[TOUCHE PAS NON PLUS À MES 90ϟs] : #114. Un air de famille
Nous sommes tous un peu nostalgique de ce que l'on considère, parfois à raison, comme l'une des plus plaisantes époques de l'industrie cinématographique : le cinéma béni des 90's, avec ses petits bijoux, ses séries B burnées et ses savoureux (si...) nanars.
Une époque de tous les possibles où les héros étaient des humains qui ne se balladaient pas tous en collants, qui ne réalisaient pas leurs prouesses à coups d'effets spéciaux et de fonds verts, une époque où les petits studios venaient jouer dans la même cour que les grosses majors légendaires, où les enfants et l'imaginaire avaient leurs mots à dire,...
Bref, les 90's c'était bien, tout comme les 90's, voilà pourquoi on se fait le petit plaisir de créer une section où l'on ne parle QUE de ça et ce, sans la moindre modération.
Alors attachez bien vos ceintures, prenez votre ticket magique, votre spray anti-Dinos et la pillule rouge de Morpheus : on se replonge illico dans les années 90 !
#114. Un air de famille de Cédric Klapisch (1996)
Savoir que le tandem Jaoui-Bacri ne pourra plus jamais nous offrir de comédie chorale est une vérité que nous mettront beaucoup de temps à accepter, d'autant plus que la tristesse de la disparition du second, toujours imposante, risque de laisser un trou béant bien plus important que beaucoup s'accorderont à le penser, au coeur d'une comédie dramatique hexagonale déjà loin d'être au zénith de sa forme.
Reste donc alors aux cinéphiles de se remémorer aux bons souvenirs de leurs essais passés, tels des totems dont on ne pourrait plus jamais se lasser de leurs visions, avec leur résonance nouvelle furieusement mélancolique.
Sans doute leur plus bel effort sur le papier - avec Le Goût des Autres, qu'ils ont eux-mêmes chapeautés derrière la caméra -, Un air de famille, seconde transposition d'un de leur succès sur les planches après Cuisine et dépendances, dont ils ont totalement retenus les petites erreurs puisqu'ils ont laissé cette fois sa direction à Cédric Klapisch (qui venait à peine de boucler le tournage du plus personnel Chacun cherche son chat.
Un Air de Famille donc, ou une plongée fantastique au coeur d’une famille comme les autres, les Ménard, au bord de la crise de nerfs et de l’essoufflement général dans un cadre sinistre et encore plus morose que leurs interactions - un bistrot tombant en décrépitude dans une banlieue grisâtre et fatiguée, semblant encore coincée dans les 70's
Chacun étant à sa place et à sa caricature facile - mais si familière pour nous tous - en bandoulière (on ne les découvre qu'à l'instant T, ce qui n'empêche pas un attachement voire même une certaine empathie), de la matriarche chieuse sur les bords (et même au centre) au fils préféré ambitieux et suffisant, en passant par le (faux) bon à rien râleur et la cruche de service.
Mais tout va gentiment imploser à la suite d'un anniversaire qui va troubler leurs habitudes, un prétexte futile qui les amène à se lâcher entre déballage de non-dits et engueulades gratinées...
Pure comédie familiale aussi hilarante que monstrueusement déprimante, dont la théâtralité et le quasi-huis clos qu'elle incarne (le fameux bar est véritablement un personnage à part entière du film), est constamment contrebalancée par des flashbacks malins et salvateurs, la péloche fait constamment preuve d'une subtilité à toute épreuve, usant d'un humour vache et (très) noir aux petits oignons (les scènes cultes sont légion, dont la fameuse séquence du collier avec la pauvre Yolande/Catherine Frot), agrémenté de dialogues ciselés et de sailies assassines assénées avec gourmandise par un casting totalement voué à sa cause (et absolument parfait), pointant du bout de la pellicule que l'air de cette famille démantelée, est encore plus pollué que celui de notre chère capitale.
Un cinéma affûté dans son discours mordant (même si toujours un poil trop moraliste " Jabac "), le vrai seul défaut du couple sur la (notre) société et sur le visage de la France profonde, tiraillé par les maux intimes, la fracture sociale et les faux-semblants d'une poignée de personnages jamais vraiment bons, jamais totalement mauvais, devant faire face à la dure réalité : que l'on soit en haut ou en bas de l'échelle sociale, on est tous logés à la même enseigne pour être frappé par les désillusions de la vie.
