[CRITIQUE] : The Vast of Night
Réalisateur : Andrew Patterson
Acteurs : Sierra McCormick, Jake Horowitz, Gail Cronauer,...
Distributeur : Amazon Prime Video
Budget : -
Genre : Drame, Science-fiction.
Nationalité : Américain
Durée : 1h29min
Synopsis :
A la fin des années 1950, au Nouveau-Mexique. Une jeune demoiselle du téléphone, Fay et un animateur radio, Everett découvrent une étrange fréquence comportant des appels interrompus et anonymes et des signaux sonores conduisent Fay et Everett à résoudre l'énigme...
Critique :
Tendue, énergique et parfaitement ancrée au coeur des 50's, #TheVastofNight, entre romance à suspens et vraie expérience grisante qui suggère intelligemment plus qu'elle n'en montre, grave sur la pellicule le frisson palpable d'une menace sur laquelle on ne peut pas mettre de nom pic.twitter.com/jFdgZcQ1vL— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) June 3, 2020
Dans la catégorie des jeunes cinéastes qui ont l'aplomb de mener, au coeur de leur premier passage derrière la caméra, leur concept singulier jusqu'au bout sans frémir le moins du monde sous le poids de l'entreprise, Andrew Patterson se pose là et se fraye à coup de latte sa place au coeur de la jungle Hollywoodienne, avec un premier essai fleurant bon la Twilight Zone.
Subtilement intitulé The Vast of Night, la péloche est de ces petites bizarreries indés qui use à merveille de ses références (et avec subtilité du phénomène de citation/reappropriation) pour mieux créer sa propre voie, formellement et structurellement fascinante.
Sorte d'épisode spécial de la vénérée X-Files, perdue au coeur des enivrantes 50's alors hantées par la question extraterrestre - et leur potentiel invasion sur Terre, et surtout outre-Atlantique -, le film déroule son intrigue ciselée sur une seule nuit; un soir de match dans un petit patelin paumé à la frontière du Nouveau-Mexique, ou seul deux âmes adolescentes, vont réaliser que des événements mystérieux se passent dans le ciel.
Soit une jeune standardiste, Fay (Sierra McCormick, excellente), et un animateur radio, Everett (Jake Horowitz, convaincant), qui ne tardent pas à déceler une étrange fréquence impliquant autant d'appels interrompus et anonymes que de signaux sonores, qui vont les inciter à résoudre l'énigme...
Il y a quelque chose de profondément grisant dans l'approche, précise et inventive de Patterson, qui fait que son premier passage derrière la caméra déjoue toutes les attentes avec une facilité proprement déconcertante, pour mieux incarner une séance rafraîchissante et vive, qui ne brade jamais son aura mystique sur l'autel du divertissement racoleur; comme s'il privilégiait le chuchotement délicat et excitant d'une odyssée nocturne articulée autour de l'émerveillement du " comment ", plutôt que le cris assourdissant et bardé d'effets criards, du " pendant " qui caractérise toute bande sur une potentielle présence de petits bonhommes verts sur nos terres.
Constamment en territoire familier - de manière totalement volontaire, ce qui en fait toute sa force -, The Vast of Night opère pourtant intelligemment un léger processus de distanciation entre ce qu'il montre et son auditoire (dialogues rapides, mise en scène resserrée et follement évocatrice, ou chaque gros plan signifie quelque chose, ou encore cadrage digne d'une série B de l'époque), comme s'il testait son spectateur, l'obligeait à suivre ses règles pour mieux pénétrer son histoire et les secrets qui s'y cachent, pour mieux appréhender ses personnages, les connaître et mieux les adorer.
Tendu (ce suspens qui grimpe crescendo, et qui nous fait vite réaliser que quelque chose ne va pas), énergique, démodé - dans le bon sens du terme - et techniquement virtuose (la réalisation assurée de Patterson se marie fougueusement avec la photographie de Littin-Menz), parfaitement ancré dans les 50's (l'angoisse de la guerre froide, la course aux étoiles, la lubie extraterrestre,...); The Vast of Night, entre romance à suspens et vraie expérience viscérale qui suggère intelligemment plus qu'elle n'en montre, grave sur la pellicule le frisson palpable d'une menace sur laquelle on ne peut pas mettre de nom
Un premier essai audacieux, old school et original, qui vaut décemment la petite heure trente qu'elle demande à ce qu'on lui consacre.
Jonathan Chevrier