[CRITIQUE] : Le Gang Kelly
Réalisateur : Justin Kurzel
Avec : George MacKay, Russell Crowe, Nicholas Hoult, Charlie Hunnam,….
Distributeur : Metropolitan FilmExport.
Budget : -
Genre : Western, Drame, Biopic, Action
Nationalité : Australien, Français, Britannique.
Durée : 2h05min.
Synopsis :
En Australie, certains le considèrent comme un criminel, d’autres comme un héros révolutionnaire. Dans le bush, Ned Kelly est une figure historique. Il incarne le symbole de la lutte contre le gouvernement britannique à une époque perturbée où ce continent rude et sauvage gagnait peu à peu son indépendance. Découvrez l’épopée de Kelly et de son gang de bushrangers qui ont à la fois fait régner la terreur et allumé une lueur d’espoir chez ceux qui n’avaient rien.
Critique :
Aussi brillant et hypnotique qu'il peut parfois paraître un poil redondant voire éreintant, #LeGangKelly n'en reste pas moins un étrange western historique dans l'outback australien, un uppercut de sang et de poussière aux graphismes impressionnants et à l'impact émotionnel réel. pic.twitter.com/CMQ01yMiaF
— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) November 17, 2020
Justin Kurzel nous avait laissé avec une furieuse impression de gâchis, via son adaptation sévèrement faisandé du monument vidéoludique Assassin's Creed, un incident industriel si ce n'est embarrassant, au moins totalement indigne des belles promesses engagées avec sa relecture bouillante du mythe Macbeth de Shakespeare.
Bien plus proche de ce celui-ci que du blockbuster qui l'a suivi, True History of The Kelly Gang son dernier long, qui a tellement tardé à débarquer dans les salles qu'il a finalement terminé en catimini dans un combo VOD/bacs à DVD et Blu-ray férocement réducteur, relève sensiblement la barre et nous rappelle que l'Australien n'est définitivement pas le réalisateur d'une simple réussite.
Adapté du roman éponyme de Peter Carey, Kurzel offre un contrepoint féroce à la légende de Ned Kelly avec une odyssée brutale et (très) violente, sorte d'objet punk et anarchique imperturbable flanqué au coeur de terres australiennes désolées et apocalyptiques.
Montrant Kelly comme un Jesse James rock'n'roll d'Australie, tout subvertissant sa légende en exposant un contexte intime entre dysfonctionnement et abus (masculinité et maternité toxique à la clé), le cinéaste fait du personnage le coeur de son histoire, un récit épisodique semi-réaliste de tout ce qui faisait la complicité de son être, ou son âme trouble se voit décortiquer bien plus que les activités conventionnelles de son gang de hors-la-loi (à l'ambiguïté sexuelle réelle dans leur rapport au travestissement pour étonner et effrayer l'ennemi).
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Complètement sous l'emprise de sa mère passionnée Ellen, tout en ressentant un ressentiment dévastateur du fait qu'elle l'ait «vendu» enfant au criminel Harry Power, figure tutélaire qui lui a appris toutes les leçons du parfait hors-la-loi cruel et implacable.
Un enchaînement de séquences bordéliques mais captivantes comme un songe fébrile et hypnotique (on sait que Kurzel n'a jamais peur de se complaire dans l'inconfort), qui dessineront les grandes lignes la vocation de criminel et d'insurrection paramilitaire de Kelly contre les Britanniques, dont l'ultime confrontation est un cauchemar stroboscopique et hallucinatoire, citant directement la folie visuelle de Macbeth.
Exigeant (mais bizarrement accessible) tout en étant extenuant, aussi brillant qu'il peut parfois paraître redondant voire trop ambitieux, pour maintenir narrativement la cadence face à sujet qui nécessiterait plus d'un long pour être pleinement exploité (ou plus de maîtrise, notamment dans son ventre mou en milieu de parcours), Le Gang Kelly - titre expéditif en VF - n'en reste pas moins un intriguant western dans l'outback australien, un uppercut de sang et de poussière aux graphismes impressionnants et à l'impact émotionnel réel.
Que Kurzel continue dans cette voie singulière, elle lui sied bien mieux que celle des blockbusters calibrés.
Jonathan Chevrier