Le genre de comédies qui manquent dans le septième art hexagonal actuel et qui, put*** de tragédie du destin, le sera encore plus demain sans Bacri pour la faire (re)vivre.
Jonathan Chevrier
Une époque de tous les possibles où les héros étaient des humains qui ne se balladaient pas tous en collants, qui ne réalisaient pas leurs prouesses à coups d'effets spéciaux et de fonds verts, une époque où les petits studios venaient jouer dans la même cour que les grosses majors légendaires, où les enfants et l'imaginaire avaient leurs mots à dire,...
Bref, les 90's c'était bien, tout comme les 90's, voilà pourquoi on se fait le petit plaisir de créer une section où l'on ne parle QUE de ça et ce, sans la moindre modération.
Alors attachez bien vos ceintures, prenez votre ticket magique, votre spray anti-Dinos et la pillule rouge de Morpheus : on se replonge illico dans les années 90 !
#114. Un air de famille de Cédric Klapisch (1996)
Savoir que le tandem Jaoui-Bacri ne pourra plus jamais nous offrir de comédie chorale est une vérité que nous mettront beaucoup de temps à accepter, d'autant plus que la tristesse de la disparition du second, toujours imposante, risque de laisser un trou béant bien plus important que beaucoup s'accorderont à le penser, au coeur d'une comédie dramatique hexagonale déjà loin d'être au zénith de sa forme.
Reste donc alors aux cinéphiles de se remémorer aux bons souvenirs de leurs essais passés, tels des totems dont on ne pourrait plus jamais se lasser de leurs visions, avec leur résonance nouvelle furieusement mélancolique.
Sans doute leur plus bel effort sur le papier - avec Le Goût des Autres, qu'ils ont eux-mêmes chapeautés derrière la caméra -, Un air de famille, seconde transposition d'un de leur succès sur les planches après Cuisine et dépendances, dont ils ont totalement retenus les petites erreurs puisqu'ils ont laissé cette fois sa direction à Cédric Klapisch (qui venait à peine de boucler le tournage du plus personnel Chacun cherche son chat.
Bac Films |
Un Air de Famille donc, ou une plongée fantastique au coeur d’une famille comme les autres, les Ménard, au bord de la crise de nerfs et de l’essoufflement général dans un cadre sinistre et encore plus morose que leurs interactions - un bistrot tombant en décrépitude dans une banlieue grisâtre et fatiguée, semblant encore coincée dans les 70's
Chacun étant à sa place et à sa caricature facile - mais si familière pour nous tous - en bandoulière (on ne les découvre qu'à l'instant T, ce qui n'empêche pas un attachement voire même une certaine empathie), de la matriarche chieuse sur les bords (et même au centre) au fils préféré ambitieux et suffisant, en passant par le (faux) bon à rien râleur et la cruche de service.
Mais tout va gentiment imploser à la suite d'un anniversaire qui va troubler leurs habitudes, un prétexte futile qui les amène à se lâcher entre déballage de non-dits et engueulades gratinées...
Pure comédie familiale aussi hilarante que monstrueusement déprimante, dont la théâtralité et le quasi-huis clos qu'elle incarne (le fameux bar est véritablement un personnage à part entière du film), est constamment contrebalancée par des flashbacks malins et salvateurs, la péloche fait constamment preuve d'une subtilité à toute épreuve, usant d'un humour vache et (très) noir aux petits oignons (les scènes cultes sont légion, dont la fameuse séquence du collier avec la pauvre Yolande/Catherine Frot), agrémenté de dialogues ciselés et de sailies assassines assénées avec gourmandise par un casting totalement voué à sa cause (et absolument parfait), pointant du bout de la pellicule que l'air de cette famille démantelée, est encore plus pollué que celui de notre chère capitale.
Bac Films |
Un cinéma affûté dans son discours mordant (même si toujours un poil trop moraliste " Jabac "), le vrai seul défaut du couple sur la (notre) société et sur le visage de la France profonde, tiraillé par les maux intimes, la fracture sociale et les faux-semblants d'une poignée de personnages jamais vraiment bons, jamais totalement mauvais, devant faire face à la dure réalité : que l'on soit en haut ou en bas de l'échelle sociale, on est tous logés à la même enseigne pour être frappé par les désillusions de la vie.
Le genre de comédies qui manquent dans le septième art hexagonal actuel et qui, put*** de tragédie du destin, le sera encore plus demain sans Bacri pour la faire (re)vivre.
Jonathan Chevrier