[FESTIVAL] : 27ème édition du Festival du Film Fantastique de Gérardmer
Du 29 janvier au 2 février 2020.
Grand moment dans la vie d’un cinéphile que son premier séjour dans un festival renommé de cinéma. Et quel meilleur choix pour faire ses premières armes que le 27ème festival international du film fantastique de Gérardmer ? C’est en tout cas ici que mon choix s’est porté, dans cette petite ville des Vosges qui accueille tous les ans des festivaliers passionnés de films de genre venus de toute la France pour communier ensemble autour de cette passion commune. Et me voilà revenu la tête pleine de films variés aussi bien dans leurs thèmes que dans leur qualité, prêt à vous parler de la sélection de cette année, et peut-être même plus si affinité.
Dans les griffes du cinéma français
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Chaque année, le festival organise une rétrospective hommage à un cinéaste ou un acteur qui a marqué le genre de son empreinte, et cette année le morceau choisis était plutôt énorme puisqu’il a été choisi de rendre hommage au film de genre français dans son ensemble. Vaste sujet, et la possibilité pour nous de découvrir ou redécouvrir en salle des films qui de par leur seule existence invalide l’affirmation fausse mais tellement répandu qu’on ne sait pas faire de genre en France. Si je n’ai évidemment pas pu voir les 17 films de la sélection, j’ai tout de même été en mesure de faire deux jolies découvertes. Avec Les Particules, premier long métrage de Blaise Harrison sorti l’année dernière et qui souffre de vrai problème de rythme, mais est animé par une poésie du réel adolescent imbibé d’une légère touche de science-fiction plutôt engageante ; et Blueberry : l’expérience secrète de Jan Kounen un western complètement onirique assez fascinant dont les effets numériques vieillissants n’entachent pas l’effet psychotrope, bien au contraire ils auraient tendance à y contribuer.
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Mais c’était surtout l’occasion de revoir dans les meilleurs conditions trois films extrêmement chers à mon cœur avec pour commencer, Le Pacte des Loups de Christophe Gans. Patchwork de genre jouissif qui convoque aussi bien le western que le film d’horreur, aussi bien le film d’époque en costume que le film d’art martiaux, une œuvre incroyable dont la seule existence me fascine et communique un amour du cinéma sans bornes. J’ai également pu revoir l’inénarrable Calvaire de Fabrice du Welz, premier film de sa trilogie des ardennaise qu’il vient de conclure avec le merveilleux Adoration (toujours en salle, foncez le voir) et c’est peut-être pas le film que tu as le plus envie de revoir à 9h du matin parce que ça remue un petit peu l’estomac mais c’est un chef d’œuvre que je n’aurais manqué pour rien au monde.
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Et enfin, le dernier mais non le moindre, Haute Tension d’Alexandre Aja. Possiblement le film d’horreur français le plus culte d’entre tous, et pour cause : c’est une véritable débauche d’effets visuels gore d’une violence rare, qui servent une intrigue toute simple mais d’une efficacité folle, incarné par un trio d’actrices/acteurs démentiel (Cécile de France, Maïwenn, et Philippe Nahon). C’est ce film qui, quand je me suis intéressé à l’horreur made in France il y a quelques années, m’a provoqué le déclic de me dire que non seulement on avait un savoir-faire dans ce domaine mais également un petit supplément d’âme, qui peut manquer dans certaines productions horrifiques trop calibrés.
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Le point d’orgue de cette rétrospective s’est tenu samedi soir, avec la présence sur scène d’une véritable nuée de réalisateur et réalisatrice français ayant œuvré dans le genre, qui pour beaucoup ont vu leurs films présenté dans le cadre de la rétrospective. Et voir tout ce beau monde réuni, ça fait très chaud dans mon petit cœur de cinéphile.
Je n’ai malheureusement pas pu voir tout ce que j’aurais aimé, Revenge et À l’intérieur par exemple était deux films que j’aurais adoré revoir en salle, mais la sélection du festival était prioritaire. Et parlons-en de cette sélection.
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Sélection Officielle
Film d’ouverture : Quoi de mieux qu’une comédie horrifique turbo-débile aux allures de teen movie bien saturé d’hormones pour commencer la sélection ? Probablement plein de trucs, mais c’est ce qu’on a eu avec Snatchers.
