[FUCKING SERIES] : 13 Reasons Why saison 2 : Life After Hannah
(Critique - avec spoilers - de la saison 2)
Captivante, sombre et mature, jouant habilement des clichés inhérents au genre pour mieux consolider son message de prévention (dans lequel tout le monde peut se reconnaitre, parents et enfants), universelle, intelligente et follement importante, la première saison de la belle 13 Reasons Why incarnait une humble tragédie à la fois naturelle, malaisante (juste ce qu'il faut) et d'une générosité rare, traitant avec délicatesse du deuil et de la confusion/douleur face à la perte d'un proche.
Une bouleversante surprise à la beauté et à la sincérité débordante, au douleureux parfum de nostalgie et de mélancolie, un de ces shows brillants qui nous hantent encore longtemps après vision, et qui n'avait pas du tout usurpé son statut de sensation du moment, au moment de sa diffusion sur Netflix au printemps 2019.
Restait désormais la question d'une suite, inévitable aux vues de son succès, une seconde saison autant redouté (la boucle pouvait très bien être bouclé avec les 13 premiers épisodes) que profondément désiré par les sériephiles que nous sommes, notamment parce que les pistes esquissées dans le dernier acte (l'inévitable procès, les répercussions des révélations d'Hannah, la potentielle épopée vengeresse de Tyler, la prise de conscience des adultes,...), pouvaient très bien amener une seconde salve passionnante.
Et c'est véritablement le ressenti, apocalyptique (mais complètement différent selon les individus), des événements passées sur sa poignée d'héros, et la volonté de reconstruction qui en découle, qui est au coeur de ses nouveaux épisodes, bien mieux rythmés (facile en même temps) et à la portée encore plus importante.
Conscient des critiques faites sur la première saison tout autant qu'ils sont pleinement affranchis des contraintes du matériau d'origine, les showrunners de la série place de facto ce retour sur les rails de la pédagogie et de la liberté - nécessaire et vitale - de parole, marchant d'un pas plus assuré dans sa mise en image des affres douloureux de l'adolescence, encore plus crédible et palpable qu'auparavant, et cette fois-ci conjugués au pluriel et non plus à la première personne (Hannah), avec de nombreuses et douloureuses luttes individuelles.
Sérieuse mais beaucoup moins sombre (excepté un season final particulièrement - voire inutilement - violent et choquant), apportant une densité non négligeable à son histoire (on en apprend évidemment plus, grâce aux nombreux points de vue) et à ses thématiques (on rend plus probant la volonté de justice et de rédemption) autant qu'à la caractérisation de ses personnages (une bonne chose pour Clay, qui en sort considérablement grandit), prenant toujours aussi frontalement la question du harcèlement malgré quelques tics scénaristiques calqués sur son illustre aîné (les polaroids remplacent les cassettes audios, mais chargent toujours autant Jock et le déni entourant ses actes), la saison 2 de 13 Reasons Why convainc sur de nombreux points là où elle s'échine pourtant à dérouter sur d'autres, allant même jusqu'à littéralement complexifier pour pas grand chose, tout le coeur des liens unissant certains de ses héros (on pense automatiquement à l'arrivé improbable d'un love interest d'Hannah, voir même la présence envahissante de ce personnage dans la vie de Clay, tel un fantôme qui le hante mais loin d'être nécessaire pour l'avancée de l'intrigue, excepté dans les flashbacks).
Si on peut encore tiquer sur sa longueur - la maladie des shows Netflix -, ses intrigues persos pas toujours maîtrisés (et, encore une fois, trop longues) même sa volonté de jouer encore plus lourdement la carte de l'émotion (procédé qui semblait plus naturel dans la première saison), cette seconde salve d'épisodes, riches en rebondissements diverses et portée par un trio d'acteurs impressionnant (Dylan Minnette touchant dans la peau d'un Clay ne voulant pas aller de l'avant, Justin Prentice incroyable en roi des salopards/sociopathe glacial mais surtout Kate Walsh, qui porte le tout à bout de bras), tient admirablement bien la route et se légitime complètement à défaut de répondre à toutes nos (démesurées ?) attentes.
Faire mieux que la saison une était compliqué, faire (presque) aussi bien c'est déjà un bon compromis... où pas, selon les sériephiles.
Jonathan Chevrier