[CRITIQUE] : Arythmie
Réalisateur : Boris Khlebnikov
Acteurs : Alexander Yatsenko, Irina Gorbacheva, Nikolai Shraiber,...
Distributeur : Les Valseurs
Budget : -
Genre : Drame, Comédie.
Nationalité : Russe, Finlandais, Allemand.
Durée : 1h56min.
Synopsis :
Katia et Oleg sont un couple d'urgentistes en Russie.
Oleg est brillant, mais son métier l'absorbe. Confronté chaque jour à des cas difficiles, l'alcool l'aide à décompresser. Katia ne se retrouve plus dans cette relation. A l’hôpital, un nouveau directeur applique des réformes au service de la rentabilité. En réaction, Oleg s’affranchit de toute limite et l'équilibre du couple vacille plus encore.
Critique :
Représentation des occupations et préoccupations actuelles d’une génération de jeunes actifs, humble et juste observation de la fragilité et de la force d’une bulle amoureuse, Arythmie est, en plusieurs tons, à la fois profondément désespéré et plein d’espoir. (@MnFrankenstein) pic.twitter.com/0gfd3IZ1si— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 6 août 2018
Oleg et Katya sont mariés et urgentistes dans le même hôpital. Oleg présente tous les symptômes d’un alcoolisme et Katya s’en détache progressivement, ne parvenant plus à l’aimer. Le travail n’aide pas, les patients sont parfois très difficiles à gérer et les coupes budgétaires affaiblissent considérablement le service…
L’arythmie cardiaque est l’irrégularité des battements du cœur, qui peuvent alors passer d’un rythme trop lent à un rythme trop rapide. Ce désordre est le problème cardiaque le plus courant. Ces mêmes problèmes cardiaques sont d’ailleurs déclinés tout au long du film, d’abord à travers les patients que traitent les personnages. Lors d’une consultation, Oleg rencontre une dame, il est persuadé qu’elle fait un infarctus mais la cardiologue réfute cette idée : « on ne fait pas un infarctus à trente ans ». On en arrive au deuxième traitement du cœur, celui de l’histoire d’amour ou plutôt de désamour entre Katya et Oleg, jeunes trentenaires mais dont le couple semble déjà tristement à bout de souffle.
Il est un peu dommage qu’Arythmie s’introduise de façon aussi austère, avec une plongée brutale et peu soignée dans la rupture du couple dont on peine dans un premier temps à comprendre tous les aboutissements. Le récit prend cependant une dimension supplémentaire à travers l’examen du système de santé russe, en proie à des coupes budgétaires et à des réformes qui mettent la vie des patients en danger. Boris Khlebnikov ne filme pas que la mort d’une relation amoureuse mais aussi celle d’une profession dont le facteur humain – principal facteur, est en voie de disparition dans une Russie en crise. A travers ces deux intrigues, on assiste à la désillusion progressive des jeunes adultes russes qui ne trouvent ni leur place dans leur travail, ni dans leurs relations humaines.
Si on peut, pendant quelques instants et à cause de quelques scènes, craindre un film extrêmement convenu, qui tomberait dans les poncifs de la rupture amoureuse à l’écran, Arythmie parvient à se démarquer par son traitement assez fin du sujet. Les personnages, d’abord à peine esquissés, se dessinent progressivement jusqu’à former deux portraits réussis : on ne sait si Katya et Oleg sont trop différents ou si complémentaires, si le bonheur se trouve dans ce qu’ils peuvent former ou s’il les attend ailleurs. Ni fleur bleue ni trop dramatique, Arythmie ne fait que filmer les sentiments et unions au quotidien, un quotidien qui devient le maître-mot de l’œuvre.
Représentation des occupations et préoccupations actuelles d’une génération de jeunes actifs, humble et juste observation de la fragilité et de la force d’une bulle amoureuse, Arythmie est, comme son nom l’indique et comme son sujet le veut, en plusieurs tons, à la fois profondément désespéré et plein d’espoir.
Manon Franken