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[CRITIQUE] : Les Amants du Texas


Réalisateur : David Lowery
Acteurs : Rooney Mara, Ben Foster, Casey Affleck,...
Distributeur : Diaphana Distribution
Budget : 3 000 000 $
Genre :  Western, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h37min.

Synopsis :
Bob et Ruth s’aiment, envers et contre tout. Et surtout contre la loi. Un jour, un braquage tourne mal et les deux amants sont pris dans une fusillade. Quand Bob est emmené par la police, Ruth a tout juste le temps de lui annoncer qu’elle est enceinte. Dès lors, Bob n’aura qu’une obsession : s’échapper de prison pour rejoindre sa femme et son enfant.
Mais quand il y parvient, quatre ans plus tard, le rêve correspond mal à la réalité. En fuite, poursuivi par la police et par les membres d’un gang, Bob peine à rétablir le lien avec sa famille. Ruth est devenue mère et elle ne veut pas d'une vie de cavale : courtisée par un policier attentionné, la jeune femme devra choisir entre le passé et l'avenir.



Critique :

Force est d'admettre qu'il faut réellement en avoir de sacrés corones pour débarquer dans le monde du septième art actuel, avec une première réalisation qui a, ni plus ni moins, l'ambition de s'imposer avec panache dans le genre ultra codifié du film de gangster.

David Lowery - que Variety a part ailleurs, en janvier dernier, classé dans son top 10 des réalisateurs à suivre cette année -, le sait pertinemment, lui qui en plus d'en avoir écrit le script, se rajoute un handicap de poids dans ce premier essai sur grand écran : choisir comme personnages principaux un jeune couple de hors-la-loi aussi aventureux qu'amoureux.

Dès lors, avant même que la séance ne projette sa dernière bobine, le bonhomme donne automatiquement le bâton de la critique facile pour se faire battre, à des cinéphiles qui n'auront en tête, tout du long, que l'idée de le comparer aux cultissimes Bonnie & Clyde d'Arthur Penn et La Balade Sauvage de Terrence Malick.
Mais après vision, si la comparaison au film de Penn s'estompe très vite, celle le reliant à l'une des œuvres majeurs du cinéma de Malick elle, au contraire, nous explose littéralement au visage, sans pour autant entacher une seule seconde, l'aura hautement sublime de ces Amants du Texas.



Comme Malick, Lowery est fasciné par les paysages désertiques et les champs à perte de vue de son Texas natal, terre aride et merveilleuse qui lui permet de capter, par instant, la beauté imposante et indescriptible de mère nature.
Comme Terrence, le David use à la perfection d'une voix-off et d'une lenteur de ton aussi envoutante que spirituelle, mais surtout comme son glorieux ainé, il met un point d'orgue à rendre son image la plus esthétique et sublime possible, via un travail d'orfèvre sur les jeux de lumière.

Car oui, avant toute chose, aussi magnifique soit-il, Les Amants du Texas est une aventure profondément sensorielle et mélancolique.
Prenant comme structure dramaturgique une romance entre deux amants aux destins brisés et les sentiments brulants et passionnés qui les lient, la bande prend son temps pour convenablement se développer, dévoilant peu à peu, tranquillement, ses personnages croqués avec une minutie frisant la perfection.

En s’immisçant dans leur intimité avec justesse et subtilité, le metteur en scène dissèque chaque geste, chaque regard à la vitesse d'un cœur amoureux, tantôt paisible, tantôt battant à la chamade, et toujours avec la volonté première de prouver que, souvent, les silences en disent beaucoup plus que les mots.
Dans une Amérique profonde moite et marécageuse - toute droit sortie des classiques du western moderne -, il expose sans concession et dans un romantisme aussi sombre que triste, ses personnages à leur noirceur, leur désarroi, leurs blessures profondes liées à leurs erreurs,...


Certes, si l'on ne peut nier que son histoire est plutôt fragile et convenue, et que sa réalisation manque souvent d'émotion, Lowery arrive cependant à faire oublier tous ses légers défauts de jeune premier grâce à un style rafraichissant - tout en ellipse -, un score minimaliste envoutant et un romantisme sincère, magnifié par un trio d'acteurs absolument parfait.
D'une Rooney Mara lumineuse et hésitante, à un Ben Foster encore une fois ébouriffant, sans oublier un Casey Affleck animal, tous sont aussi appliqués qu'impliqués à la tache.

Parcourut d'une étrange douceur jusqu'à un final infiniment touchant, Les Amants du Texas est un premier film aussi sincère, pur et naïf qu'un premier amour de jeunesse.

Honnête dans son hommage à ses pairs tout en possédant sa propre et forte identité, il laisse présager un avenir on ne peut plus brillant à son malin de metteur en scène.
Pas compliqué de le prédire en même temps, vu qu'après son passage à Sundance, Robert Redford himself l'a embauché pour le faire tourner son alléchant The Old Man and The Gun (ou l'histoire vraie d'un braqueur s'étant enfui dix-huit fois d'Alcatraz !).


On avait rarement été aussi confiant quand au talent et à l'avenir d'un jeune premier cinéaste du circuit indépendant.
Le dernier en date fut l'excellent Jeff Nichols, qui comme premier film - l'excellent Shotgun Stories -, avait justement lui aussi, choisit de dépoussiérer le film de gangster.

Coïncidence... ou pas.


Jonathan Chevrier


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