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[CRITIQUE] : Tori et Lokita


Réalisateurs : Jean-Pierre et Luc Dardenne
Acteurs : Pablo Schils, Joely Mbundu, Alban Ukaj,...
Distributeur : Diaphana Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Belge, Français.
Durée : 1h28min.

Synopsis :
Le film est présenté en compétition au Festival de Cannes 2022.

Aujourd’hui en Belgique, un jeune garçon et une adolescente venus seuls d’Afrique opposent leur invincible amitié aux difficiles conditions de leur exil.



Critique :


C'est une certitude, même si leur longs ne sont pas toujours des millésimes à la qualité indiscutable, les frères Dardenne auront toujours leur petite invitation au sein de la compétition officielle du Festival de Cannes : la Croisette, c'est leur seconde maison et rien ou presque ne changera ça (depuis 96 et La Promesse, ils n'ont plus quittés les sélections), tant les vieilles habitudes ont la peau dur, et encore plus dans ce qui est considéré comme LA vraie maison du cinéma mondial.
Si Une Fille inconnue nous avait gentiment mis la puce à l'oreille quant à la qualité déclinante de leur mojo, Le Jeune Ahmed n'en était qu'une preuve encore plus probante, véritable sortie de route prenant pour prisme un sujet houleux et profondément casse-gueule - la radicalisation islamiste -, louable sur le papier (et encore) mais qui au final se prenait autant les pieds dans le tapis que L'Adieu à la Nuit de Téchiné.

Copyright Christine Plenus – Les Films du Fleuve

Tori et Lokita, qui se rêve comme une énième parabole profondément humaine de la vie en marge dans les banlieues difficiles belges, se prend tout autant les pellicules dans le tapis en épousant une noirceur déroutante, dénué de tout espoir pourtant si cher aux frangins cinéastes.
Quelque part entre Liège et la déchéance humaine la plus insondable, le film sonde l'enfer vécu par deux réfugiés, Tori et Lokita justement (leur tandem est la seule chose pure et touchante du film), obligés de vivre en marge d'une société qui n'a que faire d'eux , et engoncés à la fois sous la coupe d'un passeur chez qui ils se sont endettés, et d'un patron de restaurant pour qu'ils chantent autant qu'ils livrent de la drogue.
Ne poussant jamais leur chronique dramatique au-delà du sentier lisse et ronflant de la linéarité, ce nouvel effort manichéen as hell, ne se veut que comme une lente et inéluctable descente aux enfers sans nuance ni profondeur de deux mômes exploités jusqu'à l'usure, mettant à distance son auditoire via une narration aussi férocement épuré qu'une mise en scène frontale où aucune fioriture - pas même l'empathie - ne dépasse.
Plus dépouillé encore que Le Jeune Ahmed, curieux, apathique et plombé par un final furieusement opportuniste et indécent, Tori et Lokita joue pleinement la carte de la culpabilisation à outrance et rate tout du long le coche du drame poignant et fin espéré.
Rien d'une potentielle palme d'or.


Jonathan Chevrier