[CRITIQUE] : World War Z
Réalisateur : Marc Forster
Acteurs : Brad Pitt, Mireille Enos, Matthew Fox, Elyes Gabel, James Badge Dale, David Morse,...
Distributeur : Paramount Pictures France
Budget : 170 000 000 $
Genre : Science-Fiction, Action, Fantastique, Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h56min.
Synopsis :
Un jour comme les autres, Gerry Lane et sa famille se retrouvent coincés dans un embouteillage monstre sur leur trajet quotidien. Ancien enquêteur des Nations Unies, Lane comprend immédiatement que la situation est inhabituelle. Tandis que les hélicoptères de la police sillonnent le ciel et que les motards quadrillent les rues, la ville bascule dans le chaos...
Les gens s’en prennent violemment les uns aux autres et un virus mortel semble se propager. Les êtres les plus pacifiques deviennent de redoutables ennemis. Or, les origines du fléau demeurent inconnues et le nombre de personnes infectées s’accroît tous les jours de manière exponentielle : on parle désormais de pandémie. Lorsque des hordes d’humains contaminés écrasent les armées de la planète et renversent les gouvernements les uns après les autres, Lane n’a d’autre choix que de reprendre du service pour protéger sa famille : il s’engage alors dans une quête effrénée à travers le monde pour identifier l’origine de cette menace et trouver un moyen d’enrayer sa propagation…
Critique :
Il en aura fallu de sacrés couilles du côté chez la Paramount, pour faire de ce World War Z, le blockbuster number one de l'été ciné de 2013, après un sale buzz de plusieurs années qui le jurait accident industriel, des causes d'une production calamiteuse et apocalyptique, à la limite même de l'indécence.
Des couilles aussi grosses que velues donc, parce que l'ombre d'un ratage massif à la John Carter, bien plus que l'aura populaire des zombies en ce moment (merci Walking Dead), pointait salement le bout de son nez dans la psyché de tous les cinéphiles à chaque fois que le titre du métrage se voyait prononcé.
Fort heureusement après vision, World War Z est loin, très loin d'incarner un plantage digne de ce nom.
Mieux même il arrive à être dans sa globalité, savoureusement convaincant, si on en oublie volontairement un dernier tiers foutrement ridicule, qui dénature complétement avec l'heure et demie d'excellence offerte auparavant.
Parce qu'avant même toutes les galères qui auront entourés sa prod, le film était quand même un putain de pari, une adaptation de l'impossible du pavé littéraire adulé du rejeton de Mel Brooks, Max Brooks, dénué d'intrigues et uniquement basé sur une multitude de vignettes.
Zappé la puissance géopolitique et sa vision politisé du monde de l’œuvre original, la péloche se focalise uniquement sur son concept de base simpliste mais purement efficace, soit l’invasion totale et apocalyptique de la planète par des morts-vivants excités comme des femmes le premier jour de la troisième démarcation des soldes.
Tout du long, on y suivra (par obligation) l’enquête globe-trotter d'un retraité de l'ONU/papa gâteau/touriste, Gerry Lane pour identifier l’origine 0 de la pandémie qui transforme les êtres humains à une vitesse incroyable, et tenter d'y trouver un remède, tout en cherchant à protéger le mieux possible sa famille.
Plutôt que de jouer sur une mise en place ronflante expliquant le pourquoi du virus ou s'attardant trop longtemps sur une présentation des persos dans un cadre ultra-propret, Marc Forster - bien plus à l'aise que sur Quantum of Solace - met directement dans le bain son spectateur, en le mettant à rude épreuve et au plus près d'une panique entièrement subie via une invasion New-Yorkaise aussi impressionnante et tonitruante que saisissante de réalisme.
On croirait véritablement être au cœur d'un attentat - la réaction affolée, dans un brouhaha sans nom, de la population qui ne comprend pas toujours se qui se passent y est pour beaucoup - le tout dans une ville (un pays même) encore fortement marquée et traumatisée par les attentats du 11 septembre...
Une image puissante et oppressante qui n'aura de cesse de marquer le spectateur durant plus d'une heure et demie, porté par un Brad Pitt au sommet de son art et d'une profondeur incroyable, en anti-héros résigné, apeuré mais courageux et obsédé par la sureté de ses proches face à une avalanche de désolation affreusement agressive et spectaculaire, qui trouvera son point d'orgue dans une scène de panique générale à Jérusalem, avec l'escalade des zombies salement barré et sous pression, à l'ampleur sidérante.
Du pur divertissement nerveux et populaire - y'a aucune scène gore et les zombies ne sont pas dégueu, c'est du PG ici - tendu, bruyant (putain de boulot sur le score et le sound design) et prenant - plus d'une fois on a le souffle coupé, et la tension est toujours palpable -, solidement mis en scène (ça alterne les plans ultra-cut et filmé caméra à l'épaule à la Paul Greengrass, ainsi que les plans larges en hélico), vif et très porté sur l'action et le spectaculaire, qui tient en haleine grâce à un habile dosage entre instants extrêmes et moments de relâchements, mais qui malheureusement, se ramassera littéralement la gueule dans un dernier acte foutrement dispensable, justement cible des nombreuses réécritures et re-shoots de ces derniers mois.
Dernier acte donc en quasi huit-clos et confiné dans un hôpital, stéréotypé, redondant et tourné au rythme d'un déambulateur comparé à l'allure pressée qui caractérisait le film jusqu'à lors, et ou les zombies, entre deux placements de produits ostentatoire pour Pepsi, n'y sont plus du tout montrés sur-énervés mais errant et au ralentit comme dans les bandes cultes de ce bon vieux George Romero !
Un décalage de ton et de caractéristique certains, décevant et incompréhensible, qui clôture World War Z de manière absurde vu qu'il n'a strictement rien à voir avec le reste du métrage, lourd stigmate d'une production bancale - le final ayant été réécrit à trois plumes, celles pourtant pas manchot de Damon Lindelof, Drew Goddard et Christopher McQuarrie.
Mais si le film peine à réellement se créer une personnalité (ça bouffe un peu chez Soderbergh et son Contagion, et beaucoup chez Boyle et son 28 Jours Plus Tard), évites toutes contraintes humaines (à la différence de The Walking Dead, et sa vision disloquée d'une poignée de survivants, souvent réduit à la barbarie pour survivre à l'apocalypse) et contestataire (on n'est pas chez Romero, Forster n'a pas la haine contre le système et n'est pas engagé, il prône avec un optimiste hilarant la gentille coopération internationale en temps de crise), il n'en reste pas moins un divertissement séduisant, claustrophobe, un poil trop long, pas très fin et systématique (ça aligne à la pelle les moments de bravoure jusqu'à épuisement) mais clairement élégant et archi-généreux en spectaculaire sans pour autant chercher à en mettre plein la vue comme tout blockbuster friqué.
Jamais flippant mais toujours oppressant, primaire, direct et totalement voué à son acteur vedette sans qui le film ne se serait d'ailleurs jamais monté - vu que c'est Pitt lui-même qui a acheté les droits du roman - World War Z est un pur film estivale dans toute sa splendeur, un grand huit émotionnel bien tenu qui aurait pu prétendre à un statut de culte si sa production (et son script) avait eu plus de rigueur dans la tache.
Espérons que la suite, déjà signé par la Paramount, soit de facture équivalente et qu'elle n'est pas à subir les mêmes affres dans sa conception que son illustre ainé.
Mais quoiqu'il arrive, que le studio ne s'affole pas, une bande avec un cœur gros comme ça, ça ne se manque sous aucun prétexte en salles, et avec le Brad en son casting encore moins...
Jonathan Chevrier