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[CRITIQUE] : Un talent en or massif


Réalisateur : Tom Gormican
Avec : Nicolas Cage, Pedro Pascal, Tiffany Haddish, Neil Patrick Harris, Sharon Horgan,…
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Action, Comédie, Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h48min

Synopsis :
Nicolas Cage est maintenant un acteur endetté qui attend le grand rôle qui relancera sa carrière. Pour rembourser une partie de ses dettes, son agent lui propose de se rendre à l’anniversaire d’un dangereux milliardaire qui se révèle être son plus grand fan. Mais le séjour prend une toute autre tournure, lorsque la CIA le contacte, lui demandant d’enquêter sur les activités criminelles de son hôte. Nicolas Cage va devoir jouer le rôle de sa vie et prouver qu’il est à la hauteur de sa propre légende.



Critique :


Ils sont rares les comédiens de la stature de Nicolas Cage à avoir mené une carrière si protéiforme et prolifique, nourrissant le plus outrancier des blockbusters comme le plus fauché des DTV avec la même énergie atypique, qu'elle serait presque impossible à définir en une poignée de mots - même bien choisis.
C'est une force autant qu'une faiblesse à une heure où l'on juge la qualité d'un talent dans l'immédiateté de ses choix artistiques (ah la culture de l'instant sur les réseaux sociaux...), même si Cage a toujours eu un cran d'avance sur tous ses petits camarades des bacs à DTV douteux - on vous juge Seagal et JCVD -, parce qu'il comprend parfaitement ce que veut le public, et comment le public veut le voir.
Même dans des divertissements douteux dans lesquels on ne peut jamais vraiment critiquer son investissement (fou mais vrai), il reste un interprète intelligent et réfléchi capitalisant totalement sur les attentes de son auditoire.

Copyright Metropolitan FilmExport

Et c'est là finalement qu'un projet tel que Un Talent en or massif, s'avère vissé sur une pente encore plus glissante que n'importe quel autre de ses films de récentes mémoires : comment rendre pertinent un film où Nicolas Cage incarne une version fictive de lui-même (nommé Nick Cage, avec un K), dans un méta-comédie sur la légende de Nic Cage - et l'homme derrière -, alors que le comédien lui-même a passé plus d'une décennie ou presque à jouer directement sur l'idée que se fait le public - surtout ses fans - se font de son identité (tu nous suis encore ?).
Force est d'admettre que le réalisateur Tom Gormican (et son co-scénariste Kevin Etten) n'a pas vraiment la réponse lui-même, et c'est ce qui fait clairement le charme, même dans ses limites évidentes, d'une expérience de cinéma à part, un véhicule parfait pour la folie génial de son monstrueux et complexe sujet vivant, aussi sensible à l'idée d'incarner un pur fantasme de fan que peut l'être la performance dantesque de Cage.
Le film démarre avec un Nic Cage se préparant pour une rencontre avec le réalisateur David Gordon Green, persuadé qu'avoir un rôle dans son dernier projet (ce qu'il n'aura finalement pas) reboostera sa carrière et le ramènera au sommet - bien qu'il ne reviendrait de nulle part, comme aime le souligner le scénario.
C'est un Cage qui a faim de travail et d'opportunités pour exploiter son amour sincère du théâtre et du cinéma, mais dont la personnalité publique le suit comme un inséparable boulet, lui coûtant une pléthore de rôles qu'il adorerait jouer.

