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[COEURS D♡ARTICHAUTS] : #31. Bellflower

Copyright UFO Distribution

Parce que l'overdose des téléfilms de Noël avant même que décembre ne commence, couplé à une envie soudaine de plonger tête la première dans tout ce qui est feel good et régressif, nous a motivé plus que de raison à papoter de cinéma sirupeux et tout plein de guimauve; la Fucking Team vient de créer une nouvelle section : #CoeursdArtichauts, une section ou on parlera évidemment de films/téléfilms romantiques, et de l'amour avec un grand A, dans ce qu'il a de plus beau, facile, kitsch et même parfois un peu tragique.
Parce qu'on a tous besoin d'amour pendant les fêtes (non surtout de chocolat, de bouffe et d'alcool), et même toute l'année, préparez votre mug de chocolat chaud, votre petite (bon grande) assiette de cookies et venez rechauffer vos petits coeurs de cinéphiles fragiles avec nous !


#31. Bellflower d'Evan Glodell (2011)

Bellflower ou l'histoire d'un homme, Evan Glodell, fan de cinéma qui à force d'une volonté et d'une débrouillardise incroyables, arrivera in fine à réaliser le rêve de tout wannabe cinéaste : mettre en boîte un long-métrage.
Prenant comme point d'appui une tragédie intime et universelle - une douloureuse rupture amoureuse -, tellement marquante qu'il la couchera sur papier en à peine quelques semaines (un premier jet dévastateur et scindé en deux parties : la première s'attachant aux petites choses insignifiantes qui font le charme de la vie en couple, la seconde s'apparente à l'enfer de la rupture), Glodell s'échinera pendant près de quatre ans pour dégoter un tant soit peu de financements - non sans de multiples réécritures - avant de craquer et de se lancer dans le grand bain de l'auto-production, avec une poignée d'amis (une équipe réduite de onze personnes aux multiples casquettes).

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Trois ans plus tard, et avec un budget riquiqui de 17 000 $ (un chiffre trompeur selon le réalisateur lui-même, tant ils n'ont jamais réellement eu cette somme en poche sur les trois ans), Glodell, véritable homme-orchestre qui a mouillé la chemise plus que de raison (il a, à la fois, porté la casquette de réalisateur, scénariste, co-producteur, co-monteur, et acteur principal, le tout en créant lui-même ses propres caméras !), aura accouché d'un pur film d'auteur singulier, un voyage incroyable entre rêves innocents et cauchemars réalistes, aussi intense que profondément touchant.
Bellflower ou le journal intime de Woodrow et de son pote Aiden, deux jeunes adultes tellement obsédés par Mad Max II de papy Miller, qu'ils construiront eux-même leur propre Interceptor, et s'inventeront même un gang  appelé " Mother Medusa ".
Une obsession totale pour l’œuvre SF apocalyptique qui les persuaderont intimement que notre apocalypse à tous, est bel et bien proche.
Le monde imaginaire qu'ils se sont façonnés, loin des responsabilités (ils passent leur temps à faire mumuse avec un lance-flamme fait maison et une muscle car) sera pourtant vite mis à mal par la réalité des sentiments amoureux de chacun des deux hommes, surtout ceux de Woodrow.
Une prise de conscience brutale, qui ravagera peu à peu le jeune homme, trahie par la femme qu'il aime, Milly, qui s'enverra en l'air dans son propre pieu, avec son ex-colocataire (dont on soupçonne dès le départ qu'il a des vues sur elle).

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Un amour fragile qui volera en éclats et qui confrontera le héros à des pulsions autodestructrices qu'il n'avait encore jamais connu jusqu'ici...
Car l'apocalypse " Mad Max-ienne " attendue par les personnages, n'aura lieu que dans leur spropres vies, dans leur coeur, dans un final horrifique aux allures de point de non-retour (imaginaire ou réel ?) complétement fou et infiniment poignant.
Magnifiquement écrit, puissant et carrément attachant parce qu'il sent inéluctablement le vécu (vécu de Glodell mais aussi de tous car finalement, qui n'a jamais eu envie de tout foutre en l'air après une déception amoureuse ?), le métrage est un trip mentale et visuel tout simplement incroyable, démontrant combien une rupture somme toute banale, peu provoquer un chaos sentimental aux conséquences dévastatrices.
Infiniment personnel, naïf et imprévisible, la réussite du métrage tient surtout en la parfaite dévotion de son artisan créateur, Evan Glodell, aussi bien devant (il irradie le film de sa présence à la fois innocente et torturée) que derrière la caméra (c'est un surdoué bricolo dans l'âme).

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Dans un univers loin d'être paradisiaque, un L.A déglamourisé et étouffant ou la chaleur y est incandescente, comme si le soleil allait engloutir le monde (autre parallèle à l'apocalypse), la péloche emprisonne ses personnages tout comme le spectateur dans un no man's land sombre ou seul le pardon ou la fuite, peut être salvatrice.
Une expérience intime personnelle, sincère et singulière comme on n'en voit que trop peu, même dans le giron passionnant du cinéma indépendant ricain.


Jonathan Chevrier