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[CRITIQUE] : Los Adioses



Réalisateur : Natalia Beristain Egurrola
Acteurs : Karina Gidi, Daniel Giménez Cacho, Tessa La, Pedro de Tavira, ...
Distributeur : KMBO
Budget : -
Genre : Drame, Biopic
Nationalité : Mexicain
Durée : 1h26min

Synopsis :
Rosario Castellanos est encore une étudiante introvertie lorsqu’elle se lance dans l’écriture et rencontre Ricardo Guerra. Alors qu’elle est en passe d’être reconnue comme l’une des plus grandes plumes de la littérature mexicaine, l’homme qu’elle aime devient son rival. C’est en restant fidèle à ses choix de femme, de mère et de poétesse que Rosario combattra une société dirigée par les hommes et fera entendre les voix des femmes.



Critique :


Los Adioses, deuxième long-métrage de la réalisatrice Natalia Beristain, s'intéresse à la vie de la célèbre poétesse et autrice majeure de la littérature mexicaine : Rosario Castellanos. Elle est aussi une figure importante de la montée du féminisme en Amérique latine et de la lutte contre le racisme. Un grand personnage donc qui continue même après sa mort d'ouvrir la voie vers une société moins patriarcale. Elle est malheureusement peu connue en France, c'est pourquoi Los Adioses est important à voir si sa vie et son combat vous intéresse. Cerise sur le gâteau, le film est très réussi.


Ce qui frappe dans ce film c'est la douceur de sa photographie qui contraste avec les événements éprouvants que doit endurer la poétesse. Natalia Baristain a choisit la simplicité et une certaine pudeur pour raconter le naufrage de sa relation toxique avec son mari, le Dr Ricardo Guerra. Relation qui lui fait comprendre son statut en tant que femme et l'injustice qui en découle. Car Rosario connait du succès, son talent est remarqué, ce que n'apprécie pas son mari. C'est aussi une femme dévouée corps et âme à l'écriture, beaucoup de scènes montrent l'autrice écrire fiévreusement sur sa machine à écrire, qu'importe son état : heureuse, triste, après une dispute, en pleine dépression. Le processus d'écriture est mis en valeur par la mise en scène : par des petits détails, le son de la machine, les différents valeur de plan, les livres qui envahissent parfois l'écran. L'écriture fait partie intégrante de la vie de Rosario et c'est ce qui la sauve parfois.



La relation avec son mari prend aussi beaucoup d'espace. Que ce soit dans les flash back ou le présent, la réalisatrice a voulu montrer la passion qu'avait Rosario pour Ricardo, passion dévorante qui lui fait accepter beaucoup de chose. Ses tromperies, ses accès de jalousie envers son travail alors que lui n'est pas capable d'écrire une ligne. Mais cette relation malsaine (où elle finira par y mettre fin, heureusement) est le début pour elle d'un questionnement féministe : est-ce normal de traiter les femmes de cette façon, comme des objets qui doivent rester gentiment à la maison ? Une scène particulièrement marquante où son mari prend une décision très importante à sa place et sans lui demander son avis peut paraître scandaleuse de nos jours mais était monnaie courante dans les années 60.  


Et surtout, je ne peux pas parler de Los Adiosessans souligner la prestation magistrale que nous offre Karina Gidi. Son charisme ébloui l'écran, il suffit d'un regard pour que le spectateur comprenne ce que Rosario ressent. Il est d'ailleurs dommage que le montage soit ponctué de flashback où Tessa La joue une Rosario plus jeune. Même si l'actrice fait de son mieux, elle n'a malheureusement pas le charisme de Karina Gidi. Mais les flashback sont assez subtils et se mélangent parfaitement au récit, ne le rendant jamais lourd ou incohérent. 

Natalia Beristain voulait absolument rendre hommage à une femme qui est devenue un modèle pour les jeunes féministes mexicaines. Et le pari est tenu : Los Adioses est un beau portrait, doux, tantôt poétique, en se laissant bercer par les poèmes de Rosario Castellanos, raconté en voix off par Karina Gidi, tantôt sensuel, tantôt mélancolique et parfois dramatique mais sans jamais tomber dans le pathos.

Laura Enjolvy