Pas mal de longueurs au milieu et des effets de montage qui font plus penser à un film amateur sur youtube qu’un film de compétition en festival, le film rempli sa fonction d’apéritif assez efficacement en offrant un divertissement vulgaire et potache comme il faut, tout en étant quand même relativement lisse et oubliable.
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JOUR 1 : Répertoire des villes disparues est sans aucun doute le concurrent qui s’est retrouvé dernier lors du comptage des voix pour le prix du publique. Seul film de la sélection à avoir récolté quelques huées passant au-dessus des maigres applaudissements de spectateurs encore somnolant, c’est une œuvre d’une monotonie extrêmement contagieuse, même si très maitrisé dans sa réalisation et créant une ambiance hors du temps assez particulière et réussie. Le film convoque un ennui abyssal et même si c’est probablement l’effet recherché, ça donne une œuvre assez vide et désincarnée, avec autant de conversation qu’un cadavre fraichement sorti du formol.
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Grand écart cinématographique quand après cette œuvre très auteurisante et hyper mal reçue, on se retrouve devant Sea Fever, une petite série B sans trop de prétention qui sent bon le poisson pas frais et la marée montante. Même si le film est loin d’être aussi sympa qu’il aurait pu l’être. On passe à deux doigts d’un survival sympa contre un poulpe interdimensionnel, et on se retrouve avec des pêcheurs, vraiment pas les harpons les plus aiguisés du baleinier, qui se battent contre des poissons d’argents dans un film qui aime bien se prendre pour The Thing, mais en est quand même fort loin. Ceci dit, ce n’est pas très sympa de brailler sur un film qui n’a clairement pas le budget pour faire plus que ça, qui reste bien tenu dans l’ensemble et semble vraiment animé des meilleures intentions du monde.
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On termine la journée avec 1BR : The Apartment, qui est un film sur lequel j’ai du mal à me positionner. Le film a plu aux gens, énormément, il leurs a plu au point de remporter le Prix du Public. Et moi aussi j’ai été vraiment embarqué et j’étais assez extatique à la fin, seulement, plus j’y repense et plus j’y vois un métrage assez moyen dont je peine à trouver vraiment les qualités. C’est un film assez efficace, qui va sûr des terrains où je l’attendais pas au début, qui parvient à t’impliquer à fond avec son héroïne et qui comporte quelques twists sympas. Et je pense que c’est ce qui fait sa force, j’y ai vécu une vraie expérience de festival avec un public investi et réactif, et ce sentiment de vivre une expérience commune devant un film (la sieste commune du début de journée ne compte pas) fait qu’il restera à mes yeux une expérience marquante et un film pour lequel j’ai pas mal d’affection. En dépit du fait que je ne sais pas vraiment pourquoi c’est bien.
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JOUR 2 : Après une première journée dans l’ensemble plutôt décevante au niveau de la sélection, on commence le vendredi dans la félicité avec un film touché par la grâce, une première réalisation pour une réalisatrice pleine d’avenir qui remportera quelques jours plus tard le Grand Prix, le Prix de la Critique, le Prix des Jeunes et le Prix de la Musique : le raz-de-marée Saint-Maud. Croisade psychotique obsessionnelle sur les dérives de la croyance religieuse extrémiste, c’est d’une maitrise formelle hallucinante pour un premier long métrage. Avec son lot d’images fortes et tout en ménagement de ses effets, un personnage principal d’une grande subtilité d’écriture et très bien incarné (Morfydd Clark aurait complétement roulé sur la compétition s’il y avait un prix d’interprétation) c’est la grosse claque des familles de cette édition qu’il ne faudra manquer en salles sous aucun prétexte, et un très beau Grand Prix.
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Avec une dramaturgie digne des épisodes filler les plus éclatés de The Walking Dead, servi par une réalisation de téléfilm SyFy, Blood Quantum gagne son peu d’intérêt par ses soubresauts de gore dans le zigouillage de zombie par des indiens vénères. Au-delà de ça, c’est vraiment un film pour lequel on s’interroge sur comment il a bien pu se retrouver en compétition, on se demande s’il s’est perdu et on a envie de lui indiquer le chemin de la sortie très vite, un peu par bonté d’âme et un peu parce qu’on a peut-être autre chose à faire de notre vie que de voir des acteurs amateurs déplorables se débattre dans un film sans scénario et chier sur des pare-brise du haut d’un pont. Non mais.
