[Y-A-QUOI A LA TELE CETTE SEMAINE ?] : #115. Semaine du 22 au 28 novembre 2020
Chaque semaine je continue à faire — pour vous — le tour des programmes TV en extirpant de tout cela une offre cinématographique autour de trois œuvres. Mais, je vais aussi vous proposer des contre-programmations ainsi que des secondes parties de soirée pour les cinéphiles insomniaques.
Semaine du 22 Novembre au 28 Novembre
Dimanche 22 Novembre. L’Echange de Clint Eastwood sur Arte.
Los Angeles, 1928. Un matin, Christine dit au revoir à son fils Walter et part au travail. Quand elle rentre à la maison, celui-ci a disparu. Une recherche effrénée s’ensuit et, quelques mois plus tard, un garçon de neuf ans affirmant être Walter lui est restitué. Christine le ramène chez elle mais au fond d’elle, elle sait qu’il n’est pas son fils...
Les premières images sont trompeuses. La mise en scène élégante, la splendeur des décors jusqu’à la minutie des costumes semble indiquer un classicisme eastwoodien. Pourtant, tout vient s’évapore quand L’Echange vient faire émerger sa rugosité. En un certain sens, il y a dans L’Echange du Mystic River, dans cette volonté du cinéaste d’aller fouiller chaque recoin de l’humain pour en faire ressortir une noirceur que Eastwood redonne à son spectateur avec pragmatisme. Du fait-divers à la procédure tout n’est que mutation dans L’Echange; et les traumatismes ne cessent de s’enchainer pour construire une œuvre qui vient sonder les tripes de l’humanité et semble définir cet Eastwood en pleine mutation, à la fois totalement fidèle à lui-même et pourtant plongeant sans apnée dans la noirceur.
Mais aussi... TFX propose Gravity de Alfonso Cuaron. Un exercice filmique, celui qui s’amuse a repousser les possibles pour offrir à son spectateur une expérience inédite. Cuaron actionne un pur moment de cinéma, celui comparable a un grand huit qui secoue le spectateur de haut en bas, de droite à gauche. Mais, Gravity, se gorge d’une donnée essentielle : l’humain. Car, c’est bel et bien, à la fin, et tout du long, le portrait de cette femme, meurtrie en elle, qui va lutter pour non pas survivre, mais bien, comme l’explicite le sublime plan de fin, renaitre. Poignant et universel.
Jeudi 26 Novembre. Gone Girl de David Fincher sur France 3.
À l’occasion de son cinquième anniversaire de mariage, Nick Dunne signale la disparition de sa femme, Amy. Sous la pression de la police et l’affolement des médias, l’image du couple modèle commence à s’effriter. Très vite, les mensonges de Nick et son étrange comportement amènent tout le monde à se poser la même question : a-t-il tué sa femme ?
Hasard des calendriers ? Les chaines françaises dégainent quelques œuvres de la filmographie de Fincher, comme pour se remettre à niveau avant Mank en décembre sur Netflix. Après Zodiac et Panic Room, France 3 diffuse le dernier long-métrage du cinéaste, le bluffant Gone Girl. Un film, qui derrière l’apparence du thriller, cacher une autopsie sinistre du mariage. Les apparences étaient l’un des thèmes pivots de ce film qui permet à Fincher de tendre un miroir sur son propre métier. Le réalisateur manipule l’image afin de faire voir au spectateur ce qu’il veut lui montrer, Fincher c’est Amy, nous mentant pour mieux nous surprendre et nous laisser bouche bée.
Mais aussi... C8 programme La Folle Histoire de Max et Leon de Jonathan Barré. Premier essai cinématographique du Palmashow, où Grégoire Ludig et David Marsais tentent — comme beaucoup avant eux, le passage délicat entre télévision et cinéma. Pour l’occasion, ils renouent avec un genre un tantinet désuet, la comédie de guerre. Jouant la carte de l’hommage aux comédies types La Grande Vadrouille, le film parvient à s’extirper de ces influences écrasantes en s’imbibant de la patte du duo comique. Des répliques jonchées de jeu de mot et références à la pop culture aux situations aussi absurdes que burlesques, ce premier essai est un petit régal.
Vendredi 27 Novembre. Slumdog Millionaire de Danny Boyle sur Cherie25.
La vie de Jamal Malik bascule sur le plateau de « Qui veut gagner des millions ? », devant des millions d’Inde, ce gamin des bidonvilles remporte le pactole et peut en remporter encore plus le lendemain. Le charismatique présentateur du jeu le fait accuser de tricherie. Voilà Jamal expliquant pourquoi il connaissait les réponses et se replongeant dans sa vie misérable…
Cinéaste aux visuels très affirmés, Slumdog Millionaire ne déroge pas à la règle. Danny Boyle embarque le spectateur avec sa caméra survoltée dans un univers riche en couleurs qui met en image un récit qui se déchaine grâce à l’efficacité de son montage. Aussi trépidant que violent, le long-métrage capte une Inde en pleine mutation et contradiction. C’est ici que vient naitre cette histoire en forme de fable caléidoscopique, qui s’épanouit autant dans des instants d’humour, mais aussi des beaux élans romanesques et la tragédie qui la traverse. Dans ce spectacle total, c’est bel et bien le casting qui nous happe dont la révélation Dev Patel, mais surtout ces deux gamins saisissants.
Thibaut Ciavarella