur le regard, Pulse avait tous les ingrédients pour être un thriller noir et pop des plus réussis. La réalité est un peu plus amère. La réalisatrice parle de relations toxiques d’une façon maladroite, avec à la clef une morale des plus douteuses.


Laura Enjolvy



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