Copyright Metropolitan FilmExport

Si ses mimiques et sa gamme de jeu gentiment outrancière ont construit un nombre astronomique de meme (peut-être même plus qu'il n'en a réellement conscience), sa maniaquerie ici est montré comme la représentation empathique d'une bête intérieure qui ne demande qu'à être libérée, d'une passion dévorante du septième art frappée par la melancolie déchirante d'un homme conscient que la carrière qu'il a mené n'est pas forcément celle qu'il aurait aimé entreprendre.
Sa lutte sincère pour récupérer son statut de star de cinéma qu'il avait autrefois nous ramène directement au documentaire Val centré sur le tout aussi génial Val Kilmer, qui regardait lui aussi avec amour - mais frontalement, pas par le bais d'une fiction méta - et une profonde tristesse la lente déchéance d'un comédien jadis adulé, qui a vécu dans le regret d'avoir été catalogué dans divers rôles simplistes, là où il a toujours demandé des rôles plus sérieux et stimulants.
La grande tragédie du film (libre au spectateur de la penser comme partiellement réelle ou totalement fictionnelle) est alors de voir Cage affronter frontalement et au quotidien, son propre personnage plus grand que nature (dont l'impact sur la culture populaire est démesurée) et pour lequel les spectateurs sont devenus fous d'amour (entre les blagues faciles sur ses mauvais films récents où la glorification de ses explorations dans le giron du cinéma d'action), alors qu'il regrette lui-même cette direction - au demeurant la plus glorieuse - dans sa carrière.

Copyright Metropolitan FilmExport

Et pour renforcer encore un peu plus ce petit bordel métaphysique organisé, parce que l'image publique même de Cage n'était pas suffisante, la narration lui offre justement une personnification barrée de cette dite image publique : un jeune Cage de l'ère Sailor et Lula, sorte de fantôme du passé du comédien qui incarne le petit diable assis sur son épaule, cette petite voix irritante qui remet tous ses choix en question.
Mais si l'attrait du film consiste bien dans le fait de simplement regarder Nicolas Cage agir comme et contre lui-même, fort heureusement, Un Talent en or massif propose néanmoins quelque chose de tout aussi surprenant et jouissif à se mettre sous la dent, tant il vogue savoureusement sur le terrain jouissif du buddy movie (voire même du film de potes volubile à la Richard Linklater) délicieusement hilarant, impliquant que Cage accepte, pour un joli chèque de 1 million de dollars, de se présenter à une fête d'anniversaire pour le milliardaire espagnol Javi Gutierrez (qui pourrait être ou non un marchand d'armes), tout en jouant les espions pour la CIA.
Le hic, c'est qu'il finit par tomber éperdument amoureux de Javi, et les deux deviennent les meilleurs amis du monde dans un vrai duo où le fan absolu de la star n'est ni toxique ni obsédé (même s'il a un étrange sanctuaire totalement voué à sa gloire), mais juste un homme honnête dans son admiration, voulant traîner et simplement parler de la vie - et du cinéma - avec son idole (et c'est ce Cage là, plus silencieux et cinéphile, qui se démarque le plus et incarne l'ajout le plus digne à son " mythe ").

Copyright Metropolitan FilmExport

S'il s'amuse beaucoup avec Cage et son héritage, sans jamais s'amuser au dépens de lui, autant qu'il ouvre constamment la porte pour que Pedro Pascal vole le show (parfaitement pertinent dans sa représentation du fan ultime que nous sommes tous un peu... bon beaucoup, et qui s'éclate comme un gosse en vivant pleinement son rêve); c'est finalement dans son dernier tiers que la péloche cafouille un brin, lorsqu'elle décide de bouffer sa propre part du gâteau qu'elle s'échine à parodier.
Après deux premiers tiers à se concentrer sur la personnalité publique de Nick Cage et comment cela affecte sa vie personnelle et sa carrière (où comment il ne fait que des DTV facile pour pouvoir produire et vendre des projets plus aux cinéphiles occasionnels), le film vire vers le même type d'actionner DTV-esque qu'il critique avec plus ou moins de férocité, avec des scènes d'action - très - mal emballées.
C'est en cherchant à prêcher à toutes les paroisses que Un Talent en or massif se perd parfois et pourtant, impossible de ne pas en ressortir avec une banane d'enfer tant il incarne un pur divertissement merveilleusement gonzo et passionné, une irrésistible bromance méta cathartiquement déglinguée qui se fait une odyssée nostalgique/lettre d'amour à toutes les facettes du passé de Cage, autant qu'une potentielle belle boussole pour son avenir, lui qui est enfin débarrassé de ses soucis économiques...


Jonathan Chevrier


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