[CRITIQUE] : Première Année
Réalisateur : Thomas Lilti
Acteurs : Vincent Lacoste, William Lebghil, Michel Lerousseau,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Comédie dramatique.
Nationalité : Français.
Durée : 1h32min.
Synopsis :
Antoine entame sa première année de médecine pour la troisième fois. Benjamin arrive directement du lycée, mais il réalise rapidement que cette année ne sera pas une promenade de santé. Dans un environnement compétitif violent, avec des journées de cours ardues et des nuits dédiées aux révisions plutôt qu'à la fête, les deux étudiants devront s’acharner et trouver un juste équilibre entre les épreuves d’aujourd’hui et les espérances de demain.
Critique :
Épopée romanesque intense et légère à la fois, parfois surréaliste mais constamment prenante jusque dans son final doux-amer, #PremièreAnnée est une belle fenêtre ouverte sur un milieu aussi dur qu'il est intransigeant, ou la compétitivité et l'individualisme sont (souvent) rois pic.twitter.com/AD5j4IQWvX— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 12 septembre 2018
Comme le dit si bien le proverbe “jamais deux sans trois”, il était sûr et certain que Thomas Litli allait encore une fois replonger dans un univers qui le passionne : la médecine. Après Hippocrate en 2014, puis Médecin de campagne en 2016, c’est cette fois sur les bancs de la fac, pendant la décisive première année de médecine que son quatrième film décide de s’appuyer.
La passion anime ce Première Année. Que ce soit celle du cinéaste, dont on ne peut plus taire sa passion du métier de médecin ou celle d’un de ses protagonistes, Antoine. Après avoir raté deux fois le concours, il réussit à dégoter une dérogation car il veut coûte que coûte passer en deuxième année. Devenir médecin est un objectif et c’est sa dernière chance d’y parvenir. Chance qu’il décide de ne pas gâcher, au péril de sa santé. Benjamin, lui par contre n’est pas animé de cette passion. Comme pas mal d’élève de terminal, le jeune homme ne sait pas trop quoi faire. Il finit en faculté de médecine plus pour contenter son père (lui-même chirurgien) que par conviction. Et comme la vie est particulièrement injuste, le bonhomme s’en sort beaucoup mieux alors qu’il travaille moins. Aidé par une bonne logique de révision et surtout par un désintérêt total de réussir ou non (son avenir n’est pas en jeu).
Le film a les qualités et défauts d’un film de Litli. Avec sa connaissance du milieu, le réalisateur touche toujours juste et rend ses personnages humain et attendrissant. Mais comme toujours, le film ne décolle jamais et comporte de nombreuses facilités scénaristiques. Sa tendance à se reposer sur ses lauriers et parler que d’un seul sujet avec une seule et même mécanique commence à lasser. Sans faire de Première Année un mauvais film (loin de là), on sent qu’il est temps pour le réalisateur de trouver un autre sujet et qu’il serait de bon ton de rester à une trilogie de la médecine. Nous avons ici un film très bien ancré dans notre réalité, avec un scénario linéaire, accentué par le sujet. Les nombreuses ellipses rendent le film un peu plus vivant, avec deux scènes clefs (les deux examen). Le sous-texte sur le déterminisme social est très bien souligné, sans en faire trop. Le film est monté comme un Rocky (référence que le réalisateur n’a pas caché) avec un objectif final et des entraînements, ici mental, pour y parvenir. Mais ce qui est le plus réussi dans Première Année, c’est bien son duo d’acteur. Vincent Lacoste et William Lebghil sont fantastiques et aident grandement à avoir de l’empathie pour les deux personnages.
Au final, si Première Année n’arrive pas à surprendre, il arrive quand même à nous faire passer un agréable moment. Modeste, à l’image de son réalisateur, sa bienveillance et sa passion transpercent l’écran.
Laura Enjolvy
Passé les exceptionnels Hippocrate et Médecin de Campagne, Thomas Lilti (qui devient tranquillement mais surement un cinéaste qui compte dans le septième art français) continue donc encore et toujours d'explorer et de nous faire découvrir les méandres (mais surtout les travers) de la profession de médecin dans l'hexagone, en s'attachant cette fois aux prémisses de ce choix de vie : les études, avec le bien nommée Première Année, pour lequel il retrouve le très demandé Vincent Lacoste - déjà d'Hippocrate -, et fait tourner pour la première fois le tout aussi booké William Lebghil (qui était déjà associé à Lacoste pour le pas vraiment mémorable Jacky au Royaume des Filles).
A travers le prisme du parcours scolaire de deux étudiants aspirant médecins en première année de médecine, Lilti cerne avec une vérité passionnante, la difficulté tout autant que l'aspect parfois totalement illogique, du parcours du combattant de tout étudiant ambitieux se rêvant " sauveur de vie ", et nous place littéralement au coeur de cette existence - dont les codes nous semblent parfois familiers - pleine de stress, de désillusions, d'incompréhensions et d'enthousiasmes, qu'il filme comme une comédie trépidante (entre thriller et film sportif, où la compétitivité et l'individualisme sont souvent rois) autant qu'un drame social sincèrement émouvant et qu'un teen movie intelligent.
Le cinéaste connaît tout de ce monde qu'il a arpenté par le passé, et même s'il a tendance à un poil se répéter au fil des opus (ce ne serait pas du luxe de le retrouver sur un projet totalement original), la magie de son engagement (démontrer l'aspect impitoyable de cette année charnière) opère à nouveau sans trop de difficulté.
Sa mise en scène se solidifie au fil des bandes (la réalisation caméra à l'épaule, est un plus indéniable même si beaucoup se plaindront de l'effet " téléfilm " qu'elle dégage), tout autant que son écriture (les ressorts comiques et dramatiques font très souvent mouches, ainsi que sa gestion du temps et du suspense), et l'empathie pour ses deux héros, les complémentaires Benjamin et Antoine (autant finement croqués qu'interprétés avec conviction par le duo Lacoste/Lebghil, à l'alchimie incroyable), est totale.
Épopée romanesque légère, intense, parfois surréaliste mais constamment prenant jusque dans son final doux-amer, Première Année est une belle fenêtre ouverte sur un monde aussi dur qu'il est intransigeant, mais aussi et surtout, une nouvelle réussite de la part d'un cinéaste sensiblement à suivre...
Jonathan Chevrier