[CRITIQUE] : Eden
Réalisatrice : Agnes Kocsis
Avec : Lana Baric, Róbert Kardos, Zalán Makranczi,...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Hongrois, Roumain.
Durée : 2h33min
Synopsis :
Une femme est allergique à tout et doit vivre en totale isolation.
Critique :
Cousin hongrois du beau Safe de Todd Haynes, avec son héroïne souffrant d'une maladie environnementale qui la coupe du monde,#Eden est un joli drame vibrant et contemplatif qui questionne habilement combien de temps quelqu'un peut supporter d'être éloigné du reste de l'existence pic.twitter.com/wuhGZ9yC44
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) April 3, 2021
Avec son pitch contant le trauma d'une femme qui est frappée par des réactions allergiques potentiellement mortelles qui la coupe monde qui l'entoure, Eden d'Agnès Kocsis (passé par la Croisette avec ses deux premiers longs, Fresh Air et Pal Adrienn) à des faux airs de cousin hongrois du fantastique Safe de Todd Haynes, d'autant plus que leurs similitudes vont bien plus loin que leurs prémisses résolument similaires.
Mais la vision de Kocsis se démarque très vite de celle du papa de Carol tant elle consacre l'essentiel de son attention sur la solitude et à la douleur qui gangrène une vie sans la moindre véritable connexion avec autrui.
Avec sincérité et authenticité, le film retrace la bataille intime et hostile que mène au quotidien Eva (formidable Lana Baric), pour prouver aux yeux du monde que son hypersensibilité est bien réelle et non une fantaisie de son esprit, ainsi que ses efforts colossaux autant pour gérer les maux de sa maladie grave, que sa lutte pour faire face à la dureté d'être coupé du monde.
MYTHBERG FILMS |
Prenant - involontairement - une ampleur toute particulière avec la pandémie actuelle du Covid-19 (ce qui rend l'emprisonnement forcé de l'héroïne, et le fait qu'elle soit malade d'être coincée en ses propres quatre murs, encore plus palpable), d'autant plus vu la puissance de son cadre (Sarajevo, dont le poids de son histoire ne fait qu'intensifier la pertinence de ce choix), s'offrant des faux airs science-fictionnels salutaires avec une économie de moyen (la combinaison spatiale porté par Eva lorsqu'elle s'aventure à l'extérieur de sa maison, les tests invasifs qu'elle fait,...) et d'effets maîtrisés (une mise en scène alignant les plans larges et persistants, une photographie froide et gris-bleu de Mate Toth Widamon, un production design astucieux et presque futuriste de Petra Vinnai); Eden, avec son monde familier rendu étranger et hostile, questionne habilement combien de temps quelqu'un peut supporter d'être si éloigné du reste de l'existence.
Tragédie vibrante et contemplative sur âme habituée à être considérée comme différente (mais constamment rappelée par ce dit monde qu'elle ne peut arborer sainement et simplement), traitant autant de la maladie que de notre déconnexion face à la nature - et plus directement, la dépendance de l'humanité à la technologie -; le film pourra en désarçonner plus d'un avec sa lenteur assumée (surtout sur deux heures trente bien tassées), mais saura récompenser par sa richesse, son spectateur le plus tenace.
Jonathan Chevrier