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Pour conclure cette journée qui aura vu le pire et le meilleur en terme de cinéma dans la sélection officielle, The Vigil qui est probablement mon petit coup de cœur personnel de cette année.
Le film délaisse l’imagerie horrifique chrétienne vu et revu dans le cinéma d’horreur pour s’intéressé à une mythologie orthodoxe juive. Je n’avais de mémoire jamais vu ça dans un film de ce genre, et déjà ça lui confère une fraicheur grandiose. Même si le film récite énormément de poncifs très classiques du cinéma horrifique de fantôme, il parvient à inscrire tous ses effets et ses thématiques pas extrêmement original au premier abord (personnage qui doit surpasser sa culpabilité) dans une œuvre suffoquante et personnelle qui ne te lâche pas la grappe un seul instant. Un des meilleurs films de frousse que j’ai vu depuis longtemps pour lequel j’espère une bonne sortie en salle.
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JOUR 3-4 : Et voilà qu’on continue sur les très bons rails de la veille avec la projection de Vivarium, lui aussi reparti bredouille lors de la cérémonie alors qu’il a plutôt marqué les esprits, et en bien.
Si le film n’est pas extrêmement subtil dans son propos et a pu être qualifié par certains comme un épisode trop long de la quatrième dimension (l’influence est évidente), reste qu’il est d’une grande beauté avec une charte visuelle très pertinente et efficace dans sa façon de convoquer le malaise de par son aspect factice, répétitive et aliénante.
Le film sait se faire léger par instant, mais cache dans ses strates les plus profondes une noirceur édifiante et on termine un peu sur les rotules.
Copyright The Jokers Films |
The Room est également une des très chouettes expérience du festival, partant d’un concept ma foi plutôt grotesque à la base (une pièce mystérieuse dans une maison peut faire apparaitre tout et n’importe quoi sur demande, sans contrepartie, tellement de possibilités mon dieu) et il le traite vraiment comme tel à la base, mais au fur et à mesure le film sombre dans un premier degré assez surprenant qui fonctionne très bien.
Reste que le film est plutôt facilement écrit par instant, qu’il est extrêmement flou sur les règles de son univers qu’il modifie un peu au gré de ses besoins, et qu’il tente de s’achever sur une note de noirceur pessimiste qui je trouve, n’a pas sa place là-dedans.
Copyright Les Films du Poisson |
Et cette plutôt jolie sélection dans l’ensemble s’achève sur le très sympathique film qui a obtenu les honneurs avec le Prix du jury : Howling Village.
Le nouveau film du réalisateur émérite des Ju-On : The Grudge, Takashi Shimizu m’a plutôt déçu dans un premier temps, mais cette déception incombe à un facteur extérieur au film : la météo. Après 20 minutes de marche sous une pluie torrentielle, j’ai eu énormément de mal à me concentrer sur le film, trop occupé à greloter et essayer de sécher dans mon coin, me gâchant légèrement l’expérience d’un film que j’aurais dû adorer.
J’ai en conséquence trouvé le film assez peu clair, je me suis un peu perdu dans le scénario et j’ai trouvé ça dommage car en terme de réalisation et de travail sur le son, le film est un vrai régal, offrant notamment un jumpscare parmi ceux qui m’ont le plus choppé par les bourses de ma vie. C’est assurément un film que je reverrai dans des conditions plus favorables.
Copyright Takashi Shimizu |
Hors Compétition
La compétition, c’est bien, mais le hors-compétition… C’est mieux ?
C’est la question qu’on pourrait se poser puisque surr les quatre films visionnés, trois auraient très largement pu prétendre à y concourir, à commencer par Rabid de Jen et Sylvia Soska, duo de réalisatrices remarqué en 2012 avec leur film American Mary.
