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[CRITIQUE] : Sans Aucun Remords


Réalisateur : Stefano Sollima
Acteurs : Michael B. Jordan, Jamie Bell, Jodie Turner-Smith, Guy Pearce,...
Distributeur : Amazon Prime Video France
Budget : -
Genre : Action, Thriller, Espionnage.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h50min.

Synopsis :
Dans Sans aucun remords, les fans de la saga pourront découvrir les origines du héros John Clark - l'un des personnages les plus populaires de l'univers de Tom Clancy. Un marine des forces spéciales découvre une conspiration internationale alors qu’il cherche à obtenir justice pour le meurtre de sa femme enceinte. Lorsque des soldats russes tuent sa famille en représailles de son implication dans une opération secrète, le Chef John Kelly poursuit les assassins à tout prix. En rejoignant les forces de la marine de guerre américaine aux côtés d’un confrère et d’un mystérieux agent de la CIA, la mission de Kelly révèle involontairement un complot secret qui menace d'entraîner les États-Unis et la Russie dans une guerre totale. Tiraillé entre honneur et loyauté envers son pays, Kelly doit combattre ses ennemis sans aucun remords s’il souhaite éviter le désastre et révéler les puissants derrière le complot.



Critique :


Il y a un paradoxe assez exceptionnel - mais pas fondamentalement désagréable cependant - dans le fait que si la politique des oeuvres de Tom Clancy n'a jamais quitté les 80s, leurs adaptations n'ont elles jamais vraiment su quitter leur facture furieusement 90s, même quand elles ne furent pas tournés durant cette décennie bénie (sans doute parce que le gros boom des thrillers d'espionnage est parti du brillant The Hunt for Red October de John McTiernan, en 90).
Si Jack Ryan, le personnage le plus populaire de l'oeuvre de Clancy, avait toujours su trouver le chemin des salles obscures et des écrans de télévisions au fil des ans (un comble quand on sait qu'il ne fonctionne jamais aussi bien qu'en tant que technocrate et non en tant qu'action man), John Clark, l’autre protagoniste récurrent de l'écrivain et plus adepte aux sensations fortes et à la castagne dans les bouquins, n'a jamais vraiment réussi à alerter les sirènes d'Hollywood (Keanu Reeves, Gary Sinise mais surtout Tom Tardy, étaient longtemps rattachés au personnage)... jusqu'à aujourd'hui donc, avec un trio Stefano Sollima/Taylor Sheridan/Michael B. Jordan à sa tête.

Copyright 2020 Paramount Pictures

Cantonné à Amazon Prime alors qu'il était un temps prévu en salles (Damn you Paramount...), et incarnant plus ou moins une mise à jour made in 21ème siècle (avec la Syrie remplaçant une histoire d'origine enracinée au Vietnam) pour mieux coller aux canons du thriller moderne, Sans Aucun Remords, aussi intemporel soit-il finalement, est pourtant furieusement ancré dans les valeurs géopolitiques désuètes des années 90 (avec une vraie passion pour le cinoche burné et rentre-dedans des 70s), et incarne un actionner décomplexé et relax qui transpire la sincérité et l'énergie.
Un bout de cinéma qui dépote et assume tellement d'épouser avec gourmandise tous les tropes du genre, qu'il en devient joliment bis - dans le bon sens du terme.
S'ouvrant sur une opération clandestine des Navy SEALs en Syrie, le film présente la même violence généreuse et sans fioritures qui a fait de la précédente collaboration du réalisateur Stefano Sollima avec le scénariste Taylor Sheridan - le brillant Sicario : La Guerre des Cartels - un pur plaisir jamais coupable percutant et nihiliste; en posant sa narration sur le plus stoïque et dur à cuire d'une équipe des Navy SEALs, John Kelly - qui adoptera plus tard le surnom de Clark -, dont le travail nébuleux pour la CIA est supervisé par l'ambiguë Ritter.
Au début, il assure aux SEAL qu'ils sont en Syrie pour tuer des voyous syriens - logique -, mais lorsque les balles finissent de voler, des espions russes apparaissent dans le décompte des corps.
De retour à la maison et tentant de mener une vie normal avec sa femme Pam et un bébé en route, Kelly trouve un nouvel emploi mais ces rêves de normalité sont cependant anéantis lorsque les forces spéciales russes pénètrent chez lui, tuent sa femme enceinte et le laisse pour mort.

Copyright 2020 Paramount Pictures

Les services de renseignement américains considèrent la mort de sa femme comme l'un des risques du métier (sic), mais le bonhomme s'en bat la rondelle des jeux d’espionnage de la CIA, et il brutalisera/torturera/liquidera très vite tout agent russe sur lequel il peut mettre la main dans l’espoir d'assouvir sa vengeance et de retrouver l’homme qui a tué sa femme...
Écrit par un Taylor Sheridan à la plume résolument plus légère qu'à l'accoutumée (même si sa sensibilité politique un poil - vraiment un poil - tissée ici rappelle celle de ses précédents travaux, même s'il ne se fatigue pas à masquer très longtemps les ressorts de son complot), tant son cynisme semble ici totalement et uniquement ancré dans son désir de donner une action la plus mordante possible, Without Remorse est un revenge movie dans la plus stricte tradition du genre ou le sang ne peut cesser de couler; une odyssée barbare ou la violence intérieure d'un homme vertueux à qui l'on arrache ce qu'il a de plus cher et le cataclysmique désir de vengeance qui en découle, est le moteur indéboulonnable du récit.
Reprenant les figures imposés du genre tout en intronisant un Michael B. Jordan " Rambo-esque " en vrai action man déchaîné (et non, le parallèle avec la physicalité et l'intensité du jeu de Stallone via Rambo est loin d'être anodine, tout comme celle entre son Adonis et Sly sur la franchise Creed et son futur troisième opus), constamment boosté par la mise en scène inventive de Solima (qui apporte une vraie sensation viscérale à l'action, avec une esthétique volontairement granuleuse); la péloche est un divertissement à l'approche qui met en avant l'impact et l'immédiateté de son action, soit quelque chose de profondément rafraîchissant dans un paysage cinématographique actuelle très (bon beaucoup trop) super-héroïsé.

Copyright 2020 Paramount Pictures

Gageons qu'il se heurtera sans doute aux foudres de la presse boboisante à l'amalgame facile (au moins autant que la caricature poussive et l'autosuffisance irritante), qui le taxeront de bande puéril - voire même rétrograde et faciste -; mais les vrais amoureux de séries B reconnaîtront en lui un petit coup de fouet à un genre en désuétude, aussi efficace qu'un bon coup de burin dans les valseuses.
Imaginez s'il avait arboré non pas les coutures d'un actionner 90s, mais bien d'un bon gros vigilant flick des 70s/80s...


Jonathan Chevrier