Remake du film de David Cronenberg (Rage dans nos contrées) c’est une œuvre qui incarne la quintessence de ce que je viens chercher dans un festival comme fantastic’art. Les frangines récupèrent le pitch du film original mais le pousse beaucoup plus loin, font un travail beaucoup plus intéressant sur le scénario, et même dépasse largement leur modèle en terme de body horror. C’est une œuvre qui suinte l’amour du cinéma de genre par tous ses pores, un véritable projet de remake pertinent qui a des choses à dire et qui tout en respectant immensément le matériau de base raconte quelque-chose de nouveau, existant par lui-même au-delà de sa base. C’est une aubaine pour tous les fans du genre, un midnight-movie jouissif comme on en voit plus, et de loin le film que j’ai eu le plus de plaisir à découvrir durant mon séjour.
Copyright Splendid Film |
Hors compétition également, un premier film extrêmement réussi et déstabilisant : Jumbo de Zoe Wittock. D’un postulat de base complètement chelou, à savoir une jeune fille marginale tombant amoureuse et vivant une romance avec une attraction de fête foraine, la réalisatrice tire une œuvre attachante et d’une très grande sensibilité qui rappellera un peu La Forme de l’Eau dans son histoire d’amour improbable et pourtant empreinte d’une grande beauté. Elle parvient même à donner à son histoire d’amour une certaine dimension charnelle, ce qui est quand même un sacré tour de force étant donné qu’un des deux partis est un immense tas de métal froid et inanimé. Reste une interprétation parfois un peu caricaturale même si très appréciable, mais Jumbo est un film qui aurait lui aussi très largement eu sa place en compétition.
Copyright Rezo Films |
Terminons sur ces films que l’on aurait aimé voir dans la sélection officielle avec The Lodge, nouveau film de Severin Fiala et Veronika Franz après Goodnight Mommy .
Un film cruel qui s’amuse merveilleusement avec le spectateur en jouant sur le point de vue de façon foutrement perverse, pour une expérience moitié jouissive moitié traumatique, mais de sûr une expérience marquante. Il comporte forcément quelques longueurs et baigne dans une brume narrative assez déstabilisante, on ne sait pas réellement quand le film fini son exposition, et on est même pas certain de ce que le film raconte avant la toute fin. Et c’est ce brouillard issu du jeu de perspective qui donne toute sa force à un métrage qui aurait encore une fois eu sa place en compétition sans avoir à rougir.
Copyright SquareOne Entertainment |
Dernier film que j’ai pu voir hors-compétition, qui lui aussi se veut une œuvre jouant sur le point de vue mais qui pour le coup se vautre complètement et que je suis bien content de ne pas retrouver en sélection officielle : I See You de Adam Randall.
Le film commence assez correctement, avec une première partie intrigante, quelques scènes d’horreur, le tout étant assez propret et pas fascinant, mais enfin, ça va.
Puis dans sa seconde partie, le film revient au début en changeant de point de vue, te donne absolument toutes les explications de tous les éléments « horrifique » que tu as vus jusqu’ici, tout en prenant bien soin de t’annoncer avec d’énormes sabots la fin du film. C’est atrocement chiant, et quand finalement les révélations « surprenantes » arrivent, et bien tu ne lèves même pas un sourcil parce qu’avec un minimum d’attention tu as normalement tout vu venir depuis 45 minutes. Et c’est pas très intéressant, du coup.
Copyright Adam Randall |
Ainsi se termine cette rétrospective du 27ème festival du film fantastique de Gérardmer, que j’espère très fort pouvoir refaire l’année prochaine. Et pour conclure, un petit top de la sélection !
TOP 10 du FESTIVAL
1) The Vigil de Keith Thomas
2) Saint-Maud de Rose Glass
3) Vivarium de Lorcan Finnegan
4) Howling Village de Takashi Shimizu
5) 1 BR : The Apartment de David Marmor
6) The Room de Christian Volckman
7) Sea Fever de Neasa Hardiman
8) Snatchers de Stephen Cedars
9) Répertoire des villes disparus de Denis Côté
10) Blood Quantum de Jeff Barnaby
1) The Vigil de Keith Thomas
2) Saint-Maud de Rose Glass
3) Vivarium de Lorcan Finnegan
4) Howling Village de Takashi Shimizu
5) 1 BR : The Apartment de David Marmor
6) The Room de Christian Volckman
7) Sea Fever de Neasa Hardiman
8) Snatchers de Stephen Cedars
9) Répertoire des villes disparus de Denis Côté
10) Blood Quantum de Jeff Barnaby
Kévin